Jour 1 - V

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De nouveau un couteau sur le cou. Venant de toute personne autre que Fernandez qui aurait entrepris ce geste, je n'aurais pas été surprise et n'aurais pas reculé. Cependant, c'était différent.

Je jurais voir des flammes dans ses yeux vert foncé, les muscles de sa mâchoire vibrer et les veines de ses tempes palpiter dangereusement.

– Ne fais plus jamais ça, plus jamais, compris ?

Je ne pus m'abstenir de lui envoyer un faible sourire angoissé.

– Tu ne me tueras de toute façon pas. Tu viens de mentionner que je te suis nécessaire. J'ai l'information dont tu as besoin. Tu ne me tueras pas, renouvelai-je, obstinée.

– Probablement pas, grommela Fernandez sombrement. Mais les blessures physiques ne sont-elles pas pires que la mort ?

Il leva le bout du poignard, suivit la courbe de la veine dans ma nuque, repassa sur mon menton et ma bouche avec le métal jusqu'à ce que la pointe de la lame parvînt à mon œil.

– Que dirais-tu d'un œil en moins ?

Je sentis une goutte de sang jaillir à l'endroit où le métal pénétrait dans la peau sensible sous mon œil.

Le liquide rouge s'égoutta sur ma joue de la même façon qu'une larme l'aurait fait. Je retroussai la lèvre, menaçante, en premier lieu pour le défier, et en deuxième afin que ma peine et ma colère éclatassent.

Ensuite, il captura ma main, si vite que je ne me rendis compte qu'après quelques instants que mes doigts étaient écartelés sur la balustrade.

– Une phalange de moins à chaque fois que tu me tourmentes ? Ça me semble plus que raisonnable, pas toi ? ricana Fernandez après avoir bougé sont arme au dessus de mes doigts.

Il incisa une entaille superficielle, doucement et légèrement, là où les bouts de mon doigt s'unissaient grâce aux phalanges qu'il s'apprêtait à couper.

Avec effroi et répulsion, je contemplai la scène ; le sang dégoulinant, mes phalanges fourmillant à la pensée de les perdre. S'il en était ainsi, je ne manierais plus jamais mes couteaux normalement...

Me battre ne serait plus comme avant. À l'instar de piller.

– Donc, sourit Fernandez en me lâchant abruptement.

Haletante, je soutins ma main sanguinolente contre moi en observant comment il se tournait sur ses talons et franchissait une autre porte égayée d'un voile.

– Tu viens avec ?

Je tenais ma main serrée tandis que le sang dévalait plus abondamment hors de la plaie. Boudeuse, je le suivis, consciente des horreurs qui me surviendraient si je m'opposais à lui.

Passée le voile, les perles et diamants produisirent un son réconfortant en s'entrechoquant les uns aux autres quand leur forme initiale fût rétablie.

Nous avions abouti dans la chambre à coucher de Fernandez. Sur le sol était étendu un grand tapis rouge ficelé de fils d'argent et d'or. Un énorme lit à baldaquin avec des bijoux rouges était prostré contre le milieu du mur. Des armoires agencées, contre le mur elles aussi, étaient placées près d'une baignoire, fumant à cause de l'eau chaude qui y avait été versée et qui attendait Fernandez dans le coin de la pièce.

Quant aux deux jeunes filles qui l'attendaient dans leurs jolies jupes scintillantes, elles étaient à son entière disposition, souriantes.

– Pas pour l'instant, mesdemoiselles, leur dit-il gentiment. Allez voir si Dragtan a besoin de quoique ce soit.

Rubis de SangOù les histoires vivent. Découvrez maintenant