Cet après-midi je me suis entretenu au téléphone avec le juge des Libertés et de la Détention de Clermont-Ferrand à propos de mon placement dans ce service. Il ne m'a rien dit de bien étonnant, il allait rendre une décision favorable à mon internement, ce qui allait prolonger mon séjour en psychiatrie. Je ne savais pas ce que je devais en penser. Il est vrai que je ne pensais pas être capable de m'occuper de moi-même seul de nouveau. Je pensais plutôt que si je sortais immédiatement j'allais continuer de me laisser mourir. Pourtant je me sentais déjà mieux qu'avant, et mes soirées étaient plus calme, le psychiatre avait réussi à me trouver un traitement plutôt adapté. Les voix qui avant prenaient toute la place sont moindre maintenant. Et cette sensation de perpétuelle persécution était moins vive mais toujours présente. Le psychiatre voulait venir me voir aujourd'hui d'après les infirmières, je me demandais pourquoi voulait-il venir me voir ce soir alors que les rendez-vous se déroulent les matins habituellement.
En ce qui me concerne je suis plongé dans un livre de Françoise Giroud « Une femme honorable Marie Curie : une vie », qui fait comme son nom l'indique le récit de la vie de Marie Curie. Je suis en pleine lecture lorsque la porte de ma chambre s'ouvre et que deux soignants entrent. C'était l'heure de prendre la température, nous la prenions toutes les quatre heures par précaution par rapport à l'épidémie de Covid-19. Ils m'apportaient également mes médicaments et un sirop de cassis en guise de gouter. Il ne s'est passé que peu de temps avant que la porte s'ouvre de nouveau. C'était le psychiatre. Il semblait fatigué et dans ses pensées.
- Alors Alex je viens pour m'entretenir avec vous sur la manière dont vous passez vos journées ici et voir si votre traitement vous satisfait dans la mesure où il vous permet de ne plus trop penser jusqu'à l'angoisse, et m'assurer que votre impression d'être manipulé, observé sans cesse, est calmée. Il tenait dans sa main un petit carnet et un stylo.
- Euh.. Et bien, je me sens toujours oppressé, une sensation qui est peut-être accentuée car je suis enfermé ici, et que le temps passe si lentement que je ne fais que penser. Je peine à me sortir de moi-même, j'ai l'impression d'être enfermé dans ma tête.
- Est-ce que lorsque vous prenez le Tercian du soir vos pensées sont plus apaisées ? Me demanda-t-il d'un air interrogatif.
- Je dirais que oui elles sont moins vives après le traitement, mais comme je vous l'ai dit les journées sont longues et j'ai donc beaucoup de temps pour repenser à ce qui m'angoisse et il arrive souvent que je ne sorte pas de ma chambre pendant plusieurs jours car je suis enfermé dans ce que vous appelez des délires.
- Voulez-vous que ça cesse ?
- Je ne sais pas si c'est possible, c'est là depuis tellement longtemps, répondis-je.
- Ce que je vous propose c'est que nous passions à deux Tercian trois fois par jours, au lieu de deux le soir, et je vais vous rajouter du Rispéridone pour calmer les idées délirantes de persécution, de vol ou d'insertion de la pensée.
- Maintenant, il m'arrive même d'avoir l'impression que les paroles des personnes à la télé sont spécifiquement dirigées contre moi.
- Oui c'est ce qui me semblait, le personnel soignant l'a également remarqué, lorsqu'ils interagissaient avec vous, vous dégagiez comme de la méfiance.
- Je n'arrive pas à gérer quand il y a plusieurs personnes qui me parlent, même une parfois c'est difficile. Je me sentais nul de ne pas réussir à parler.
- C'est pourquoi je change votre traitement. Et préparez-vous demain si le traitement vous va vous changez de service. Le docteur me dit bonne fin de journée et il sorti.
- Je vais... passer de l'autre côté... ? murmurais-je.
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La psychiatrie
Non-FictionDeuxième fois que je suis hospitalisé. Désormais j'ai dix-huit ans et je suis interné sans mon consentement dans le service des adultes, en psychiatrie aigüe. De longues journées passent, remplies de solitude, de remises en question, et d'obligati...