Under Your Appearance - S. 1 : How a good boy becomes bad

1.7 - Un coin pas fait pour nous 🌲

Pourquoi j'ai fait ça ? Pourquoi j'ai fait ça ?!

J'ai parfaitement conscience que c'est inutile et contre-productif de me répéter en boucle cette phrase, mais j'ai besoin de temps pour réfléchir.

Je crois que je voulais éclaircir les choses sans tous ces spectateurs à l'affut d'informations croustillantes. Il semblerait qu'à mes dépens, je leur ai fourni exactement ce qu'ils voulaient... Quand un couple vient ici, c'est pour s'embrasser, il n'y a pas d'autres interprétations.

Merde !

Brooklyn, quant à elle, me regarde, espérant une réponse que, de toute évidence, je ne lui apporterai pas.

Je me refais mentalement les cinq dernières minutes et bordel, qu'est-ce qui m'est passé par la tête !?

— Cameron ?

Je me mords la lèvre et ose à peine la regarder. Sa voix est toujours douce, en toute circonstance. C'est une fille courageuse et moi, je déconne avec elle.

— Oui... ?

Je dois avoir l'air paumé. Elle me déstabilise.

— Si tu n'as rien à me dire. Je vais te laisser.

Elle pivote d'un quart de tour.

— Non ! ... Attends.

Je suis incertain d'un tas de choses, mais ce dont je suis sûr, c'est qu'à aucun moment je ne la laisserai affronter les autres élèves qui ne manqueront pas de faire des commentaires. Je refuse qu'elle les supporte seule et s'expose aux critiques une fois de plus à cause de moi. Alors, que puis-je faire pour rectifier le tir ?

— En fait, il y a un souci... tu vois ? commencé-je, gêné.

Elle secoue la tête de gauche à droite. N'importe quelle fille comprendrait la situation, mais j'ai l'impression que c'est plus difficile pour elle. Comment lui dire cela...

— Les gens vont croire que l'on sort ensemble.

Ses yeux s'ouvrent de surprise.

— Comment ?! Qu'est-ce que ça veut dire ?

Ce n'est pas vrai ! Elle ne peut pas ne pas comprendre ce que ça signifie ?! Peut-elle être si naïve ? Je vais devoir lui expliquer ?! Oh non, je ne peux pas faire ça ! Je panique, là ! Par quoi commencer ?! Et bon sang, plus on reste ici, plus les ragots s'alimentent.

— Je... je veux dire, pourquoi croiraient-ils cela ? reformule-t-elle.

Vu les mots merdiques qui me venaient en tête, j'expire de soulagement. Je l'ai échappé belle...

Elle me fixe et j'accroche son regard pour la première fois. Mon cœur bondit dans ma poitrine.

Pourquoi ? Elle veut savoir pourquoi ! Parce que je l'ai prise par la main et entrainée à l'abri des regards. Parce que depuis trois ans que je suis dans cet établissement, je n'ai jamais eu de contact aussi intime avec une fille.

Elle m'ausculte plus attentivement et je sens toute mon assurance me quitter. Parle Cam !

— Eh bien, ce lieu n'est pas le bon endroit pour emmener une simple amie.

Elle me dévisage. Je crois qu'elle a compris.

— Tu peux juste démentir... Personne ne peut croire que l'on est ensemble de toute façon. J'imagine mal les gens penser que ce soit même possible.

Il est clair que ça ne me fait pas vraiment plaisir qu'elle pense que ce serait impensable, voire inimaginable. Mes yeux tombent sur les racines qui se délient du sol à droite de ses chaussures neuves et bien cirées.

Impossible... Brooklyn a raison. Elle l'a sans doute réalisé plus vite que moi. Je réponds tout bas :

— Je suis sérieux. C'est ce qu'ils penseront.

Je reste immobile, comme si une blessure s'était ouverte et qu'il valait mieux ne plus bouger afin d'éviter qu'elle ne s'élargisse un peu plus. Je n'ose relever les yeux sur son visage, car je n'arrive pas à chasser l'amertume qui me gagne. Ça ne me ressemble pas d'agir comme un gamin, mais c'est comme si elle avait touché un point sensible.

— Que veux-tu faire alors ? Tu veux que je leur dise qu'ils se trompent ? me demande-t-elle.

— Je me fous du jugement des autres. C'est à toi que je pense, fais-je, dissimulant mes contrariétés.

— Qu'importe ce que l'on pense de moi.

Je relève les yeux. Les siens brillent. J'ai envie de me frapper. Pourquoi lui ai-je fait ça !?

— Je...

Elle tend sa paume devant moi pour m'interrompre.

— Attends, avant... avant que tu dises ou fasses encore des choses que tu ne veux pas...

Elle baisse sa main en même temps que les yeux. Brooklyn observe une pause et je suis suspendu à ses lèvres.

— J'ai des difficultés à m'exprimer, mais je veux que tu saches que jamais je n'envisagerai d'être aussi proche de toi. Je garderai mes distances dorénavant. Pardonne-moi de t'avoir obligé à te mettre dans une position compromettante.

Elle tourne doucement les talons et je suis si stupéfait que je n'arrive pas à parler pour la retenir. Je la regarde sortir de mon champ de vision sans pouvoir bouger.

Seuls mes doigts se mettent à trembler.

Elle quitte le bosquet. Il faut que je la rattrape, mais tout ce qu'elle vient de dire se mélange dans ma tête et me cloue sur place. Ma respiration est courte. J'ai supporté des heures d'entraînement pourtant, je n'ai jamais eu l'impression d'être à ce point vidé.