𝙲𝚑𝚊𝚙𝚒𝚝𝚛𝚎 𝚚𝚞𝚊𝚛𝚊𝚗𝚝𝚎

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Chapitre quarante.

Le jour se levait tandis que Midoriya et Shoto atteignaient enfin la bordure de la ville. Ils s'étaient débarrassés de leurs déguisements dans une benne à ordure, avaient enfilé leurs vêtements de rechange et avaient transféré l'intégralité de l'argent dans le sac de Shoto. Le sac de Midoriya était trop facilement reconnaissable pour prendre le risque de le garder plus longtemps, et il avait également rejoint la poubelle.

Ils sourirent en sentant les premières lueurs du soleil leur réchauffer la peau. Ils quittaient enfin les ruelles pour marcher le long d'une grande route bordée par un pré qui s'étendait sur plusieurs kilomètres. Épuisés, ils décidèrent de descendre en contrebas et de profiter de cet endroit désert pour se reposer en toute tranquillité sans craindre la police.

Même s'ils s'étaient débarrassés de leurs déguisements et qu'ils n'étaient sûrement pas reconnaissables sur les caméras, il était louche de croiser deux adolescents à l'aube avec un gros sac sur le dos qui se dirigeaient vers la sortie de la ville. On aurait pu les prendre pour des fugueurs et les embarquer pour les ramener chez eux.

Ça aurait été vraiment stupide de tomber à cause de ça.

Cachés par l'ombre des arbres qui les surplombaient, Midoriya et Shoto se laissèrent presque tomber au sol tant ils ne tenaient plus sur leurs jambes. Ils avaient passé la nuit à marcher et ne s'étaient pas arrêtés une seule fois pour se reposer un peu. Même s'ils avaient l'habitude des nuits blanches à jouer aux jeux vidéos, ils n'en restaient pas moins deux adolescents en pleine croissance qui avaient besoin de sommeil.

— On peut dormir là ? demanda Shoto du bout des lèvres.

Il se sentait déjà partir. La position qu'il avait trouvée n'était très agréable, le dos contre un arbre et les fesses entre les racines, mais il était tellement fatigué qu'il ne s'en soucia pas.

— Oui, reposons-nous, on reprendra notre marche cet après-midi.

Midoriya avait du mal à garder les yeux ouverts. Il eut juste le temps de s'allonger en mettant sa tête sur les cuisses de Shoto avant d'apercevoir Shinso, perché sur une branche d'arbre, et de sombrer dans un sommeil sans rêves.

Ils se réveillèrent quelques heures plus tard. Le soleil était haut dans le ciel, ils pouvaient entendre les voitures circuler à grande vitesse à côté d'eux. Ils se relevèrent en grimaçant ; ils avaient mal partout. Le sol n'était définitivement pas un bon matelas pour se reposer. En entendant leur ventre gronder — ils n'avaient pas manger depuis la veille et avaient marché toute la nuit, ils étaient affamés — Midoriya sortit les boulettes d'onigiri qu'il avait acheté dans les trois premiers konbini.

— Heureusement que tu y as pensé, j'ai tellement faim que j'aurais pu manger de l'herbe sur une tartine d'écorce, fit Shoto dont le ventre faisait le plus de bruit.

Midoriya lui sourit et lui tendit les onigiri. Il y en avait six, en tout. Ils en mangèrent deux chacun. Ils gardaient les deux derniers pour plus tard, au cas où ils n'auraient toujours pas atteint la prochaine ville et qu'ils avaient trop faim pour continuer d'avancer.

Rassasiés et reposés, ils levèrent le camp pour reprendre leur voyage. D'après ce qu'indiquait Google Maps, ils devraient arriver en ville après une heure de marche. Il hésitèrent à faire du stop pour aller plus vite, mais ils n'avaient pas besoin de se presser — et de prendre le risquer de tomber sur une personne qui les ramène d'où ils venaient en pensant qu'ils avaient fugué — alors ils continuèrent à pieds.

C'est Midoriya qui portait le sac de Shoto sur ses épaules. Même s'il était plus musclé, il avait des côtes cassées, Midoriya ne voulait pas prendre le risque de le surmener. Arrivés à destination, la première chose qu'ils firent fut non pas de chercher un hôtel où dormir, un plan pour se repérer ou une douche pour se laver, mais une boîte postale.

Ils avaient besoin de finirent ce qu'ils avaient entrepris avant de penser à autre chose et de se tourner vers l'avenir. Ils repérèrent la boîte jaune à côté d'un konbini — quelle ironie. Midoriya inspira, expira, puis ôta son sac de ses épaules pour en retirer le cahier de la mort et l'enveloppe qu'il avait préparé au préalable avec l'adresse de Kirishima. Elle était dans un sale état, avec les coins chiffonnés, mais elle ferait l'affaire.

Le cahier noir et léger entre les mains, Midoriya l'observait. Il se disait qu'il aurait pu le garder encore un peu, qu'il aurait pu leur être encore utile. Mais il savait aussi qu'à force de jouer avec le feu, Shinso finirait par lui prendre le reste de son espérance de vie, et il ne voulait pas abandonner Shoto. Alors il ferma les yeux, et renonça aux droits de possession.

Lorsqu'il rouvrit les yeux, il avait les mains vides et sentait qu'une présence avait disparue, mais Shoto était toujours là. Il glissait un mystérieux cahier noir dans une enveloppe qu'il referma avant de la poster.

— Tu fais quoi ? demanda Midoriya.

— Crois-le ou non, cette enveloppe va changer le monde.

Midoriya fronça les sourcils. Il avait l'impression d'avoir un trou de mémoire, comme si une partie de ses souvenirs lui avait été retirée. Il haussa les épaules, et laissa Shoto lui prendre la main sans protester. Tandis qu'ils déambulaient sur le trottoir à la recherche d'un hôtel pour prendre une douche, Midoriya songeait à sa mère. L'enveloppe que Shoto avait glissée dans la boîte postale lui rappelait la lettre qu'il avait laissé au bout de son lit.

— A cette heure-là, le lycée a sûrement appelé ma mère. Si ça se trouve, elle est rentrée en urgence de son boulot en voyant que je ne répondais pas à ses sms. J'espère qu'elle ne m'en voudra pas trop.

Shoto ne dit rien et serra sa main un peu plus fort dans la sienne.

Quand les faibles deviennent les fortsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant