Reviens nous, Geai Moqueur...

13 - Première victime

Une main secoua l'épaule de Willow. Elle grogna.

-Hey, je ne vais pas rester éveillé toute la nuit, rit Baz. Je suis fatigué, moi aussi.

La jeune fille ouvrit les yeux, puis bailla. Elle ne prononça pas un mot, mais se dégagea de la couverture et la tendit à Baz. La température la fit frissoner. Elle sentait l'humidité et le froid s'infiltrer dans sa peau. Elle avait l'impression que chaque parcelle de son corps gelait. Elle ne se souvenait plus comment elle se sentait quand elle avait chaud. Et ne savait plus comment faire pour retrouver une température corporelle normale. Elle se frotta les bras et souffla dans ses mains.

-Il y avait d'autres vêtements à la Corne d'Abondance, mais je ne les ai pas pris, puisque je supporte bien le froid. J'ai seulement emporté une couverture pour la nuit, dit Baz. Si j'avais su que je te rencontrerais, j'aurais pris aussi des habits chauds.

-Ne t'inquiète pas pour moi. Mes alliés ont peut-être des vêtements. Il faudra que je les rejoigne demain.

Baz afficha une mine déçue. Il semblait espérer que Willow reste avec lui.

-Peut-être que... tu pourrais venir avec moi ? chuchota-t-elle. Je ne sais pas s'ils voudront bien de toi, mais on peut tenter.

Le garçon sourit, puis s'emmitoufla dans sa couverture.

-Je ne regrette pas de t'avoir sauvée, lança-t-il en fermant les paupières.

Willow le détailla du regard. Il avait des cheveux bruns qui lui tombaient sur les épaules parce qu'il venait de les détacher. Il avait de larges épaules et semblait très musclé. Sa peau était basané et ses fines lèvres étaient étirées en un sourire. La jeune fille se félicita en pensant à Xarja. Elle lui avait demandé de ne pas juger les gens au premier abord, ce que Willow avait fait en faisant connaissance avec Baz. Elle en était fière. Elle ne savait pas exactement pourquoi il l'avait sauvée, aussi, elle se promit de le lui demander à son réveil.

Elle souffla dans ses mains pour les réchauffer. Elle surveillait sans grand intérêt les environs, quand elle entendit un bruit de craquement. Un autre tribut ? Son souffle s'accéléra, mais elle s'efforça de faire le moins de bruit possible. Son cœur tambourinait si fort dans sa poitrine qu'elle était étonnée que Baz ne se réveille pas. Elle risqua un coup d'œil au pied de l'arbre. Personne. Elle avait rêvé ?

Cette fois-ci, ce fut un bruit de glissement que Willow entendit. Il y avait bien quelqu'un ou quelque chose en bas. Elle se pencha pour mieux voir. Elle s'accrocha à une grosse branche avec ses bras et ses jambes et se laissa pendre. Elle resta de longues minutes dans cette position inconfortable. Soudain, elle vit une masse grise bouger. Elle soupira, soulagée. Ce n'était pas un tribut.

Après une petite hésitation, Willow reconnut une souris. Ou peut-être un rat, un campagnol ou une musaraigne, mais cela n'avait pas grande importance. La jeune femme fut prise d'un élan de courage et décida de remercier Baz comme il se devait. Elle se releva, attrapa le poignard qu'ils avaient récupéré sur le corps du garçon qui avait essayé de la tuer, puis se remit en position. Elle devait tuer cette souris pour pouvoir la manger avec Baz.

Willow se concentra. Elle ferma son œil gauche et visa. Elle n'aurait qu'une chance. Une fois que l'arme aurait touché le sol, la souris-rat-musaraigne-campagnol s'enfuirait et ne reviendrait plus.

-Tu peux le faire, Willow, s'encouragea-t-elle. Tu en es capable. En tout cas, tu dois en être capable.

Elle lança le poignard de toutes ses forces vers le sol. Elle suivit la trajectoire de l'arme des yeux. Lorsqu'elle entendit le choc du métal contre le sol, elle descendit de l'arbre. Arrivée en bas, elle s'aperçut qu'elle avait touché l'animal. Elle laissa échapper un petit cri de joie, qu'elle réprima immédiatement en se demandant pourquoi elle était aussi stupide (crier dans une arène où une dizaine de personnes ne veut que vous tuer n'est pas la meilleure des idées).