Un Trône Brisé Tome 1 : Apprends-moi [terminé]

Prologue

Un regard gris. Je n'avais jamais vu des yeux comme les siens. Ils n'étaient pas tout à fait bleus, et ils n'étaient pas noirs. Ils étaient gris.

Ma main se leva, mais ma peau n'entra pas en contact avec lui cette nuit non plus. Il s'effaça, la frustration m'envahissant. 

— Augna.

J'ouvris les yeux, sursautant en sentant une main sur moi.

— T'as crié. Il est tôt, tu vas réveiller le village.

Mon père secoua négativement la tête. Le voyant repartir vers son lit je m'assis dans le mien, mes genoux remontant contre ma poitrine.

Je ne savais pas son nom, je ne savais pas où il était, et je ne savais même pas s'il était réel. Mais il hantait mes nuits depuis des mois. Je soupirai, puis sortis de mon lit, m'habillant.

— Où tu vas encore ?

Je ne répondis rien, fermant la porte derrière moi. Mon arme en main, je pris la direction des grandes portes. Je m'arrêtai devant, regardant le garde qui était censé surveiller l'extérieur.

Il dormait.

Ma main s'empara d'une flèche, visant le poteau à ses côtés. Je lâchai la corde qui bandait mon arc, le garde se réveillant en sursaut.

— Augna, bon sang.

— Tu dormais, Zabirgue. Je dirais rien si tu me laisses passer sans prévenir Ashia.

Je le vis réfléchir, puis il retira mon arme du bois. Il la laissa tomber au sol, la ramassant pour la ranger avec les autres dans mon carquois.

Il entre-ouvrit le portail, m'y faufilant sans bruit. 

L'aube commençait à se lever, peu de lumière transperçait la légère brume du matin. Je rentrais dans la forêt, écoutant les chants paisibles des oiseaux.

C'était ce que je préférais en allant chasser tôt, le fait de me réveiller en même temps que la nature, et avant la plupart des habitants.

Je posais ma main sur un arbre pour m'aider à grimper, la mousse humide me la faisant déraper, étant maintenant fraîche et salie.

Je changeais de tactique en agrippant une racine dépassant du sol, me courbant pour attraper les autres jusqu'en haut de la côte. Je repris mon équilibre une fois en haut. Mon regard se posa sur mon pantalon, grimaçant en voyant son état : il était taché aux genoux. Ça risquait de me trahir, j'aurais dû prendre celui plus foncé, le noir.

Je me baissais en voyant une trace, deux demis cercles. Elle était bien dessinée, l'animal ne semblait pas avoir pris la fuite.

Je sortis ma flèche, l'encochant. J'avançais en faisant le moins de bruit possible, essayant de repérer s'il n'était pas loin. 

Du bruit m'interpella, tournant à droite, derrière un gros tronc. 

Je me figeai tout de suite, l'animal étant à moins de dix mètres. Je levai mon arme, prête à tirer. Du mouvement me déconcentra, la flèche se plantant à côté de la cible, celle-ci partant en criant sûrement l'alerte au danger. 

Je ne récupérai pas l'arme, voyant plusieurs hommes de loin, assis et discutant. Leurs habits étaient différents. Ils avaient de drôles d'objets avec eux. Je fis un pas en arrière sous la surprise de voir des inconnus sur nos terres.

Qui est-ce que ça pouvait être ? On connaissait toutes les ladonien, et aucune n'était en dehors de son territoire. On avait des accords.

Ça ne pouvait pas être des voyageurs non plus, n'appartenant plus à la communauté, ils ne pouvaient pas être aussi bien équipés. Et vu leurs allures, ce n'étaient pas des bladgonan.