𝙲𝚑𝚊𝚙𝚒𝚝𝚛𝚎 𝚜𝚎𝚙𝚝

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Chapitre sept.

Le cœur de Midoriya se mit à battre moins vite en retrouvant le béton et l'odeur rassurante des cerisiers. La pièce était enfin terminée, il pouvait quitter la scène. Il rentra en classe, posa son sac, fit tomber sa trousse et mit sa tête entre ses bras. Il inspira profondément pour se calmer. Le nez contre son pupitre, il fixa le petit trou qui avait été fait dedans. Il n'était plus sur les pavés, il ne sentait plus cette odeur de cigarette. Il pouvait respirer à nouveau.

Il releva la tête en entendant la prof commencer à faire l'appel. Malgré tout, il continuait de fixer le petit trou qu'il avait fait au compas en début d'année. Ça semblait insignifiant, mais ce simple trou dans sa table lui permettait de se concentrer sur un point précis pour oublier ce qui l'entourait. Oublier le dos oppressant de Bakugou, qui se balançait sur sa chaise devant lui. Oublier le regard narquois de Kaminari qui l'observait à l'autre bout de la classe.

— Bien, maintenant que vous avez tous été appelés, j'aimerai qu'un volontaire se désigne pour me parler de l'actualité. Comme vous le savez, vous êtes en dernière année, et vous passerez aux études supérieures l'an prochain. Certains d'entre vous visent de grandes écoles, et veulent notamment faire de la politique. C'est pourquoi j'aimerais tester votre culture général et vérifier un peu votre niveau.

Leur professeure attendit une bonne dizaine de secondes, mais comme elle s'y était attendue, aucune main ne se leva. Elle laissa échapper un soupir. Midoriya regarda par la fenêtre, il n'avait jamais été très passionné par ses cours de sciences sociales. Il avait choisi la filière littéraire parce qu'il n'était pas très bon en maths, mais il n'affectionnait pas particulièrement l'histoire ou la géographie. Il se concentra pour ne pas faire de bruit et ne pas attirer l'attention de la prof qui s'impatientait.

Il n'était absolument pas au courant de l'actualité, il ne s'y intéressait pas. Il avait d'autres choses à faire que de s'asseoir sur son canapé pour regarder les infos. Il fallait qu'il s'occupe de la maison, qu'il fasse la cuisine. Et puis, c'était beaucoup plus amusant de jouer avec Todoroki à des jeux vidéos plutôt que d'apprendre qu'un nouveau meurtrier s'était fait attraper par la police. Alors à moins que ça n'intéresse sa prof de savoir que le jeu My Hero Academia était dans le top des ventes des jeux actuels, il n'avait pas l'intention de lever le doigt.

D'autant plus qu'il détestait attirer l'attention. Il savait qu'il perdrait ses moyens lorsque toutes ces paires d'yeux se tourneraient vers lui, que le dos de Bakugou se contracterait, que les pupilles de Kaminari le fusilleraient sur place. Il n'avait pas envie de se ridiculiser devant toute sa classe en se mettant à balbutier des choses sans queue ni tête en se tortillant les doigts.

— Puisqu'il n'y a pas de volontaire, je vais désigner quelqu'un au hasard. Yaoyorozu, pouvez-vous me parler un peu de l'actualité ?

Yaoyorozu était leur déléguée de classe. Mais aux yeux de Midoriya, elle n'était rien de plus que la paire de mocassins en cuir qu'elle portait aux pieds.

— Un tueur en série a été arrêté hier soir. Shigaraki Tomura, de son vrai nom Shimura Tenko, serait à l'origine d'une vingtaine de meurtres. La police l'a coincé à son domicile. Son jugement aura lieu dans deux jours, mais normalement, il devrait écoper de la peine de mort.

Ce discours était digne de mocassin en cuir. Elle avait les meilleures notes de la classe juste devant Bakugou. Elle était toujours studieuse, à l'image de ses chaussures toujours propres. Elle savait ce qu'elle voulait faire, elle se donnait à fond dans ses études pour réussir à entrer dans la meilleure université du pays, à Tokyo. Midoriya aurait bien voulu être comme elle. Avoir un but qui le motiverait à se donner à fond. Mais son seul objectif pour le moment était de finir l'année pour enfin échapper à l'enfer que lui faisait vivre la Bakusquad.

— Merci, c'est très bien. Quelqu'un aurait d'autres détails à apporter sur cette affaire ?

Midoriya frémit inconsciemment lorsque le dos devant lui s'allongea et que le bras qui y était accroché se leva. C'était rare que Bakugou participe de son plein gré.

— Ce type est complètement taré, alors si ça se trouve, il ira en hôpital psychiatrique plutôt qu'en taule. Sinon, tous les tueurs en série rapportent des trophées de leurs victimes. Si Tomura Shigaraki est aussi connu, c'est parce qu'ils collectionnaient pas juste leurs vêtements ou leurs cheveux comme d'autres tueurs. Lui, il coupait la main droite de ses victimes pour les foutre dans son frigo !

— Je vois que vous vous êtes bien documenté sur le sujet. Je n'attendais pas ce genre de détail barbare, mais ce n'est pas mal d'avoir pu les citer. Néanmoins, veillez à surveiller votre langage la prochaine fois, je n'apprécie pas entendre le mot « foutre » sortir de la bouche d'un élève.

Midoriya entendit Bakugou l'insulter à voix basse. Chaque fois qu'il entendait sa voix, même si ce n'était pas à lui qu'il s'adressait, il ne pouvait s'empêcher de trembler. Il avait pourtant simplement répondu à la question de leur professeure, mais il avait senti son sang se glacer en l'entendant traiter ce type de « taré ». L'insulte ne lui était même pas destinée personnellement, mais la peur que lui inspirait Bakugou était encrée en lui depuis des années, et on ne se défaisait pas facilement d'une crainte fondée depuis si longtemps.

Il fixa à nouveau le trou dans sa table. Et alors qu'il commençait à se calmer, il reçut une boule de papier sur la table. A force de lui en balancer tous les jours, Kaminari avait fini par devenir un expert en lancer de boulettes. Il n'en loupait aucune. Si auparavant, il se faisait souvent prendre par l'œil avisé de leur prof lorsque ses messages atterrissaient par terre ou contre la fenêtre, désormais, ses boules finissaient toujours sur sa table.

Il déplia le mot. Comme d'habitude, Kaminari ne s'était pas foulé, et le traitait tout simplement de « tapette ». Dans un geste routinier, Midoriya chiffonna la feuille et l'enfonça dans sa poche.

Quand les faibles deviennent les fortsOù les histoires vivent. Découvrez maintenant