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Les festivités étaient bien plus agitées que ce qu'elle n'avait pu imaginer. Arpentant les tables de part en part, Margrethe n'a de cesse de remplir les verres et d'éviter les mains qui les tiennent. En bref, l'attente se fait longue et la fatigue, grandissante ; les regards d'Ubbe ne faisant rien pour l'aider à prendre son mal en patience. Allait-il enfin se déclarer ?
La réserve avec laquelle il lui avait demandé de le rejoindre laissait supposer qu'ils devaient s'entretenir de quelque chose d'important ; ce soir est peut-être le dernier. Retenue par les derniers ivrognes récalcitrants, Margrethe termine de débarrasser grossièrement les tables et les buffets. Le grand nettoyage n'ayant lieu que le lendemain, l'Esclave termine son service peu de temps avant que le soleil ne se lève.
Sur le chemin du retour, les souvenirs s'engouffrent en elle avec une ardeur qu'elle n'essaye pas d'étouffer. Elle dépasse l'étable dans laquelle ils s'étaient aimés pour la première fois ; où après s'être étreints, il lui avait demandé son nom. Ses pas s'accélèrent alors qu'elle sert fermement son châle pour se protéger du froid. Elle entend le remous des vagues échouées sur la plage où ils s'étaient retrouvés tant de fois. Tant de souvenirs chéris qui la conduisent sereinement dans le ventre de la nuit.
Retrouver le confort du chez soi a du bon, songe-t-elle en se délestant du tissu désormais superflus. Ubbe est là, la réchauffant de la chaleur de ses bras. La tête posée sur son torse, elle se laisse caresser les cheveux tandis que le crépitement du feu lui chatouille les oreilles. Même s'il est silencieux, Margrethe sait que cela ne va pas durer : Ubbe fait partie de ceux qui aiment parler, après. Tandis que ses frères ont tendance à repartir ou à s'endormir, Ubbe aime entendre sa voix, la faire rire avant de lui demander parfois son avis sur les sujets qui le contrarient.
Margrethe aime à croire que Ubbe est quelqu'un de bien, que malgré la perversion que les hommes de son espèce font l'objet, il reste juste. Son statut d'aîné - Björn n'étant pas une solution qui pouvait être imaginée - lui conférait d'autant plus de chances de devenir Jarl au décès de Ragnar ; ce qui n'était pas pour lui déplaire. Ubbe a du potentiel donc, et Margrethe est loin de vouloir y renoncer.
— J'ai quelque chose à te demander. Ses mèches blondes sont légèrement ondulées. Il effleure leurs courbes et les laisse goutter entre ses doigts. En grains de sable, ses filets d'or lui échappe lorsqu'elle pose son menton sur le dos de sa main.
— Je t'écoute. Margrethe tente de se glisser vers ses lèvres alors qu'il la repousse avec douceur, presque à contre-coeur. Peut-être voulait-il simplement se redresser ? Après tout, c'est ce qu'il fait : pourquoi voir le mal partout ?
