Jour 1 - I

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Benji siffla entre ses dents lorsque nous arrivâmes devant le gigantesque portail. Le fer scintillait au soleil et Sheila cligna farouchement des yeux devant les lueurs qui miroitaient sur le métal.

Je tirai la capuche de mon manteau sur ma tête. En dépit de la chaleur, Benji avait insisté pour que nous gardions nos manteaux afin de cacher nos visages majoritairement et de ne pas nous faire du souci que quelqu'un nous reconnût – et plus encore maintenant que nous étions déclarés hors-la-loi.

La sueur coula le long de ma colonne vertébrale et ma tunique glissa sur ma peau. Tandis que nous déambulions derrière la porte, le sable et la poussière sous nos pieds chauffèrent. Je regardai vers le sol, vers mes pieds, comme on me l'avait enseigné. De cette manière, nos visages étaient cachés et nous ne devions pas nous en inquiéter. Puis, je m'engageai dans la masse.

– La ville des barbares, acquiesça Benji en scrutant curieusement autour de lui.

– Je comprends enfin d'où vient le nom Entremonts, marmonna Sheila en désignant les énormes falaises et le sable orange et poudreux.

Les énormes rochers formaient un mur naturel autour de la ville.

– Entre Deux Montagnes, confirma Ferdi qui mit ses mains au dessus de ses yeux avant de pivoter en direction des énormes collines de pierres.

Je hochai la tête. Telle était effectivement le nomination officielle de Entremonts. Au fil des siècles, le long nom avait été repris dans la langue orale et transformé en un mot de trois syllabes et non plus une ville de quatre mots.

Entremonts était une sorte de vallée avec un ravin qui traversait la surface sablonneuse en son milieu. C'était l'endroit dans lequel la ville avait réellement pris vie.

Dans le ravin se trouvaient les magasins et hôtels ; les maisons où vivaient les gens, en revanche, étaient établies le long de la paroi rocheuse de la montagne et le bord du ravin.

C'était certainement une belle vue. Pourtant, un mauvais pressentiment s'empara de moi lorsque j'examinai plus minutieusement les gens qui y vivaient. Barbares, étaient-ils nommés.

Des hommes marchaient dans la rue avec de grands couteaux, des éclaboussures de sang sur leurs torses nus. Les femmes, elles, paradaient en rond en courtes robes et étaient à mon avis bien trop peu couvertes.

C'était la pagaille totale : des hommes se battaient entre eux, des enfants faisaient rouler des sacs et écopaient ensuite d'un gros coup sur le visage, une femme vendait des jeux de hasard au milieu de la rue alors que ses clients la dupaient et provoquaient des émeutes considérables.

– Il y a un de ces bazars, remarqua Ferdi à côté de moi.

– Restez près les uns des autres, ordonna Benji en suivant le chemin qui menait à la maison dans laquelle devait se trouver la Pierre de Guérison.

– Tiens ma main, Layla, ordonnai-je en me tournant derrière moi.

Ma demi-sœur de six ans faufila ses petits doigts dans les miens. Ils étaient moites car Benji s'était obstinée pour qu'elle fût également emmitouflée dans un gros vêtement bleu foncé.

– Je ne parviens toujours pas à croire que nous ayons pris cette enfant avec nous... soupira Benji, las, en se frictionnant le crâne.

Je jetai un regard furieux à l'arrière de sa tête.

– Ce n'est pas comme si j'avais eu le choix. Je ne pouvais pas la laisser seule à la maison. Elle est sous ma responsabilité, maintenant, argumentai-je doucement.

Sheila m'envoya un regard encourageant et compréhensif et Ferdi détourna la tête.

Ils étaient tous conscients de ce qu'il s'était passé une semaine auparavant ; du pourquoi j'avais le devoir de veiller sur ma demi-sœur.

Rubis de SangOù les histoires vivent. Découvrez maintenant