8 - filiature

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Point de vue de Lyliana.

Deux semaines se sont écoulées depuis que Liam m'a dit qu'il fera tout pour se faire pardonner. Deux semaines pendant lesquelles il fait maints et maints efforts, passant par de petites attentions telles qu'essayer de m'aider en cours par exemple. Bien qu'il ne soit franchement pas beaucoup plus doué que moi, je dois quand même repasser derrière lui après les exercices.

Il essaie de me faire rire quand il voit que je suis renfermée. Il garde ma place en classe pour que personne ne s'y assoie. Bien que je passe mon temps à lui répéter que ce n'est pas utile, que de toute façon, les autres changent rarement de place. Sauf quand il y a des remplaçants, là ils en profitent pour s'asseoir à côté de leurs amis.

À peine arrivée devant le lycée, je vois déjà Liam avancer vers moi. J'en viens à croire qu'il est vraiment fou à force. C'est vrai, après tout, pourquoi se donnerait-il autant de mal pour quelqu'un qu'il ne connaît pas ? C'est peut-être un tueur en série et je vais être sa prochaine victime. Ou alors c'est un évadé de l'hôpital psychiatrique ?

Il s'avance vers moi presque en courant, quel type louche. Il me fait un peu peur quand même. Une fois qu'il me dépasse, il s'arrête brusquement devant la porte et me l'ouvre de sorte à me laisser passer. Il me regarde avec un grand sourire tout en faisant un mouvement de main pour me montrer la direction afin que je rentre.

Je roule des yeux et ne prends même pas la peine de le remercier.

Je continue d'avancer pour aller vers mon casier afin de prendre mes cours de la matinée. J'entends Liam marcher derrière moi. J'essaie quelque chose, je prends différents couloirs afin de voir s'il est vraiment en train de me suivre. Et oui, effectivement, c'est le cas. Un cas désespéré, moi je vous le dis. Je me dirige donc vers les toilettes pour qu'il me laisse tranquille, là au moins il ne peut pas me suivre.

Je m'appuie sur les lavabos et prends quelques minutes pour observer mon reflet. Je peux observer les entailles qui sont en train de cicatriser. La semaine dernière, il s'énerve parce que j'ai fait un repas qu'il n'aime pas. Il me le jette dessus dans un élan de colère. Mon bras gauche finit brûlé. Le moindre contact avec le tissu de mes vêtements me fait un mal de chien. Mais je n'ai d'autres choix que de garder ces gros pulls qui cachent les traces de ma douleur.

Nous sommes fin octobre, alors mettre plusieurs pulls me convient encore bien. Bientôt je devrais rajouter une veste par-dessus et en général, c'est ça qui me fait le plus mal. Les vestes sont plus serrées. Ça appuie sur mes ouvertures, brûlures ou de simples éraflures quand j'ai de la chance.

Le bleu présent sur ma tempe il y a encore quelques jours commence à jaunir, il devient presque invisible. Je pose ma main dessus dans un réflexe absurde et constate que je n'ai presque plus mal. Les images me reviennent en tête.

Je range ses bouteilles d'alcool afin de pouvoir nettoyer, mais il ne supporte pas l'idée que je pose une main sur ses précieuses fioles de malheur. Il me surprend avec l'une d'entre elles à la main et n'accepte pas cette vision. Il me l'arrache des mains avant de prendre ma tête et la cogner dans l'encadrement de la porte. Le simple fait de repenser à cette scène me fait mal. Par chance, il me laisse tranquille après ça.

Cela fait dix minutes que je suis dans les toilettes. La cloche se fait entendre annonçant le début des cours. Je replace mes cheveux correctement afin de cacher le peu de traces qu'il reste et essuie une petite larme qui vient de faire son apparition. Je sors alors paisiblement pensant qu'il est reparti. J'ouvre la porte et sursaute sur le coup en le voyant adossé contre le mur à proximité de la porte.

— Mais qu'est-ce que tu fais ?! On peut savoir ce que tu fais à me suivre partout ?

— Je veux juste te montrer que je peux être sympa...

— Mais tu... Ohhh et puis zut

On continue de marcher vers notre classe. Il insiste pour porter mes cours. Il ne me laisse vraiment pas le choix, il me les arrache presque des mains pour pouvoir les porter. Arrivée en classe, je lui reprends des mains d'un geste brusque et m'assois à ma place. Je pense en avoir fini avec lui, mais c'est sans compter sur la bonne foi de monsieur qui s'assoit à côté de moi pour, je cite, « me tenir compagnie ».

— Ta place est derrière, près de tes potes.

— Je sais, mais je préfère rester.

— Pourquoi tu fais ça ?

— Les cours sont toujours plus amusants à deux, me dit-il accompagné d'un clin d'il. Je roule des yeux tout en appuyant ma tête sur mon poing afin de la soutenir, regardant de l'autre côté. Il est exaspérant, fatiguant, gênant, horripilant. La journée va être longue...

Il passe la journée à parler, parler et encore parler. Les professeurs sont exaspérés et moi encore plus. Comment peut-il tenir aussi longtemps sans faire de pause dans ses paroles ? Surtout que je ne réponds presque jamais à ce qu'il me dit. Son monologue dure tout le cours. Son palais doit ressembler à un désert à force d'utiliser toute sa salive pour raconter des sottises pareilles. Je n'ai retenu qu'une chose de sa conversation entre lui et les dizaines de mini lui présents dans sa tête, c'est un lieu dont il me parle. Un petit café qui organise des karaokés les weekends. Cet endroit semble être cher à ses yeux. Il a l'air d'en connaître chaque recoin. Il n'est pas loin du lycée, j'irai voir une fois, ça pourrait être un bel endroit.

Enfin ça, c'est si Kyllian me laisse sortir et ce n'est pas gagné. Il dit que c'est dangereux dehors pour une fille comme moi. Il a peur que je tombe sur un garçon avec de mauvaises idées derrière la tête. Il préfère que je reste à la maison. Là où je serais en sécurité."

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L'emprise du silenceOù les histoires vivent. Découvrez maintenant