Le 24 décembre 2020

469 31 2
                                    

Laure eut beaucoup de temps pour réfléchir depuis son départ de chez Julie. Boule au ventre, accompagnée de sa mère Elena, elles poussèrent le portail et se trouvèrent sur le palier de la demeure des Delamaison. La brune tenait une bouteille de champagne en main tandis que sa mère avait préparé une bûche chocolat praliné fait maison. Laure eut un moment d'absence lorsqu'elle fut rappelée à l'ordre :

- Qu'attends-tu pour frapper ma puce ?

Celle-ci repassa pour la énième fois rapidement sa main dans ses cheveux pour vérifier que le vent ne l'avait pas décoiffé. Puis, toqua deux coups successifs.

En à peine quelques secondes, la porte s'ouvrit en grand sur une dame aux cheveux mi-longs blonds/blanc vêtue d'une robe noire en toute sobriété :

- Bonsoir Laure, bonsoir Elena. Entrez, je vous en prie ! accueillit chaleureusement Marie-Noëlle.

- Bonsoir, répondirent Laure et sa mère en cœur.

- Laissez-moi vous débarrasser.

Marie-Noëlle prit les présents apportés et laissa ses invités se dévêtir tranquillement dans le petit hall à l'entrée.

- Rejoignez-nous dans le salon, nous y sommes tous.

- D'accord, précisa Laure.

Les mères furent plus qu'heureuses de se retrouver, elles avaient hâte de se raconter ce qu'il s'était passé durant ces dernières années. Elles n'avaient plus eu trop l'occasion de se croiser une fois que leurs filles respectives avaient quitté le lycée. Laure et Julie s'essayaient à dialoguer amicalement, mais quelque chose avait changé, les échanges n'étaient plus comme avant...il était clairement difficile pour l'une comme pour l'autre de faire abstraction de leurs sentiments mutuels d'envies et de contradictions.

Pour l'heure, il était temps de passer à table, qui fut décorée comme la pièce aux couleurs de Noël : une superbe nappe rouge et blanche, des guirlandes suspendues aux murs et des nœuds rouges étaient accrochés au dos des sièges. Un festin y était dressé : des verrines d'avocats crevettes, des toasts et blinis au tarama et saumon, du foie gras de qualité, une grande dinde farcie aux marrons et plus encore.

- Tu nous as sorti le grand jeu Marie-Noëlle là ! releva Elena.

- C'est normal, des invitées d'exceptions !

- C'est trop flatteur.

- Installez-vous, je vous prie ! invita Marie-Noëlle.

Alain avait installé l'extension de la table afin de respecter la distanciation de plus d'un mètre pour chacun. Le repas se déroula dans une convivialité totale. Les plats furent délicieux. Tous s'étaient mis d'accord sur le fait d'attendre un peu avant d'attaquer le dessert.

La brune semblait être spectatrice plus qu'actrice de la scène qui se déroulait. Des discussions sérieuses et d'autres moins étaient abordées. Les parents parlaient sans filtres de leurs filles alors qu'elles étaient présentes, des anecdotes y passaient. Elle observait Julie qui intervenait plus qu'elle par moments.

La blonde portait une élégante robe rouge cintrée, un pendentif doré au cou assorti à ses boucles d'oreilles en forme de plume. Ces doigts étaient vernis aussi de rouge. Elle rayonnait en cette soirée de réveillon. Cette dernière semblait l'interpeller dans un murmure :

- Hey, Ptsss ! ça te dirait de monter ?

- Comme tu veux, répliqua Laure sur le même ton.

- On revient, annonça Julie en se levant.


Laure suivit la blonde qui montait à l'étage en direction de sa chambre d'adolescente. La brune se souvenait très bien de cette pièce. Elles y avaient passé des soirées ensemble, à s'amuser. L'agencement de la chambre n'avait guère bougé d'un centimètre. Sur le côté se trouvait le bureau à droite du lit, au-dessus duquel y étaient suspendues des médailles rappelant leurs victoires. À l'opposé à gauche, un énorme poster de la ville de New York de nuit y était accroché.

- Assis toi, faut que je te parle, pria la blonde.

Laure obéit, appréhendant ce qui allait suivre. Elle s'installa sur le bord du lit. Julie referma la porte derrière elle et y plaqua son dos comme pour empêcher Laure de fuir si l'idée lui venait à l'esprit. La blonde nerveuse se balançant d'un pied sur l'autre, était décidée à dire ce qu'elle avait sur le cœur depuis si longtemps.

- Laure...

- Oui ?

- Je...

Julie inspira puis expira...

- Je t'aime, déclara-t-elle de nouveau. 

La concernée fixa son amie incrédule, qu'elle l'ait répété et cette fois-ci de pleine conscience.

- Et ce depuis des années. J'attendais un signe de ta part, mais rien ne s'est jamais produit..., continua la blonde face au silence. J'en pouvais plus, il était temps que tu le saches. Mon épisode à l'hôpital m'a fait réaliser que la vie était courte et qu'il fallait arrêter de trop penser, mais vivre tout simplement. Puis, le confinement à tes côtés m'a encore plus conforté dans le fait que j'aimerai passer encore et encore des journées comme celles que nous avons partagées ensemble, et ce le plus longtemps possible. Je sais qu'après cette déclaration, il est certain que les choses ne seront plus comme avant, néanmoins j'en prends le risque...d'autant que je ne sais pas si tu partages les mêmes choses à mon égard. Ainsi, Laure, tu as été ma coéquipière, ma confidente, mon ange gardien. Voudrais-tu devenir ma petite amie ? interrogea Julie stressée, baissant les yeux au sol, effrayé de la réponse négative éventuelle.

Laure se leva, en quelques secondes parvint à la hauteur de la blonde et répondit :

- Hey...

Julie releva ses iris azur pour les plonger dans ceux de Laure, qui ne semblait pas du tout affectée.

- Je..., commença la brune.

- Les filles ! On attaque le dessert ! cria Marie-Noëlle.

- Deux minutes, on arrive ! répondit Julie de la même octave et reporta son attention vers Laure.

- M'accorderais-tu un petit temps de réflexion ?

- Oui, bien sûr ! Pas trop longtemps non plus, s'il te plaît.

- C'est promis, sourit la brune.

Celle-ci déposa un baiser sur le front de Julie avant qu'elles ne descendissent. 

EnsembleOù les histoires vivent. Découvrez maintenant