Chapitre 6 - Phase 3 : Négociation (Si...)

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  Il n'y avait plus un bruit. Juste le souffle douloureux de la brune.

Mindily venez-t-elle de lui dire qu'elle avait eu besoin de lui ? Harry était scotché. Il n'avait pas conscience qu'il aurait pu l'aider juridiquement, Simon le lui avait sûrement caché afin de limiter les dégâts médiatiques. Mais il aurait pu l'aider. Et maintenant, c'était trop tard. Aujourd'hui, elle lui reprochait de ne rien avoir fait, de ne pas avoir agi. Comme il s'en voulait !

Le jeune Harry ouvrit doucement la bouche pour dire quelque chose, afin de rompre le terrible silence, tout en avançant une main hésitante vers l'avant-bras de Mindily. Mais soudain, la jeune femme se recula vivement, retenant sa respiration, il allait la toucher. Jamais plus quelqu'un ne la toucherait. Les yeux de la brune fixaient cette main perdue dans l'espace qui les séparait. Harry comprit qu'il avait fait une erreur mais avant même qu'il n'ait le temps de réagir, la brune lui lança un terrible regard empreint de désespoir, le contourna et sortit de sa chambre en courant.

Où allait-elle ?

Harry partit à sa poursuite. Manquant de tomber dans les escaliers, il vit la jeune femme attraper fermement un trousseau de clés. Comme elle s'en doutait, son père s'était borné à aller au centre-ville à pied, comme ils le faisaient avant.

« Qu'est-ce que tu fais ? » Mais cette question demeura sans réponse. Inquiétant un peu plus le jeune Harry, Mindily, sans lui adresser le moindre regard de plus, ouvrit la porte d'entrée et sortit à toute vitesse. Le bouclé était toujours sur ses talons mais ce ne fut que lorsqu'il la vit se dirigeait vers la voiture garée devant la maison qu'il comprit.

-         Non, ne fait pas ça ! s'écria Harry en accourant vers elle. Tu n'es pas en état de conduire. Regarde-toi, tu es toute tremblante !

Mindily se contrefichait de ce qu'il pouvait bien lui dire. C'était trop tard. Le mal était fait.

La jeune femme entra dans la voiture et démarra à toute allure avant qu'il n'ait le temps de la rejoindre. La voyant quitter la rue à une vitesse folle, Harry n'hésita pas une seconde et courut vers sa propre voiture. Démarrant et s'engageant sur la voie, le bouclé chercha dans ses contacts le numéro d'une personne qu'il avait enregistré au cas où

Il enfreignait déjà une dizaine de règle en partant à sa recherche le téléphone à la main. Mais sans même en être conscient, pour elle, il aurait  tout fait.

*

Alice était partie. Elle avait quitté l'hôtel en courant peu de temps après le départ du métis et à présent, elle courait. Elle courait à en perdre haleine, pieds nus, dans les rues de Londres. Plus rien ne comptait. Il n'y avait plus qu'elle et son souffle douloureux, martelé par sa course.

Et dans leur course folle en voiture ou à pied, Alice et Mindily partageaient ces pensées qui cherchait à négocier ce que l'on ne peut pourtant pas négocier.

« Si seulement tout était pour la vie. Si seulement tout ne volait pas en poussière au moindre tremblement de terre. Si seulement on pouvait au moins se préparer à affronter les dangers. Siseulement on pouvait arrêter le temps et revivre cet instant de bonheur, éternellement... »

Alice courait de plus en plus vite, bousculant les gens sur son passage. Plus rien ne comptait, même pas la douleur de ses pieds nus écorchés par le bitume craquelé.

« Je me sens si seule. Je suis laissée pour morte dans cet affreux décor. Des tas de personnes défilent sous mes yeux pourtant je me fiche d'eux. Je n'ai besoin que d'une chose. Si je ne peux l'avoir, laissez-moi au moins faire une pause... »

Les larmes ruisselaient abondamment sur les joues de Mindily. Elle n'arrivait pas à effacer son visage démoniaque de sa mémoire. Alors elle appuya un peu plus sur l'accélérateur.

