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Mourir à la place d'un être cher lui semble être une fin enviable. Sauver une vie plus pure, un cœur meilleur aurait été un honneur qu'elle n'aurait jamais décliné. Édith aurait préféré mourir pour un autre plutôt que de survivre pour elle-même. Nous en avions décidé autrement et aujourd'hui, le jeu devait prendre fin. Édith devait mourir.
Si jusqu'à présent l'enfant pensait avoir été sauvée par Dieu, sa marche funéraire l'interroge. Survivre n'avait pas été un cadeau mais une punition. Ce n'était pas Dieu qui l'avait aidée, c'était le Diable qui l'avait trouvée. C'est bien ce serpent qui la torture alors qu'elle marche droit vers lui. C'est lui qui, alors qu'elle devrait éprouver des remords, lui murmure à l'oreille qu'elle pourrait recommencer. Si elle le devait, la fille recommencerait à tuer. Une vie pour une vie.
Nous étions venue la chercher à l'aube. Cette fois, les hommes avaient toqué et elle les avait laissé entrer. Ils n'eurent pas le besoin de lui apprendre la raison de leur venue, la pointe dans sa poitrine lui avait déjà tout indiqué. C'était lui. En enfilant sa robe, la fille prit la peine de coincer entre ses bas la lame qui lui avait été rendue. Si l'envie lui prenait, elle pourrait toujours tenter d'en prendre une de plus. Une vie pour une vie. S'ils voulaient lui ôter la sienne, qu'ils se préparent à ce qu'elle en fasse de même.
Contre toute attente, aucun mal ne lui avait été fait sur le chemin. Elle s'attendait à être agrippée et bousculée, comme elle l'avait été à son arrivée. Étonnamment, nous ne l'avions pas touchée. Édith avait rejoint le Skali intacte dans sa robe d'un blanc virginal. Nous lui avions porté sa tenue dans la soirée. Posée bien en évidence sur leur petite table à l'entrée, l'Étrangère avait rapidement deviné le rôle qui lui était réservée.
Si le soleil vient à peine de se lever, une cohue bien singulière occupe déjà les lieux. Ils l'attendaient. S'avançant encore plus profondément dans la gueule du loup, Édith peut compter sur les hommes qui l'ont accompagnée pour lui dégager le chemin. Quelques protestations s'élèvent lorsque ses gardiens se montrent moins patients. Ils bousculent, insultent et intimident tout ceux qui se tiennent sur leur passage. Il l'attend.
Ragnar trône entre sa femme et ses fils. Au centre, l'homme joue avec l'un de ces petits couteaux que nous pouvons retrouver disposer sur les tables. Il esquisse à peine un rictus lorsqu'il les voit s'approcher. Autour de lui, les visages qui l'observe se distinguent tant par leurs expressions que par leurs traits. Parmi eux, la fille reconnaît les deux premiers tandis que deux autres lui demeurent étrangers. Tous assis, certains tiennent son regard plus longtemps que les autres. Un en particulier ne détourne par le sien lorsqu'elle le détaille longuement.
Son torse semble plus développé que celui des autres. Ses cheveux sont plus courts, ses traits plus durs. Il n'a ni tresses ni fourrures. À peine une bande de cuir au niveau des jambes lui permet un tant soit peu de sortir du lot. Un autre a des cheveux blonds qui sont tressées avec élégance. À son approche, il s'avance sur son siège. De toute évidence il souhaite la voir de plus près.
