1.17 : Secoué 😳

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CAMERON

Son père nous rejoint. Il porte un costume, tient un parapluie dans sa main droite et a une allure de grand homme. Sous des sourcils foncés, ses yeux bruns me scrutent. Avec une élégance naturelle et raffinée, il vient couvrir Brooklyn de la pluie.

Je dégage en arrière ces mèches qui me tombent systématiquement devant les yeux.

Face à eux, j'ai l'air d'un voyou.

— Tout va bien ? s'assure-t-il auprès d'elle en m'observant du coin de l'œil.

— Oui, papa.

M'apercevant de mon manque d'éducation, je m'essuie maladroitement sur mon jean avant de lui tendre la main. Par miracle, son père me rend la politesse.

— Je suis un camarade de classe de votre fille, m'empressé-je de me présenter.

Il hausse un sourcil.

— On s'est déjà vu quelque part, non ?

Je pourrais lui dire que je suis le fils du gardien de sa maison. C'est à dire l'employé qui coupe les haies, arrache les mauvaises herbes de son jardin, garde son portail et balaie le trottoir juste devant. Et que sa fille me plait énormément. Je soupire. C'est trop glauque.

— Il y a quelques temps, j'étais chez le frère de Charly, l'amie de votre fille. Je vous ai croisé en voiture.

Qu'on soit d'accord, je ne suis pas fier de cette pirouette. Mais bon, je préfère aborder le sujet de ma situation une fois que nous serons seuls, Brooklyn et moi.

Il paraît sceptique et je le comprends... Ses iris bloquent sur le piercing de ma lèvre inférieure. Je la mords pour cacher ce qui pourrait passer pour un acte de rébellion.

Enfin, son attention se recentre sur Brooklyn. Je respire mieux. J'ai eu l'étrange sensation de passer sous l'œil acéré d'un scanner.

— Au vu du temps, j'ai cru bon de venir en avance, l'informe-t-il d'une voix douce.

Celle que l'on utilise pour les enfants.

— Papa, Cameron m'a invitée à passer la soirée de samedi avec lui. Serais-tu d'accord ?

Comme ça ?! Vraiment ?! Je m'étouffe soudain et me mets à tousser dans mon poing pour faire passer ce stupide étranglement. Bordel ! Je ne m'y attendais pas à celle-là ! Des têtes curieuses apparaissent et nous observent depuis l'arrêt de bus, comme s'il fallait que l'on me rappelle que je ne suis pas à l'aise du tout.

Son père nous dévisage à tour de rôle et je n'arrive qu'à ouvrir la bouche pour valider mentalement : Alors oui, j'ai bien invité votre fille à sortir et non, je n'ai pas d'idées tordues derrière la tête. Enfin, je crois...

Quant à Brooklyn, elle a ce regard déterminé qui m'impressionne. Et finalement, j'apprécie qu'elle assume notre rendez-vous. Je me redresse pour paraître plus mature et sûr de moi. Tant pis, autant prendre la température immédiatement.

Son paternel la fixe à présent comme si elle avait prononcé son tout premier mot.

— Samedi soir ?

Décharge d'adrénaline.

— Oui, il me semble. Samedi soir, répète-t-elle.

Un blanc. Quelqu'un attend que je confirme là ?

— Très bien... Mais avant tout, j'aimerais connaître le nom et le prénom de ce garçon.

Je blêmis. Mon visage passe encore, mais mon nom de famille, il va le reconnaître immédiatement. Je pourrais mentir, seulement ce n'est pas mon style. Si je dissimule à son père mon identité, c'est comme si je me montrais faux envers Brooklyn et ça, c'est hors de question.

Alors je réponds simplement :

— Cameron Huston.

M. Becker ouvre grand les yeux.

Ça ne fait aucun doute, ses soupçons sont confirmés. Je tremble intérieurement. Je crains qu'il lui révèle qui je suis sans préambule. Au lieu de ça, il me sonde une minute avant d'opiner du chef.

— Très bien. J'en parlerai à ta mère. Je te fais confiance, jeune homme. Et sache que c'est une chose que je n'accorde pas facilement quand il s'agit de ma fille.

Je n'en doute pas une seconde.

Il caresse la joue de Brooklyn, lui sourit tendrement, puis lui laisse le parapluie.

— Je t'attends dans la voiture.

Après m'avoir adressé un dernier regard, il quitte le trottoir à découvert, mais ne court pas sous la pluie. Son père a vraiment la classe.

Brooklyn et moi nous retrouvons seuls. Je suis un peu sonné, mais je la contemple et recouvre mes esprits.

Ses yeux sont dans le vague, comme tournés vers un monde impénétrable. Ses lèvres sont encore plus rouges que sur la plage, le bout de son nez aussi. Quand mon regard capte enfin le sien, je n'ai plus envie de le quitter.

Elle rougit encore et je me rends compte que j'adore produire cet effet-là sur elle. Finalement, je me fous de qui je suis. Et je crois qu'elle aussi y prêtera peu d'importance. Alors, autant le lui avouer dès maintenant :

— Brooklyn, je...

— Cameron, je... Pardon ! ajoute-t-elle, mortifiée.

— Je t'en prie. Commence, l'invité-je à continuer.

— Tu sais, c'est la première fois qu'un garçon m'invite à sortir...

Coup au corps, coup au cœur.

— ... alors je ne sais pas trop ce que ça implique. Ni comment m'y prendre.

Je crois que jamais aucune fille ne m'a fait vivre des montagnes russes comme elle.

— Tu n'as rien à faire, la rassuré-je. Je m'occupe de tout. L'important est que tu passes un bon moment. Si ce n'est pas le cas, tu n'as juste qu'à me le dire.

Bon, il faut encore que je trouve ce qui va justement nous occuper...

Ses prunelles turquoise se mettent à briller, c'est le plus important, non ?

— Je suis heureuse que ma première fois soit avec toi.

Qu... quoi ?! Rupture d'anévrisme. Mes abdominaux se contractent pendant que de la chair de poule parcourt chaque centimètre carré de ma peau.

Stop down ! Qu'est-ce qui se passe là ? De quoi était-il question ?

Le rendez-vous, Cameron ! Elle parle de son premier rendez-vous avec un mec ! À quoi tu penses, imbécile ?

Mais pourquoi elle me fait ça ? Je ne suis pas prêt..., ni fait de marbre, bon sang !

— Je dois y aller, m'informe-t-elle, me laissant dans un désarroi aussi physique que mental.

Car oui, statufié, je n'arrive plus à bouger un orteil. Je la regarde s'éloigner. Un truc est sûr, cette fille me tuera.

Under Your Appearance - S. 1 :  How a good boy becomes badOù les histoires vivent. Découvrez maintenant