Chapitre 8 : Simon

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Les matins de semaine, je me lève à l'aube, et je bois mon premier café seule. C'est mon rituel, et tout le monde à la maison le respecte. Olivier me rejoint ensuite, et nous prenons notre petit déjeuner en tête à tête avant d'aller nous préparer. C'est seulement après que nous levons les enfants et pendant qu'ils déjeunent à leur tour sous la surveillance de leur père, je pars au travail. Mes horaires sont flexibles et cela me permet de les récupérer tôt au périscolaire pour les emmener à leurs différentes activités, ou simplement de profiter de la fin de journée ensemble, hormis le vendredi où c'est moi qui les dépose puisque de toute façon, Olivier va les chercher directement à l'école.

Ce vendredi matin, mon mari et moi sommes donc assis face à face à la table de la cuisine, appréciant le calme. Je lis les nouvelles sur mon téléphone tandis qu'il beurre pensivement une tartine de confiture, encore ensommeillé.

— Tu sais à quelle heure tu rentres ce soir, à peu près ? Je pensais emmener les enfants manger chez mes parents.

— Oui, bonne idée, je ne serai pas là avant au moins vingt-trois heures, je pense.

— Tu fais quoi ?

— Oh, rien de spécial, je... dîne avec Kenza.

— Juste vous deux ? s'étonne mon mari.

Il sait que nous avons l'habitude de nous retrouver à quatre, mais moins j'inclus de personnes dans mon mensonge, et mieux ce sera. Je sais, en outre que Kenza est celle dont il est le moins proche, il n'y a pas de risque qu'il fasse allusion à ce dîner quand il la verra, et au pire, Kenza est la seule qui accepterait de me couvrir si c'était vraiment nécessaire.

— Oui, affirmé-je avec aplomb, elle a des soucis au boulot, une histoire de harcèlement par un de ses collègues, je ne crois pas qu'elle ait envie que tout le monde soit au courant.

— Je comprends, fait Olivier en terminant son café. Bon, j'appelle ma mère, alors. Je file à la douche.

Il m'embrasse tendrement, et monte dans la salle de bains, me laissant avec ma mauvaise conscience.

***

Je suis arrivée avant lui, pour être en position de force. J'ai une boule dans le ventre, les mains moites. Je ne sais même pas ce que je ressens. De la colère, de l'incompréhension ? Pourquoi ces mensonges ? Et en même temps, tout me semble plus clair maintenant. Je n'en reviens pas qu'il me mente depuis le début. Il arrive, gai et de bonne humeur, m'embrasse sur les joues, mais je ne me lève pas, ne réponds pas à son bonsoir. Il ne s'en rend même pas compte. La carte des boissons dans les mains, il parle, sans me regarder.

— Tu bois quoi ? Du vin ? Je vais peut-être me prendre un whisky-coca... Puis il pose sa carte, et me sourit : ça a été la semaine ?

Je penche la tête sur le côté.

— Comment va Delphine ?

Touché. Il paraît dérouté, et bredouille une réponse loin d'être satisfaisante.

— Bien... ça va, ça va... pourquoi ?

— Tu sais très bien pourquoi je te pose la question. Je suis au courant, Simon.

— Au... au courant de quoi ?

— Arrête ton cinéma. J'ai mené ma petite enquête. Je sais que vous êtes séparés.

Il baisse les yeux, et reste silencieux un moment. Une serveuse passe, je commande pour lui alors qu'il regarde toujours fixement la table.

— Comment l'as-tu su ? demande-t-il enfin, d'une voix sombre qui m'ébranle un peu.

L'amour à l'imparfaitOù les histoires vivent. Découvrez maintenant