Chapitre 22

815 117 29
                                    

Le cœur battant de rage, j'observe la scène en me demandant comment réagir. Pour le moment, heureusement, aucune des six personnes qui campent devant chez moi n'a prêté attention au taxi jaune qui vient de ralentir à proximité.

—  Vous pouvez rouler encore quelques instants s'il vous plaît, Monsieur ? Laissez bien sûr le compteur tourner, je vous paie le supplément. J'ai besoin de passer un coup de fil et disons que...

Je regarde vers ma maison.

— ... Je ne peux pas vraiment sortir maintenant.

Le chauffeur me jette un regard curieux dans le rétroviseur avant de reprendre la route. Il doit se demander dans quelle série débile je joue pour mériter un tel traitement mais j'ai autre chose à faire que de lui raconter ma vie.

Je sais surtout à qui je veux parler quand je lance mon appel.

—  Quelle bonne surprise, Belgrade...Je savais que vous...

—  Fermez là, Steadman, j'ai pas envie de rire. Grâce à votre petit cirque de l'autre soir, je me retrouve coincée devant chez moi. Et croyez-moi, je vais vraiment vous tuer.

Un éclat de rire me répond.

—  Vous tournez un peu en boucle, ça va finir par manquer singulièrement d'originalité, vous savez. Le comique de répétition, c'est pas trop mon truc, Svetlana.

—  Je n'ai pas envie de rire, croyez-moi.

Ma voix monte un peu dans les aigus, malgré ma volonté de ne pas perdre mon calme devant le chauffeur de taxi.

—  Je ne vous ai rien demandé. Je bosse, je fais mes preuves depuis que je suis gosse et, croyez-moi, je me suis arrachée. J'ai été choisie pour mon poste, pas parce que je suis la pote du boss. Pas non plus parce que j'aurais couché avec lui mais parce que je suis compétente. Tellement que quand il a eu une urgence familiale, c'est à moi qu'il a fait appel pour opérer avec lui. Je ne veux pas que la moindre tache rejaillisse sur tout ce travail, vous comprenez ? Et là, avec votre petit show stupide, je suis éclaboussée. Je vais être la copine des milliardaires qui couche en prime avec un coureur people.

—  Au risque de me répéter moi aussi, vous m'avez déjà dit tout ça, le soir du concert... Je ne crois pas avoir remis vos compétences en cause depuis que vous avez opéré mon grand-père et...

—  Je ne peux même pas rentrer chez moi, putain ! Je l'interromps et tant pis s'il me fait, une fois de plus, jurer comme un charretier.  Y a des filles devant chez moi qui à mon avis ne sont pas là pour me dire qu'elles veulent mon corps. Et d'autres journalistes.

—  Attendez ! De quoi parlez-vous exactement ? Et pourquoi dites-vous « d'autres journalistes » ?

—  Parce que j'ai eu droit à une interview en sortant du boulot à cause de vos conneries ! Et que maintenant, je ne peux même plus rentrer chez moi parce qu'il y a deux photographes et quatre pétasses qui m'attendent pour me demander probablement, elles aussi, si je couche avec vous. Quelqu'un a même marqué que j'étais une salope sur ma porte d'entrée ...

Une fois n'est pas coutume, ma voix se brise.

Je dois vraiment aller dormir.

—  Vous faites chier Steadman. Vraiment vraiment vraiment chier.

—  Je suis désolé.

Je ricane.

—  Pour ce que j'en ai à foutre.

—  Je suis désolé, Svetlana. Vraiment. Je ne voulais pas ça et je ne pensais pas qu'on en arriverait là. Je n'ai pas réfléchi aux conséquences et croyez-moi, je suis vraiment foutument désolé.

TRY BABYOù les histoires vivent. Découvrez maintenant