2 - premier contact

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Point de vue de Liam.

Le lendemain en arrivant au lycée, je cherche les gars du regard. Ce n'est pas bien long étant donné qu'ils se mettent toujours au même endroit : près des grillages à l'entrée du lycée, adossés à un petit muret.

En les rejoignant, je m'aperçois que la fille de ma classe marche juste devant moi. Ses longs cheveux lui arrivent dans le bas du dos, je ne peux empêcher mon regard de descendre et de s'attarder un moment sur ses fesses. Il faut se l'avouer, elle est vraiment bien foutue. Bon, reprends-toi, tu baves là !

Je m'arrête près des gars, au même moment elle se retourne pour regarder dans notre direction. Nos regards se croisent un instant. Je sens ses yeux me transpercer. J'ai l'impression qu'en un instant le temps s'est arrêté. Mon corps est paralysé, ancré au plus profond du bitume. Mais cela ne dure pas, elle détourne vite le regard et accélère le pas. Dix secondes plus tard, elle traverse l'entrée du bâtiment principal et disparaît.

Mon coeur relâche d'un coup sa pression et je peux saluer mes potes qui me surprennent à nouveau le regard perdu dans le vide, me prenant pour un fou.

Ça fait cinq minutes que la sonnerie a annoncé le début des cours, mais avec les gars, on préfère attendre un peu. On a math en première heure. Je déteste vraiment ce cours et je suis loin d'être le seul. Je compte sur l'appel des présences pour connaître le nom de cette fille, mais il est clair qu'arriver en cours à l'heure et surtout le matin ne fait vraiment pas partie de mes habitudes.

D'ailleurs, je n'y suis même jamais le matin. Je rate, ou du moins, nous ratons toujours l'appel des présences. Je trouverais bien une autre façon de découvrir son prénom. Afin de fuir cette heure de supplice, nous séchons les cours pour nous poser en ville.

Nous buvons un verre dans un petit café que je connais bien. Un petit coin tranquille où on peut passer du bon temps.

C'est un café assez sympa, composé d'une grande pièce principale avec ça et là, des canapés ou des tables. Des lumières tamisées sont parsemées aux quatre coins de la pièce, ce qui donne une ambiance absolument géniale. Sans compter sur la musique qui vient ajouter à cela un sentiment de chez soi.

De temps en temps, le café se transforme pour laisser place à un bar karaoke le temps d'une soirée. Les moments passés ici sont mémorables.

J'ai découvert ce café avec ma mère quand elle était toujours parmi nous. J'étais encore petit, je devais avoir 6 ans pas plus, elle travaillait là-bas et je me souviens lui avoir demandé à d'innombrables reprises de me prendre avec elle. Je voulais découvrir son travail. Elle avait donc fini par craquer et m'avait pris le temps d'une soirée.

C'était durant un weekend alors qu'il y avait ce fameux karaoke installé. Beaucoup de monde passait et présentait les musiques qu'ils aimaient tant chanter. Bon, pour être honnête ce n'était pas des merveilles, la plupart chantaient très mal, d'autres parfois chantaient divinement bien. On buvait leurs paroles et en redemandait encore et encore. Pendant ce genre de passage, toute la salle devenait muette afin d'apprécier pleinement la chanson. Les notes de musique planaient au-dessus de nos têtes, nous faisant rêver toujours un peu plus.

Depuis, c'est devenu un rituel. Je viens avec elle une fois par mois. Jusqu'au jour où elle a eu son accident quelques années plus tard. Suite à cela, je continue de venir ici. J'espère même être engagé un jour, en hommage à elle.

Nous nous posons dans un canapé près d'un coin pour être plus tranquilles. Nous commandons quelques bières et discutons de tout et de rien, en passant bien entendu par le sujet qui tourmente mes pensées depuis un bon moment déjà...

— Tu comptes aller lui parler ?

— Bien sûr ! Tu me connais, je ne rate jamais une occasion de parler à une jolie fille, dis-je en glissant un clin d'il.

— Tu n'en rates surtout jamais une pour te faire remballer ! me dit Ash en plein fou-rire. Je lui fais les gros yeux pendant qu'il s'affaisse dans son fauteuil comme s'il voulait disparaître. C'était peut-être un canapé qui nous menait à Narnia, qui sait ?

— Et tu comptes t'y prendre comment ?

— Je pensais à la classique bousculade dans le couloir où nos mains se toucheraient en ramassant les cahiers...

Ils éclatent tous de rire. Je les regarde consterné, ne comprenant pas ce qu'il y a de drôle dans ce que je viens de dire. Devant mon air dubitatif, Ash reprend :

— Tu rigoles, j'espère ? C'est tellement cliché, ça n'arrive que dans les films, je t'assure. Elle va te cramer direct !

Je n'avais pas pensé à ça, mais Ash n'avait pas tort, on a déjà vu plus subtile comme approche. Je verrai bien quand l'occasion se présentera, j'improviserai. Il vaut mieux que cela reste naturel. Même si, je l'avoue, je ne suis vraiment pas doué pour ce genre de choses.

— Et bien, rendez-vous ici dans quelques semaines quand il se sera pris le plus gros râteau de sa vie !

Je regarde Mike avec une envie soudaine de l'étriper et porte mon verre de bière à mes lèvres afin de me calmer.

J'essaie donc ma chance l'après-midi en retournant en cours. Nous sommes en cours d'anglais et comme j'ai un peu de mal avec cette matière, comme avec toutes les autres aussi, je vous l'accorde, je lui demande de m'aider.

— Je peux m'asseoir près de toi ? Je galère en anglais et j'ai cru comprendre que tu te débrouilles bien. Ce serait possible que tu m'aides un peu s'te plaît ? dis-je, la voix tremblante.

Elle m'invite à m'asseoir du regard, ce que je fais sans attendre. Pendant cette heure de cours, elle ne parle pas beaucoup. J'essaie tant bien que mal de lui poser des questions, mais elle ne répond pas ou se contente de petits « mmh » signifiant un oui ou un non dissimulé.

Elle passe son temps à tirer sur ses manches, je me demande pourquoi jusqu'à ce que j'aperçoive un gros bleu ainsi qu'une coupure assez profonde sur son poignet. Comment a-t-elle pu se faire ça ? Je m'apprête à le lui demander, mais à peine un mot sort de ma bouche que le professeur m'interrompt :

— Liam, ce n'est pas vrai, vas-tu donc te taire un jour ?

Monsieur Mashton a l'air désespéré.

— Encore un mot et tu changes de place, compris ?

— Oui monsieur.

Je me tourne vers la fille en lui glissant discrètement mes pensées amères envers le professeur quand il m'interrompt à nouveau :

— Liam !! Tu m'exaspères, crie-t-il en lâchant son cahier sur le bureau avant de lever les mains en l'air, dehors, je ne veux plus te voir pour aujourd'hui.

Je sors en ruminant contre lui. Ce vieux con vient de ruiner mes chances.

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L'emprise du silenceOù les histoires vivent. Découvrez maintenant