Chapitre 1 : La fille du train (2/2)

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-Tu es la fille du train ?

Il avait posé cette question, plus pour en être certain que pour avoir une vraie réponse. Elle ne le regarda pas, fronça les sourcils, gênée de son intrusion, et également surprise. Elle ne comprenait pas de quoi il parlait.

-Je te demande pardon ?
-C'est toi. La fille qui était dans notre compartiment dans le train, au retour de Paris, et à qui j'ai failli prendre la guitare par erreur. C'est dingue ça ! Qui aurait cru qu'on pourrait se revoir ?

Il était beaucoup trop bien dans sa tête pour déceler que Mary était déjà agacée par son comportement. Déjà blasée par ses paroles, elle finit par se tourner vers lui pour l'observer. Il avait raison,c'était bien lui, le garçon qui voulait lui prendre sa guitare, alors elle approuva d'un signe de tête. Sans parler. Elle l'observa un moment.

Il était musclé, plus grand qu'elle et vraiment beau. Ses cheveux châtains étaient coupés courts, pas trop, juste ce qu'il fallait pour pouvoir passer une main dedans. Ses yeux étaient d'un vert transperçant bien que la faible lumière du jardin ne les mettaient certainement pas en valeur. Ils ressemblaient comme deux gouttes d'eaux aux yeux de Mary, et donc, aux yeux de son père. Mais leurs regards étaient différents, lui possédait une douceur et une patience incroyable. Son regard à elle ne reflétait que tristesse et fatigue. Après quelques secondes elle redirigea son regard sur la piscine. Elle avait envie de calme et de silence, mais elle le savait, il était décidé à la faire parler.

-Je m'appelle Julian.
-Mary.

Elle était polie, pas sympathique pour autant.

-Ah,c'est toi la cousine à Mina. Je suis le frère à Nicolas, tu sais son copain.
-Oui je sais.

Elle faillit rajouter qu'elle avait passé une petite partie de son après-midi à écouter Mina parler de son fameux Nicolas, et qu'il l'agaçait déjà mais elle se retint. Il continuerait à parler de toute manière.

-Et oui, je suis la cousine à Mina.
-J'ai toujours rêvé d'aller à Paris, c'est comment, raconte-moi ?
-Julian. Si tu étais dans le train de toute évidence, ça veut dire que tu étais à Paris.
-Oui, mais je n'ai pas pu visiter. Alors, comment c'est ?
-Je n'ai pas envie de te raconter.
-S'il te plait.
-C'est terne et pollué.

Elle faisait son possible pour le désespérer, mais elle pressentait que ça ne servirait à rien, il avait l'air têtu. Beaucoup trop têtu.

-Ah...Tu es en première, comme eux ?
-Non, je suis en prépa. Enfin... J'étais.
-Mais t'as quel âge ? Tu parais jeune.
-J'ai 17 ans, 18 en décembre, j'ai un an d'avance. Content ?
-Content de quoi ?

Elle soupira lourdement...

-Tu cherches à me connaître, alors voilà.
-J'essaie d'être gentil.
-Ce n'est pas la peine. Ce monde ne vaut pas la peine d'être gentil. Il faut juste être réaliste.
-C'est très pessimiste comme point du vue.
-On ne trouve que de la déception, dans la réalité. Il faut s'y faire.
-Je ne suis pas d'accord.
-C'est ton avis

Là elle commençait à la décourager. Il était un peu à court d'idée pour avoir une conversation normale. Elle était vraiment très fermée, froide et distante. En général il avait le contact facile, mais ce n'était pas le cas avec elle. Elle l'avait à peine regarder et quand elle lui parlait. Elle avait tout simplement l'air de s'ennuyer, mais non il ne voulait pas baisser les bras. Quelque chose lui plaisait chez elle... Après avoir détourné son regard, pour réfléchir longuement, en silence, il se décida à la fixer à nouveau. Comme s'il essayait de lire en elle, il n'y arrivait pas...

-A quoi tu penses ?
-Ça ne te regarde pas.
-Si je te saoule dis-le tout de suite.
-Tu me saoules.

Sans aucune émotion. Sans aucun intéressement ou même désintéressement. Elle ne pouvait pas être plus claire, elle ne voulait pas parler. Elle voulait du silence et de toute évidence il ne le comprenait pas, puisqu'il continuait, encore, à parler.

Les Vignes de la TendresseOù les histoires vivent. Découvrez maintenant