Mordred et l'épreuve du feu

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Jeudi 29 octobre

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Jeudi 29 octobre

En vérité, je n'ai pas trop le temps de me pencher sur le défi cette semaine parce que mon colloque surprise de dernière minute arrive à grand pas et que je suis extrêmement angoissé et pris dans mes questionnements sur le pourquoi du comment je veux retourner dans ce bain de vapeurs toxiques ! Je pensais avoir lâché l'affaire. Je suis très heureux dans mon métier, tout se passe bien ! Qu'est-ce que j'ai encore à me prouver ?

– Tu voudrais avoir une vraie fin pour cette histoire, non ? suggère Lise alors que je passe pour travailler chez elle et me sortir de ma solitude.

– Oui, je pense que c'est ça, renchérit Hanna, que ton travail n'ait pas servi à rien. Je pense que tu as raison de faire ça. Ce sera peut-être publié et tu auras fait connaître tes réflexions à d'autres. C'est pas le but de vos colloques machin ?

Je ne m'étais jamais représenté les choses comme ça. De mon point de vue et de celui de mes parents et professeurs, les colloques sont surtout une source de réseautage pour les académiciens. C'est là qu'on rencontre des collaborateurs et qu'on fait les beaux sur son sujet d'étude. La façon dont Hanna le perçoit est si pure que j'essaie tant bien que mal de m'y accrocher. Une part de moi se demande si ma famille sera là. Ou monsieur Autran. Quand j'y pense, je suis saisi d'une angoisse et d'une hargne monstrueuse. Comme si l'enjeu de cette communication était de leur prouver à tous à quel point je suis intelligent et novateur et toujours actif et génial et incroyable et est-ce que je veux vraiment ça ? Oui... mais ça me bloque. Rien n'était jamais assez bon pour mes parents. Du jour au lendemain, j'étais un génie potentiel qui se laisse aller ou un indécrottable raté au gré de leurs humeurs et j'avais toujours l'impression de vaciller sur une corde raide au-dessus du vide.

Et pour Autran... est-ce qu'il comprendrait ce que je veux lui dire ? Qu'il ne m'atteint pas, que j'ai survécu à son regard qui ne me percevait que comme une pupille à modeler selon ses fantasmes dégueulasses ! Que je suis qui je veux !

Je me dis qu'il serait capable de s'attribuer ma transition. Qu'il en ferait son exploit poétique personnel. "J'ai fait de cette jeune fille douée mais timide un homme !" Cette pensée me donne envie de vomir. Ou peut-être qu'il serait dégoûté et se demanderait ce qui ne va pas chez lui ou chez moi. L'un comme l'autre sont affreux.

Je repense à nos longues discussions. A la façon qu'il avait de ne jamais s'arrêter de parler même quand je lui signalais que je devais partir. J'ai raté des soirées avec Hanna à cause de ses états d'âme. Je m'en veux d'avoir raté des soirées avec Hanna à cause de ses états d'âmes ! Comment a-t-il réussi à prendre autant de place dans ma vie sans y être invité ? Qu'est-ce qui lui a permis !

Et je me rappelle de sa femme, la poétesse, l'intellectuelle brillante qui crevait de jalousie et s'est défoulée sur une gamine qui n'avait rien demandé au lieu d'attaquer son mari. Qui m'a traitée de pute, de salope, de traînée, de tous les noms et pire. Au point qu'une part de mon cerveau, persistante et insidieuse, est toujours persuadée que j'ai mérité ce qui m'est arrivé.

Galaad et Mordred, coachs en relationOù les histoires vivent. Découvrez maintenant