Chapitre 16 : Olivier

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Il est près de minuit quand j'arrive chez moi. Tout est noir et silencieux, tout le monde dort.

Sans bruit, je vais jusque dans le salon, et me laisse tomber sur le canapé. J'ai encore besoin d'un petit sas de décompression avant de rejoindre Olivier. J'hésite à allumer la télé et à lancer un épisode d'une série quelconque, juste pour me vider la tête, quand la porte s'ouvre sur mon mari, en tee-shirt et boxer.

— Oh, désolée, je t'ai réveillé ? demandé-je à voix basse.

— Non, non, je bouquinais. Ça va ? Tu as passé une bonne soirée ?

Je me lève et vais jusqu'à lui pour l'embrasser.

— Oui, c'était... sympa.

— Tu viens te coucher ?

— Je me pose juste cinq minutes et je te rejoins.

Olivier m'observe quelques secondes, une expression indéfinissable sur le visage, puis finalement me sourit, presse à nouveau ses lèvres sur les miennes et remonte.

Je vais dans la cuisine et me sers un verre d'eau. Machinalement, je regarde mon téléphone, comme pour voir si j'ai reçu un message de Simon. Mais je n'en ai pas, je n'en aurai plus. La boule dans ma gorge m'oppresse et me laisse à penser qu'il avait raison. C'était la meilleure chose à faire. Je termine mon verre, le mets au lave-vaisselle, et monte.

Dans la salle de bains, je me démaquille et me brosse les dents, puis passe embrasser mes deux trésors, comme chaque soir avant d'aller me coucher.

Olivier a éteint la lumière, mais ne dort pas encore. Je me glisse dans le lit à ses côtés, il se rapproche, et je me niche dans ses bras. Le seul endroit où je me suis toujours sentie complètement en sécurité.

­— Je t'aime, mon amour.

Le samedi matin, nous sommes presque toujours réveillés par la même chose. La petite fabrique à histoires que Milan adore, et qu'il met en route à peine les yeux ouverts. Il faut tourner les boutons pour sélectionner un personnage, un endroit, et un objet, et la machine invente un conte à écouter. C'est donc pour la millième fois la voix féminine narrant aujourd'hui l'histoire de Féodore le dinosaure qui nous tire du sommeil.

— Enfer, grogne mon mari en baillant.

Je me retourne pour regarder l'heure. 7h42.

— On avait dit pas avant huit heures, je râle à mon tour, mais je me tais avec la délicieuse sensation des bras de mon mari autour de mes épaules. Il m'attire contre lui, et je pose la tête sur son torse, nos jambes entremêlées.

Nous restons silencieux un moment, dans les brumes cotonneuses du matin, savourant nos caresses et gestes tendres, puis Olivier se détache de moi.

— On va se prendre un petit dej en ville, avant le marché ?

C'est l'un de nos rituels des samedis de beaux temps. Nous allons faire le marché en famille, et lorsque nous nous levons assez tôt, nous prenons un petit déjeuner gargantuesque dans l'un des bars du centre-ville. Les enfants adorent ça, ils se font une orgie de croissants, jus de fruits et œufs brouillés. Nous commençons donc par cela ce samedi matin. Puis chez nos commerçants habituels, nous achetons en quantités légumes frais, œufs de ferme, fromages et viande d'éleveurs locaux avant de rentrer chez nous, paniers chargés pour déjeuner d'un poulet rôti à la broche.

Plusieurs fois, je sens le regard d'Olivier sur moi, pas méfiant, non, mais curieux, interrogateur. Il voit bien que malgré tous mes efforts, tout n'est pas normal.

Après le repas, nous nous installons pour la corvée du week-end, les devoirs. La lecture et la poésie de Milan, qui est au CP, la leçon de sciences et les exercices de géométrie niveau CM1 de Layla, puis Olivier propose que nous fassions des cookies pour le goûter. C'est un peu trop pour moi, j'ai besoin d'air.

L'amour à l'imparfaitOù les histoires vivent. Découvrez maintenant