Point de vue de Lyliana.
Mes yeux s'ouvrent tout doucement mais se referment aussitôt, aveuglés par toute cette lumière. Je réitère cette opération et analyse le décor qui m'entoure : des murs blancs, des draps blancs, des meubles blancs. Des bips assourdissants se font entendre à ma gauche. Je penche mon regard vers mes bras et remarque sans étonnement une perfusion qui m'injecte ce même liquide froid qui pénètre dans mes veines comme à son habitude.
J'ai soudainement mal à la tête et déplace ma main par automatisme sur celle-ci. Ma paume entre en contact avec un bandage. Je remarque également des bleus sur mes avant-bras dus au fait que je les place toujours devant moi pour me protéger. Mon os s'est déjà fissuré pour cette même cause. Par chance cette fois-ci, uniquement des bleus se présentent dessus. Mon regard bifurque vers la fenêtre où je retrouve l'origine de ma douleur.
— Bah ça y est, la belle au bois dormant est levée ! Tu as bien dormi mon amour ? Me chuchota-t-il à l'oreille me glissant un léger baiser.
Son haleine me fouette en plein visage, je dois retenir un haut-le-cur. Il appuie ensuite sur la sonnette pour appeler les infirmières. Il joue le parfait petit ami devant elles. Feintant de s'inquiéter de mon état et demandant ce qu'il peut faire pour m'aider à guérir plus vite.
On devrait peut-être penser à lui décerner un Oscar. Même moi, je crois à son jeu d'acteur. Quand elles se retournent pour partir, je veux les supplier de ne pas me laisser seule avec lui, mais aucun son ne sort. Je suis comme paralysée par la peur. Cette même peur qui me coupe le souffle avant de rentrer chez moi chaque jour.
Il se penche vers moi et me fait un bisou sur le haut du crâne. Malgré moi, ce geste me fait du bien. « De l'amour à la haine, il n'y a qu'un pas ». Et moi, je joue continuellement avec cette limite.
Je le déteste de me faire du mal, mais je l'aime tellement pour ces petits gestes d'attention au quotidien. Je suis sûre qu'il peut encore changer. Je suis sûre qu'il y a un bon fond là-dessous. Comme au début de notre relation. Ce couple parfait dont tout le monde rêve, que tout le monde jalousait.
Il plaque sa main sur ma bouche pour m'empêcher de parler une fois que les infirmières ont le dos tourné. Il a remarqué que mes lèvres bougent, essayant d'appeler au secours. Il s'approche dangereusement de moi et me glisse ces quelques mots : « Tu parles, tu meurs ».
Je frissonne à l'entente de ces mots et ne peux empêcher une larme de s'échapper. Il s'empresse de l'essuyer du bout des doigts. Je ferme doucement les yeux à son contact. Comment peut-on aimer mais frapper sa petite amie à la fois ? Je suis consciente que je dois partir, mais je ne peux pas. Je n'y arrive pas, c'est trop dur. Ma tête me lance à nouveau, ne pouvant plus lutter face à la douleur, je m'endors encore. D'un sommeil réparateur cette fois.
⁂
Je peux sortir de l'hôpital après deux jours. Il est 7 heures, donc je ne risque pas de manquer les cours, nous commençons deux heures plus tard, le professeur est absent. Les médecins veulent me garder un peu pour surveiller mon état qui, par chance, ne s'est pas empiré.
Étant tellement discrète à l'école, je me doute que personne ne s'est rendu compte de mon absence. Je n'aurai donc pas besoin de trouver une excuse absurde. Je m'en sors encore bien. Une bosse sur la tête, tout de même légèrement ouverte, j'ai quand même perdu pas mal de sang.
Des bleus, beaucoup de bleus. Une ouverture au ventre qu'ils ont recousue. Le tibia en compote et qu'est-ce que ça fait mal à cet endroit-là, bon sang ! Il n'est pas cassé, j'ai seulement très mal et par conséquent, j'ai un peu de mal à marcher, ça devrait passer dans quelques jours.
Le médecin m'a quand même fait un mot pour me dispenser des cours de sport malgré mes multiples protestations. J'en suis capable, je peux encore faire du sport, c'est tout ce qui peut encore m'aider à m'évader.
Quand je fais du sport, je suis comme dans ma bulle. Je ne vois que ce que je suis en train de faire. Cherchant à dépasser mes limites à chaque fois. À m'améliorer encore et encore. C'est tout ce qui compte pour moi, et tout ce qui m'aide à ne pas y penser. Je vais courir parfois, ce sont les seules sorties que je m'autorise.
Parfois je vais au terrain de basket au parc près de chez moi. Je reste seule comme à mon habitude, mais j'aime ça. Kyllian ne veut pas que je parle à d'autres gens. Il a peur qu'ils me veuillent du mal. Il veut me protéger et je l'écoute. La solitude m'accompagne depuis un moment déjà. Je m'y suis habituée. Elle finit par m'enlever tous mes souvenirs passés avec mes amis. Avant que je ne parte, avant que je coupe tout contact avec eux pour protéger ma relation avec mon amour de jeunesse.
Nous sommes alors dans la voiture, sur la route pour rentrer chez nous et je me risque à lui poser une question.
— Tu leur a dit quoi cette fois ?
— Que tu étais encore tombée dans les escaliers.
Je regarde mes mains. Une petite peau au bord de mon ongle tente de se faire la male alors je l'aide à s'échapper. Elle à de la chance. Moi, je suis emprisonnée ici.
— Ils vont finir par croire que je suis vraiment maladroite. Dis-je avec un léger sourire. Il faudrait penser à changer d'excuse si tu ne veux pas qu'ils se doutent de quelque chose
Il grogne et mon corps se fige d'un coup.
— Tu crois que tu vas me donner une leçon petite ? Il s'arrêta soudainement sur le bord d'une route où très peu de voitures passaient, Descend.
— Que... quoi ? Je... je suis désolée je ne voulais pas dire ça. Balbutiais-je
— J'ai dit : descend.
J'agonise déjà à l'entendre de son ton froid. Je m'applique alors à faire ce qu'il me demande. Je descends avec précaution de la voiture, craignant le pire. Je tremble. J'ose à peine le regarder... J'ose à peine avancer... Je m'arrête à quelques pas de lui, baissant les yeux comme un enfant que l'on vient de punir. Il m'agrippe à nouveau les cheveux et me jette contre la voiture. Il maintient mon visage contre la vitre du véhicule comme s'il essaye de la faire traverser.
Il me détache du carreau, laissant une trace de mon visage dessus, et me projette au sol. Kyllian me donne des coups de pied dans les côtes, ce qui m'arrache quelques gémissements. Mes plaies fraîchement suturées se rouvrent petit à petit. Je pleure. Je le supplie d'arrêter. Ça ne peut plus continuer. Je n'arrive plus à bouger.
Le moindre mouvement me fait souffrir. Ma vue s'assombrit à nouveau, mes oreilles bourdonnent. Il remonte dans la voiture, je dois faire un effort considérable pour parvenir à me remettre sur pied et m'asseoir dans cet engin également.
La voiture redémarre comme si rien ne s'est passé.
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Vite pour le chapitre ⭐⭐⭐
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L'emprise du silence
RomanceJe reste là, à subir allongée à terre, attendant la fin de cette énième crise de nerfs. Arrêter de résister était la meilleure solution. Je l'ai compris avec le temps. "Tu parles, tu meurs", c'est ce qu'il ne cesse de me répéter. Alors je ne dis ri...