Chapitre 19 - La laisser partir.

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            Zayn faisait face à Nate. Il lui barrait carrément la route. Nate aurait dû se douter qu'il ne se laisserait pas faire, qu'il reviendrait et qu'il paierait.

Ils étaient tous les deux face à face, immobiles sur le trottoir désert. Le métis fit encore un pas en avant, rejoignant Nate dans le halo de lumière que produisait le réverbère.

Zayn ferma les yeux et se craqua le cou. Il était contrarié, et il y avait de quoi l'être. Nate, lui, n'avait pas peur, il ne le craignait pas ; une part de lui connaissait la vérité.

-         Pourquoi tu as fait ça ? lâcha finalement Zayn.

Nate fut surpris par la question. Alors il n'avait vraiment rien compris ?

-         Pour te faire comprendre que ce que tu fais c'est mal. Tu te rends compte de ce que tu fais à Alice ?

Les deux yeux noisettes de Zayn se figèrent dans le vide. Il eut un furtif sourire amer puis le ton amical qu'ils employaient jusque-là se transforma :

-         Mais qu'est-ce que tu crois ?! cracha le métis. Que c'est facile ? Ils vont l'humilier, ils vont la briser !

Nate ne mit pas longtemps à comprendre que Zayn évoquait les personnes de son monde ; les journalistes, les paparazzis... toutes ses personnes qui s'emparent de votre vie et la transforment avec quelques mots empoisonnés.

Mais Zayn avait utilisé une expression qui retenait l'attention de Nate. « Ils vont la briser. »

-         Est-ce que tu sais ce qui est arrivé à ses parents ? reprit le métis.

-         Oui, je sais ! répondit Nate presque agacé que Zayn refuse de laisser Alice tranquille, qu'il refuse d'admettre que c'était lui qui lui faisait du mal.

-         Tu sais ? Mais alors c'est toi le connard ! s'emporta-t-il. Non mais sérieux ! Ouvre les yeux, abruti ! Je suis musulman, ses parents ont été tués dans les attentats du 11 septembre, qu'est-ce que tu crois qu'ils vont dire ? Réfléchis, putain ! Ils vont la détruire ! Ça ira jusqu'à détruire ma famille.

Nate ne dit rien.

-         Ils vont la détruire, répéta-t-il en soupirant.

-         Alors c'est vrai ?

-         Quoi ?

-         Tu t'efforces de la maintenir loin de toi pour la protéger.

Zayn soupira.

-         Je sais même pas pourquoi je fais ça.

-         Oh si tu le sais ! Tout le monde le sait. Une fois qu'Alice entre dans ta vie, elle l'illumine et tu ne peux plus voir qu'à travers ses yeux.

Zayn regarda Nate. La tension était redescendue.

-         Je suis désolé, dit Nate.

-         De quoi ? ricana amèrement le métis. Tu as fait ce que tu pensais être juste. Tu l'as fait pour Alice.

-         Je suis pas désolé pour ça. Enfin si, un peu... sourit-il. Je suis désolé pour toi. Alice est incroyable et... et tu ne peux même pas être avec elle. Je comprends ce que tu fais, vous ne pouvez pas être ensemble, ça ferait du mal à trop de monde. Alors... je suis vraiment désolé pour toi. Ça ne doit pas être facile.

Zayn ferma les yeux et baissa la tête sans un mot. Une voiture passa près d'eux brisant le silence.

-         Tu prendras soin d'elle ? Jure le moi parce que sinon je te jure que là, tu le paieras !

Nate ricana.

-         Je prendrais soin d'elle, affirma-t-il.

Zayn sourit faiblement au jeune homme puis recula jusqu'à ce qu'il ne représente plus qu'une faible silhouette noire dans la nuit.

-         Eh, Zayn ! l'interpela alors Nate.

L'ombre du jeune homme se retourna.

-         On n'est pas ensemble Alice et moi, lui avoua-t-il. On ne le sera jamais.

Zayn se retourna complètement vers Nate.

-         Beaucoup de personnes l'ont cru, notamment Mindily. Mais ce n'est pas le cas ! Un jour, elle m'a même encouragé à aller voir une fille dans un café. Elle me lance des défis comme ça... On est simplement amis. Enfin... c'est un peu comme une sœur pour moi alors je prendrais soin d'elle, c'est certain. Mais... on ne sortira pas ensemble.

-         Merci, souffla Zayn avant de disparaître totalement.

Nate ne savait plus vraiment quoi penser. Une partie de lui avait raison, Zayn faisait délibérément du mal à Alice. Mais c'était un mal pour un bien ; en réalité, il l'éloignait au mieux de lui pour qu'Alice finisse par s'habituer à l'absence de Zayn, qu'elle finisse par l'oublier afin que jamais leur probable histoire d'amour n'éclate au grand jour.

Les journalistes et haters sortaient toujours des histoires inimaginables alors si Zayn était capable de faire le rapprochement entre les attentats des tours jumelles et les menaces qu'il recevait concernant sa religion, qu'allait-il pouvoir arriver de pire ?

Zayn ne voulait pas y penser. Marchant seul dans les rues new-yorkaises en pleine nuit, il voulait seulement arrêter de penser.

Fixant la lune, il espérait qu'un jour il réaliserait un autre rêve, un rêve permanent. Mais c'était peine perdue d'espérer car les rêves viennent lentement mais ils repartent très vite. Il la voyait lorsqu'il fermait les yeux. Il espérait puis l'espoir mourait lorsqu'il ouvrait à nouveau les yeux pour faire face à la réalité accablante, c'était toujours la même histoire. Peut-être qu'un jour il comprendrait pourquoi tout ce qu'il touchait mourait avant même d'avoir vécu.

Mais peut-on vraiment comprendre, un jour ? Alice était le soleil de sa vie et il ne pouvait pas s'autoriser à l'admettre. La vie est faite de telle sorte que le soleil ne te manque que lorsqu'il comme à neiger. Tu ne te rends compte que tu l'aimes que lorsque tu la laisses partir. Mais il devait la laisser partir.

Fixant le plafond dans l'obscurité, Alice avait toujours le même sentiment de  vide dans son cœur. Alors qu'Elena dormait tout près d'elle sur le canapé, Alice se sentait incroyablement seule. Doucement, elle se leva et alla chercher le cadre de ses parents déposé sur la cheminé. Rapidement, elle retourna se coucher auprès de son amie et, la photo d'un amour éternel pressé contre sa poitrine, Alice ferma les yeux en tentant de croire à la force que cet amour. Mais l'amour vient lentement alors qu'il repart très vite.

Zayn était rentré à l'hôtel incognito. Il avait veillé à ne pas réveiller son meilleure ami et s'était coucher directement. Même pas la force pour une cigarette. Il la voyait lorsqu'il s'endormait, c'était chaque nuit la même histoire. Mais il ne pouvait jamais la toucher, il ne pouvait jamais la garder près de lui. Parce que tout ça n'était qu'un rêve et que la réalité les séparait. Il l'avait trop aimé. Alors qu'il s'était interdis d'aimer à nouveau des années auparavant, Alice était entré dans sa vie et l'avait illuminé. Il l'avait trop aimé, il l'aimait trop et à présent, loin d'elle, il tombait au plus bas.

            Tu n'as besoin de lumière que lorsqu'elle s'éteint.

            Tu sais que tu as été bien que lorsque tu te sens faible.

            Tu ne hais la route que lorsque ton chez toi te manque.

 

            Tu comprends que tu l'aimes que lorsque tu la laisses partir.

Bring me joy IIOù les histoires vivent. Découvrez maintenant