Chapitre 5- Svetlana

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Je le comprends très vite dès mon réveil : ma journée ne sera pas plus agréable que la soirée et la nuit qui l'ont précédée...

Note pour moi-même: demain est un autre jour ne signifie pas nécessairement que demain sera un jour meilleur...

Parce que revenons à ma soirée... Malgré sa volonté manifeste de conserver ses 5 étoiles, Sonia a pris tout ce qu'elle pouvait prendre (et croyez-moi, elle a aimé) tandis que je me suis ennuyée ferme. Et sans parvenir à faire autre chose que simuler.

Impossible avec le sourire de ce crétin qui flottait entre nous et mes pensées qui s'étaient focalisées sur son attitude insupportable.

Je me suis donc dépêchée de partir de chez Sonia 5* dès que j'ai estimé pouvoir le faire sans la froisser. Elle reste, malgré ma distraction passagère, une promesse de soirée agréable quand j'aurais cessé de côtoyer l'autre idiot aux yeux bleu gris.

L'idée était au moins de profiter d'une bonne nuit de sommeil. Sauf qu'ensuite, ma nuit a été identique. Nulle...mais en pire.

Je peux sans doute ne m'en prendre qu'à moi-même puisque, comme un sportif sadomasochiste qui regarderait en boucle la vidéo d'un match perdu, j'ai regardé une dernière fois le selfie de Tadzio avant de reposer mon téléphone sur ma table de chevet pour m'endormir.

Et loin de me permettre de trouver l'apaisement, son attitude exaspérante sur ce fichu MMS, - sourire railleur et sourcil piercé légèrement arqué à l'appui-, m'a en définitive tellement agacée que j'ai difficilement réussi à fermer l'œil de la nuit. Même en me convainquant que j'allais boire du petit lait à le regarder déchanter, lorsqu'il finirait par admettre que j'étais définitivement, absolument et totalement hermétique à sa gueule de voyou angélique.

Et ça, toute rockstar et musicien exceptionnel qu'il soit et peu importe les succès qu'il a pu connaître... dans différents domaines.

Bref, je me suis réveillée à l'aube d'un sommeil non réparateur et bien trop court pour le programme tendu qui m'attend au bloc opératoire.

Même si opérer est une réelle passion, et cette passion une des raisons de toutes ces années d'études et d'abnégation, j'apprécie aussi la perspective de pouvoir être un peu plus sereine en n'ayant pas de gestes précis à pratiquer et en arrivant plus tard au boulot lorsque je consulte au lieu d'opérer.

Ce qui n'est pas le cas aujourd'hui. Et m'empêche de lutter contre le cafard qui m'envahit subitement, -manque de sommeil sans doute-, parce que je n'ai malheureusement pas assez de temps devant moi pour appeler ceux que j'aime. Ma famille, mon père, ma mère, mon frère, tout comme mes meilleures amies sont en Europe, - enfin, j'émets une réserve pour Romy qui n'est jamais à l'abri d'une surprise de son amoureux-, et ils me manquent.

J'ai envie de contact humain, -et pas juste avec un organisme anesthésié dont je trafiquerais le cœur-. Et aussi de rires, de discussions yeux dans les yeux, de boire des cafés, sans être attablée seule ou avec des collègues et employés de One Heart, certes agréables, mais avec lesquels les échanges restent bien superficiels.

Bien sûr, j'ai l'habitude du travail intense et de la solitude qu'il a toujours signifié et impliqué pour moi, en dehors des liens professionnels. Mais depuis plusieurs mois que je suis à New York, à part avec des filles rencontrées dans des bars ou sur tinder (je n'aime pas Grindr), les gens de ma salle de boxe ou mon prof de piano, je n'ai jamais eu l'occasion de nouer de liens réels. Le fait que je refuse de sortir avec mon collègue Paul, chef intérimaire avant mon arrivée, au motif très clair que je préférais les femmes, n'a pas aidé à faciliter mes relations avec mes collègues masculins, même si depuis toutes ces années, j'y suis plutôt habituée.

TRY BABYOù les histoires vivent. Découvrez maintenant