— Une plus petite voiture ?
— Oui. Je préfère. S'il vous plaît.
J'aimerais me rendre à l'école dans un véhicule plus discret. Alors j'essaie de faire entendre à ma mère qu'au lieu de notre limousine, un véhicule « normal » serait plus approprié.
— On va voir ce que l'on peut faire, mais nous tenons à ce que Josh t'emmène et te récupère tous les jours.
Je suis surprise qu'elle ait capitulé si vite. D'habitude, elle aime décider, contrôler jusqu'à la couleur de mes chaussettes. Je savoure cette petite victoire sur la vie et espère que cela m'aidera à me faire accepter à l'école. Si je me comporte comme les autres élèves en ne me faisant pas plus remarquer, peut-être s'habitueront-ils à ma présence.
Mon père, qui nous a rejoint dans le bureau de ma mère, me sourit avec tendresse. C'est un homme très effacé. Il faut dire que le caractère de ma mère n'est pas des plus faciles. Il écrase pratiquement tous ceux qu'il rencontre.
Je récupère mon sac d'école et m'apprête à monter les escaliers.
— Attends, tu ne nous as pas donné de détails sur ta rentrée. Comment s'est-elle passée ?
— C'était spécial.
Ma mère me fixe. Je n'ai pas envie qu'elle se fasse du souci mais je ne peux mentir.
— Les personnes de ma classe me font un peu... peur.
En disant cela, je me rends compte que c'est absolument vrai. Ils me terrifient. J'ai conscience de la discrimination ambiante. L'infantilisation ou la sévérité des professeurs. Le contact. Les regards. Les réactions trop vives, sous le coup de l'émotion, des élèves. J'ai l'impression que ce sont des tempêtes. Et moi, une feuille fragile risquant d'être soulevée et balayée par le vent.
La profonde tristesse que je vois naître dans les yeux de ma mère me force à réagir :
— Mais je dois y retourner.
Je dois combattre mon malaise. Pour mes parents, ma tante...
— Ne te force pas, mon ange.
— Hum.
Je quitte son bureau et monte à l'étage. Dans ma chambre, je peux vraiment souffler. Je me déshabille lentement, puis place mon uniforme dans le panier à linge sale avant de me faire couler un bain.
Je repense à cette rentrée catastrophique, à la pression que je me suis mise. Si je continue sur ce chemin, je risque de très mal vivre ces prochains mois.
Des tempêtes... Alors que j'ai un comportement très calme et réfléchi, car souvent prise dans des pensées profondes, eux réagissent au quart de tour et je ne sais pas si je suis assez forte pour que leurs réactions ne m'atteignent pas.
Pour le moment, mis à part une réaction excessive de mon corps, je tiens le coup.
Après le bain, je me sèche les cheveux. J'enfile un pyjama et m'assois devant le piano.
Je caresse les touches, puis ferme les yeux et me laisse aller dans un univers beaucoup moins mouvementé.
∞
Ce matin, je récupère dans mon armoire un pantalon bleu nuit d'uniforme, enfile ma chemise, puis un sur-pull portant l'écusson de l'école. J'attache mes cheveux en queue de cheval avant de souffler un bon coup. Deux cent six jours... c'est le temps exact qu'il me reste avant la fin des cours et la délivrance.
Je sors de ma chambre et, discrètement, pénètre dans la salle de bains de mes parents. J'ouvre un tiroir et cherche un déodorant. Je n'en avais jamais eu l'utilité jusqu'à présent.
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Under Your Appearance - S. 1 : How a good boy becomes bad
RomanceDisponible en version complète sur Amazon Mannequin depuis le berceau, Brooklyn n'a que six ans lorsqu'elle est élue la "plus jolie petite fille du monde". Sous son apparence parfaite et l'indifférence du monde adulte, son trouble autistique est fac...