Jour 4 - IV

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La pierre précieuse se fragmenta en milliers de petits morceaux vert émeraude qui se répandirent sur le sol.

— Non ! s'écrièrent Pablo et Naveen en même temps.

Fernandez observa d'abord d'un regard effaré les morceaux de pierre brisée dispersés à ses pieds sur le sol. Il déglutit et se regarda lui-même comme s'il souhaitait vérifier qu'il vivait toujours, qu'il ne pouvait pas — tout comme la pierre — s'effondrer et ne jamais redevenir complet.

Et pendant un temps, il sembla que ce n'était pas le cas ; comme s'il demeurerait vivant.

Mais mon cœur se serra lorsque ses yeux trouvèrent les miens et j'y perçus une lueur peinée.

Le regard d'un homme qui fixe la mort droit dans les yeux.

Et puis il tomba au sol.

En premier lieu, je crus qu'il était mort sur le coup, pourtant, ce n'était pas le cas. Non, il était bien vivant. Il criait et hurlait de douleur, se roulait sur le dos et le ventre et martelait les matelas verts sous lui de son poing.

— Que se passe-t-il avec lui ? demanda Pablo, dont la voix était agitée d'avoir pleuré et chargée d'émotions, mais maintenant qu'il observait son ami souffrir, il sembla se ressaisir.

Je compris au même instant que Naveen, qui tituba en arrière, choqué.

— Il est retourné au moment où la Pierre de Guérison a sauvé sa vie ; il va à nouveau être fatalement brûlé et rien ni personne ne parviendra à le sauver.

Je frémis lorsque je vis la chemise de Fernandez mijoter. Elle devint liquide et se colla à son dos difforme, où les cicatrices n'étaient plus des cicatrices, mais de blessures ouvertes qui tremblaient à cause de la chaleur venant des flammes que Fernandez seul semblait voir.

— Mère ! cria-t-il. Allez chercher père ! Allez chercher la Pierre de Guérison !

J'abattis une main devant ma bouche.

— Il est littéralement retourné à ce moment, ou pas ? Il voit sa mère avalée par les flammes brûlantes tandis que lui aussi se consume.

Je déglutis. C'était mauvais signe.

— Je ne comprends pas, dit Ferdi en hochant la tête et regardant la scène. Il est fatalement brûlé ? Par quoi ? Je ne vois rien ?

Pourtant, moi, je le voyais bien. Dans ses yeux. Le brasier dansait autour de ses iris, les noircissait. La douleur qui y était ancrée et gravée était une image que je n'oublierais jamais.

— Salopard ! Comment as-tu pu lui faire ça ?!

Je m'avançai en avant vers l'empereur Shivan, mes couteaux parés. Mais ses soldats firent bientôt un pas en avant et m'attrapèrent par les bras pour me maîtriser. Je me débattis, grognai et donnai des coups de pied... pourtant, rien n'y fit.

Pablo se baissa à côté de son ami sur le sol et tenta de le calmer, cependant, Fernandez ne semblait même pas le voir. Il était entièrement dans un autre monde, en d'autres temps, englouti par un souvenir.

Naveen voulut s'accroupir aux côtés de Pablo, mais ce dernier le poussa brutalement en arrière, faisant tomber Naveen au sol.

— C'est ta faute ! lui cracha Pablo d'un ton mordant. Si tu avais simplement tenu ta langue... C'était ton meilleur ami ! cria-t-il. Comment as-tu pu lui faire ça ?

Fernandez émit un cri à crever le cœur qui fit trembler la pièce. Malgré le fait qu'il ne pouvait ni nous voir ni nous entendre, son cri sortit comme si Pablo avait raison et comme s'il était fou de rage envers Naveen.

Rubis de SangOù les histoires vivent. Découvrez maintenant