« J'ai besoin d'air. Je dors plus la nuit. Je dialogue avec moi-même. Je suis une machine. C'est pas une vie ! Si on pouvait se préparer aux horreurs qui nous heurtent, si seulement on ne craignait rien. Si seulement on savait tout d'avance.... »

Les mots de Zayn résonnaient sous son crâne. Non, ce n'était pas de sa faute. Alice le détestait, le haïssait. De toutes ses forces.

« On pense à tort que tout finit par s'arranger, mais le sort s'acharne encore, encore et encore. Je me sens trahis, salis, haïs, bannis... »

Le souvenir frais du regard d'Harry posé sur elle. Mindily voulait hurler. Elle voulait qu'il sorte de sa vie. Il avait tout gâché et il avait en plus voulu la toucher. Quel salop.

« Il y a bien trop de problèmes dans ce monde. J'arrive plus à lutter, c'est trop immonde. C'est si long, c'est si dur. Le drame est partout, il vous frappe quand vous vous y attendez le moins et vous en devenez complètement fou... »

La tête de la jeune femme commençait à tourner. Les passants dansaient autour d'elle. Alice courrait toujours plus vite alors que du sang s'écoulait de son nez.

« Tous ces crashs en avions. Toutes ces agressions. Ces guerres de religions. Ces amours sans passions. »

Alice courait. Plus vite.

« Des étés sous la pluie. Des hommes à l'agonie. Des couples en thérapie. Des familles anéanties. »

Mindily roulait. Trop vite.

« Trop peu de 'je t'aime'. Un gros taux de suicides. Toujours les mêmes problèmes. Des centaines d'homicides. »

Alice, emportée par sa course, ne fit pas attention en traversant la rue. Tandis que Mindily, entrainée par la vitesse, ne vit pas la jeune blonde débouler sur la route.

Dans un coup de frein assourdissant, les pneus brulèrent le sol, s'accrochant au maigre espoir d'une vie meilleure.

« Un règlement de compte. Une fille à l'hôpital. Un tremblement de terre et deux tours qui s'effondrent. »

Alice avait les deux mains posées sur le capot de la voiture, arrêtée à quelques centimètres de ses frêles jambes. Sa poitrine se mouvait sous ses respirations saccadées. Essoufflée, elle peinait à respirer. Le choc avait était intense et violent ; elle avait, encore une fois, failli mourir.

Une goutte de sang s'écrasa à ses pieds. C'est alors qu'Alice porta une main à son nez et se rendit compte qu'elle saignait. Mais qu'est-ce qu'il lui arrivait ? Qu'est-ce qu'elle faisait ? Elle mettait sa vie en danger, pourquoi ? Elle n'était pas comme ça, non. Le souvenir de la petite fille extraordinaire qu'elle était autrefois traversa son esprit. Elle voulait redevenir cette fille. Elle avait perdu assez de temps. Ses parents veillait sur elle depuis le ciel, Alice le savait, elle n'avait pas à avoir peur.

Doucement, la jeune blonde redressa son visage vers la personne au volant de la voiture. Celle-ci relevait elle-même sa tête, elle avait la bouche pleine de sang. La brune avait surement dû s'ouvrit la lèvre inférieure en percutant le volant suite au coup de frein qu'elle avait donné.

Les deux jeunes femmes se fixaient, immobiles alors que les passants autour d'elles s'affolaient. Elles avaient toutes les deux le visage en sang mais elles s'en fichaient.

La brune et la blonde ne se quittaient pas des yeux. Quelque chose venait de naître, quelque chose d'intense et de terriblement puissant.

Un sourire se dessina alors sur le visage pâle d'Alice. « Ça va, ne vous inquiétez pas, ça va » souffla-telle a un vieil homme qui lui proposait d'appeler une ambulance.

« Ça va aller » répéta-t-elle plus fort à l'intention de la jeune brune toujours immobile dans sa voiture, les mains fermement accrochées au volant comme elle s'accrochait à la vie.

Bring me joy IIOù les histoires vivent. Découvrez maintenant