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À première vue, Iwaizumi Hajime semblait être un étrange jeune homme un peu trop sérieux. Son visage affichait toujours la plus impassible des expressions et seuls ses sourcils se fonçaient de temps à autre pour témoigner de son mécontentement. Avec une telle allure, on supposait qu'il menait de dures études de droit ou de commerce dont la rigueur des enseignements s'était inscrite sur ses traits. Et pourtant, en dépit des apparences, Iwaizumi s'était tourné vers des études artistiques. C'était à l'université des arts de Tokyo, la Tōkyō Geijutsu Daigoku, qu'il se rendait chaque jour avec un entrain bien dissimulé.
Cet établissement était la plus ancienne et la plus prestigieuse école d'art et de musique du Japon. Elle se trouvait dans le parc d'Ueno où l'on croisait toujours de nombreux jeunes gens occupés à lire, à peindre, à jouer d'un instrument ou même à danser. C'était un véritable havre de paix où le sérieux d'Iwaizumi contrastait quelque peu, lui qui ne souriait que peu. Il n'avait peut-être pas l'allure d'un artiste, mais sa passion et son talent étaient immaculés. Sitôt qu'il passait les portes du département consacré à la sculpture, son corps se détendait de lui-même. Il pouvait passer des heures assis sur son petit tabouret à travailler ses projets, griffonnant des maquettes ou travaillant le plâtre.
Quand il n'était pas à la Geidai, Hajime se rendait souvent dans un petit café qui n'était pas bien loin de Nerima, où se trouvait sa résidence étudiante. L'endroit était situé en face d'une grande chaîne renommée et n'était donc que peu fréquenté. L'étudiant des beaux-arts appréciait particulièrement le calme qui y régnait, celui-ci lui permettant de se concentrer pleinement. C'était du moins la raison pour laquelle il avait commencé à s'y rendre. Les semaines passèrent et Iwaizumi se retrouvait de plus en plus souvent assis dans un coin tranquille, une tasse de café noir posée sur la table. Le breuvage était à son goût, mais ce n'était pas non plus ce qui le faisait venir encore et encore.
Si Hajime franchissait tous les jours la porte de cette boutique, c'était pour apercevoir l'un des jeunes hommes qui y travaillait. Dès l'instant où il avait posé les yeux sur lui, l'étudiant s'était pour la première fois de sa vie retrouvé figé. Son corps entier avait cessé de fonctionner et son cœur en avait même loupé un battement. La vie d'un artiste était une vie de passion animée par des envies passagères et des plaisirs futiles. En courant après la beauté du monde, ils se délaissait souvent de leurs derniers amours pour en saisir de nouveaux. Mais à cet instant précis, Iwaizumi était certain d'avoir trouvé sa seule et unique muse, celle qui illuminerait son âme jusqu'à son dernier souffle.
Oikawa Tooru, c'était le nom qui était épinglé à la chemise de ce garçon à peine plus âgé que lui. C'était le nom qu'on avait donné à la personnification de son inspiration. Depuis ce coup de foudre artistique, Hajime ne pouvait plus détacher ses yeux de lui. Alors chaque jour, il venait s'asseoir à la table qui lui permettait d'observer le comptoir. Et chaque jour, il noircissait des pages et des pages de croquis. La mine de son fusain dansait sans relâche sur le papier dans l'espoir de capturer la beauté du visage qui l'avait séduit. Un matin, alors qu'il traçait la forme d'une mâchoire, Iwaizumi ne vit pas le garçon qui hantait ses pensées s'approcher de lui. Ce fut seulement lorsqu'il releva les yeux afin de contempler son modèle qu'il tomba justement nez à nez avec lui. Dans la surprise, plusieurs feuillets glissèrent de ses doigts pour venir s'échouer sur le sol.
