Chapitre 2 : Le lendemain soir

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Encore fatigué des jours qui ont précédé je me sens lourd, et à bout de force. Tellement fatigué que me déplacer deviens une épreuve. Alors je suis très longuement resté assis sur le fauteuil de ma chambre, face au bureau à regarder par la fenêtre. Je regardais les nuages et les voyaient se déplacer parfois vite, parfois plus lentement. Je regardais ces nuages qui semblaient tous être à leur place, je ne les aurais vu autrement. Le ciel parait simple, construit, différent de la vie remplie de complexités. La journée se fait longue, je crois que je vais le remarquer chaque jours enfermé ici.

J'eu un regain d'énergie, enfin plutôt de curiosité. Je décidais alors d'aller faire un tour dans le service, dans lequel j'allais résider sans mon consentement, pendant, je l'espérais, que très peu de temps. Ce service en question est un service fermé, c'est-à-dire que les contacts avec l'extérieur ne sont pas possibles pour la plupart des gens ici. Seulement une attestation de notre psychiatre peut nous autoriser à passer un appel à un proche. Les téléphones et autre moyens de communication avec l'extérieur sont interdits. Pour les permissions, il faut être dans un autre service pour avoir le droit de sortir quelques heures, donc pas de permissions en vue pour l'instant. En même temps je viens juste d'arriver, cela serait trop facile que je puisse sortir. Il y a des heures fixes pour chaque chose à faire, j'en ai fait les frais ce matin quand le soleil n'était pas encore levé et que je devais déjà aller faire ma toilette avant d'aller devant le bureau des soignants, faire la queue pour mon traitement. J'ai vite fait le tour de ce service, sept chambres, je ne sais pas si elles sont toutes occupées, leur portes sont fermées et je n'entends pas de bruits dans ce couloir. Il y a aussi une salle de couleur rouge, avec deux jeux de société et quelques livres disposés devant de grandes fenêtres et une plus petite salle, sombre, qui abrite une télévision sans télécommande et quatre sièges vert pomme. Le tour du service aura été très rapide, et ne m'aura pas beaucoup occupé.

Alors que j'allais regagner ma chambre, je vis un jeune homme d'une vingtaine d'années se trouvant assis par terre, sans chaussures, au fond du couloir. Il donnait spontanément au premier coup d'œil la conviction qu'il était un type incroyable, un type d'homme remarquable, rare et puisement doué. Son visage était plein d'esprit, l'extrême mobilité de ses traits attestait une vie infiniment dure et sensible. Cet homme avait déjà marqué mon esprit. Il me jette un bref regard, un regard terrible que l'on ne peut oublier, dont le sens pourrait suffire à emplir un livre. Il me demande ce que j'ai fait pour atterrir ici, je lui répondis simplement et lui retourna la question. Il ne semblait pas choqué de la raison qui a fait que je sois enfermé ici, ce qui m'a plu. Il me proposa une cigarette, je ne puis dire non, la dernière fois que j'ai fumé c'était un joint, couché dans mon lit attendant la fin, il y a trois jours déjà. Nous sortîmes par une porte vitrée dont j'avais ignoré l'existence. Elle donnait sur un petit patio, soit 20m2 au milieu du bâtiment. Il y avait des planches de bois au sol et cette petite coure était entouré par les murs en bois du bâtiment. Pas de terre, pas de verdure, rien qui ne puisse me rappeler les grands espaces verts qui avaient l'habitude de m'entourer. Un fois à l'extérieur je me rendis compte que l'on pouvait voir le bureau des soignants qui avait de grandes baies vitrées. Le jeune homme s'approcha du bureau et tapa au carreau. Un soignant qui remplissait de la paperasse ouvrit rapidement la fenêtre et lui lâcha un simple :

- Ca fait déjà une heure, en vérifiant l'heure sur l'horloge, Tiens.

Le jeune homme lui demanda s'il pouvait m'offrir une cigarette, étant donné que je n'en avais pas. L'homme aux cheveux grisonnant me regarda en silence puis hocha de la tête pour dire oui, il griffonna quelque chose sur un petit papier. Après avoir roulé nos cigarettes, le soignant les alluma avec un allume gaz et referma la fenêtre. Ça faisait du bien de fumer, du bien d'être dehors même si j'avais un petit peu froid en blouse d'hôpital et en short. J'avais aux pieds les chaussons qu'ils donnent aux patients dans les hôpitaux, j'avais l'impression d'être pieds nus, là dehors sur ces planches de bois.

Pendant que nous fumions une grande sympathie sefondit envers lui qui souffrait longuement,  intimement et dont je pouvais percevoir le trouble intérieur. Il était photographe et aimait arpenter différentes horizons à la recherche de nouveaux paysages, de nouvelles civilisations à capturer dans son objectif. Il me parla des voyages qu'il avait eu l'occasion de faire, me raconta des anecdotes qui en disaient beaucoup sur lui et l'homme qu'il était. Il m'exprima également le fait d'avoir l'impression de vivre une vie de suicidaire, une vie pleine de risques, il lui fallait toujours plus d'adrénaline, toujours plus de hauteur et de vide. Il aimait arpenter les montagnes à la recherche de nouvelles horizons. Il me conta un nombre incalculable de situations dans lesquels il mettait sa vie en danger. Et ça lui plaisait, ça le passionnait même.

La soirée est passée, comme toutes les soirées passent je l'avais doucement assassinée avec celui qui a vécu des jours infernales de mort dans l'âme, de désespoir et de vide intérieur.

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