Il était vingt-trois heure passé, les médicaments commençaient à faire effet, et il était l'heure de la dernière clope de la soirée. Il ne faisait pas spécialement froid ce soir-là, et nous étions encore que deux, Mme R. devait déjà dormir et nous ne sommes que trois dans ce service. Pas d'étoiles dans le ciel, un petit vent venait caresser notre peau. Nous étions tous deux fatigués alors nous n'avons pas trop parlé. Juste à un instant il m'a interpelé et m'a raconté son rêve étrange de la nuit dernière qui le tracassait encore.
- C'était un rêve qui m'a fait prendre conscience de quelque chose. Un des plus beaux rêves que j'ai pu faire, ma fin se concluait sur une mort simple. Pas d'overdose, de saut en parachute ou de course poursuite par la police. J'étais seul dans mon lit, m'endormant pour la dernière et la plus longue fois. Certains se satisferaient de lâcher leur dernière expiration quand leur corps aura tout supporté et ne tiendra même plus debout. Je ne veux point de cet ennui-là, de cette vie basique que tant d'âmes s'accoutument à faire pour plaire aux autres. Je veux prendre des risques, tant pis si demain est le dernier jour de mon existence. Les rides n'apparaitront surement jamais sur mon visage mais je ne souhaite que cela.
Que penses-tu de tout cela, toi qui as voulu cesser de vivre ?
Son rêve m'avait tout bonnement interpelé. Je me rends compte maintenant de la gravité de la chose. C'est vrai je voulais cesser de vivre, immédiatement et pas en rêvant, juste là enfermé dans ma chambre, couché sur ce lit. Je voulais partir, ne plus laisser de trace de moi dans ce monde. Je ne pouvais plus prendre gout à la vie, ça m'était devenu impossible. Alors moi je voulais tout laisser comme c'était, juste rester là couché en attendant que la mort me prenne. Que la mort me cueille avec délicatesse, sans souffrir. Car c'est bien la souffrance qui me brulait au plus profond de mes entrailles.
Alors ce rêve, que cet homme me raconte prouve bien que désormais je n'ai plus d'envie, je n'ai plus de rêves que je tente d'accomplir. Et enfaite c'est le vide qui a pris toute la place. Passé un temps j'avais réussi à être motivé, à en vouloir des moments inoubliables, des instants merveilleux parsemés de rencontres fabuleuses. Je me demande ce qu'il s'est passé pour qu'en un rien de temps tout cela change. Quelle a été la première erreur que j'ai commise pour me retrouver à tout abandonner sans peine et sans regret ?
- Moi je ne rêve plus, dis-je en mettant mon mégot dans le cendrier avant d'ouvrir la porte et de rentrer.
Je suis allé dans ma chambre, ai ôté mon manteau et mes chaussure, me suis allongé et recroquevillé sur mon lit. Maintenant, j'aimerai seulement me regarder partir, me dire adieu et rester là à me voir m'éloigner.
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La psychiatrie
NonfiksiDeuxième fois que je suis hospitalisé. Désormais j'ai dix-huit ans et je suis interné sans mon consentement dans le service des adultes, en psychiatrie aigüe. De longues journées passent, remplies de solitude, de remises en question, et d'obligati...