Mordred et sa zone de confort

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Vendredi 25 septembre

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Vendredi 25 septembre

– Pourquoi vous n’avez que les vingt premiers tomes de Détective Conan ?

Je lève les yeux de derrière le trop grand écran de mon bureau et je croise le regard d’un jeune garçon de seconde qui doit faire trois têtes de moins que moi :

– Tu devrais bénir le ciel qu’on en possède autant. Et sache que je lutte pour qu’on les conserve. A chaque tri, mes collègues veulent les bazarder, je réponds.

– Où est-ce que je peux trouver la suite moi ?

J’hésite à lui conseiller d’utiliser un des ordinateurs du CDI pour aller lire des scans sur des sites douteux mais nos antivirus et pare-feu ne sont clairement pas au niveau.

– Tu peux tenter ta chance en médiathèque.

Il me répond par une grimace peu convaincue et repart sans me remercier. Je m’étonne quand même qu’il soit si intéressé par Détective Conan mais ça prouvera au moins à ma supérieure Simone que, oui, les vieux mangas éveillent aussi l’intérêt de jeunes lecteurs. Et qui sait, je pourrais peut-être lui glisser d’acheter la suite. Et si ce n’est Détective Conan, de finir d’acheter les Death Note au moins.
C’est une heure creuse et je procrastine à ranger les derniers retours. Je sais que j’ai encore du temps avant la pause déjeuner durant laquelle tous les petits nerds se ruent entre les rayonnages pour discuter à voix-basse. Le CDI, c’est le rendez-vous des planqués, et c’est donc tout naturellement qu’après y avoir passé les premiers cycles de ma scolarité, j’y sois retourné après avoir lamentablement échoué dans mes plus nobles ambitions. J’essaie de ne pas me sentir pitoyable. Le concours que j’ai passé pour consacrer ma vie aux livres est tout de même sélectif et ce n’est pas exactement accessible à tout le monde. Du coup, quand je fais ma drama queen sur mon futur raté après un ou deux verres chez mes amies Lise et Hanna, elles me rabrouent : « tu as un bon taf et tu travailles dans un domaine qui te passionne ! De quoi tu te plains ? » Alors je ravale ma fierté déplacée et j’essaie de ne pas me sentir trop pathétique.
Même si c’est un peu ma spécialité.

- Il faut que tu te reprennes, m’a dit Lise quand je suis passé hier. Tu dévoues littéralement l’essentiel de ta vie à te descendre plus bas que terre et, quand ce n’est pas toi, tu trouves un autre sujet de plainte !

J’ai contemplé mon verre un instant. Un grand verre publicitaire de Quick ou McDo avec une réplique et la tête d’Homer Simpson. Il était rempli de sangria. Je n’ai pas mis longtemps à trouver quoi répliquer pour donner réponse à Lise :

– Arrêter de me plaindre ? Allons, tu ne vas pas me priver de la seule chose à laquelle je suis bon ?

Elle a mis les mains sur les hanches et s’est apprêtée à répliquer mais Hanna l’a stoppée d’un baiser sur la joue qui l’a prise par surprise. Pour ma part, j’ai eu droit à un lancer de torchon.

Galaad et Mordred, coachs en relationOù les histoires vivent. Découvrez maintenant