4- Javier - mauvais moment

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TW : décès, drogue.

Résumé des chapitres précédents:

A Lubeck, Willem réalise qu'il n'a pas oublié l'été de ses quatorze ans et son ennemi, un français odieux.

Javier lui est à la Rochelle et il supplie sa mère de l'autoriser à ne pas aller en Allemagne. Quand il avait quatorze ans il a été odieux avec un garçon en colonie et il ne veut pas risquer de le rencontrer en Allemagne.

Sa mère accepte et signe le refus du voyage, Javier est sauvé il n'ira pas en Allemagne.

Personnages principaux :

Javier Rouvière

Willem kostentin Hansknatsche

***

Javier, mercredi 2 décembre

─ On la refait !

Je viens de terminer de vérifier la vidéo, c'est pas mal, mais nous pouvons faire bien mieux. Les autres rouspètent, fatigués, je reste inflexible ! Il y a mes acolytes habituels, David et Sofiane, ainsi qu'Alexandre et Evan qui se débrouillent sur des VTT. Nous faisons un tournage où toute la bande roule à vive allure sur les remparts et les quais de la vieille ville.

Sofiane nous filme avec deux drones, il a progressé dans les prises de vue. Nous sommes déjà en décembre et le temps agité ajoute encore à la magie de la vidéo.

Si nous allions un peu plus vite, cela devrait donner un effet plus réussi, quitte à prendre quelques risques, après tout nous avons repéré le parcours à de nombreuses reprises. Un moment plus tard, après plusieurs belles chutes et frayeurs, c'est enfin réussi et ça en jette, comme si nous étions des pros !

J'ai même eu un bonus, le soleil levant sur la vieille ville.

Nous allons nous poser sur le sable de la plage de la Concurrence pour nous remettre de nos exploits. Les lieux sont déserts, si ce n'est quelques petits vieux qui viennent pour nager. Ce sont les irréductibles qui viennent toute l'année, nous sommes quand même en décembre.

Avec les copains, nous admirons la séquence finale.

Ils n'ont pas arrêté de chougner quand je faisais recommencer les prises, désormais ils font les fiers. Curieusement ils ne se rappellent plus de leurs jérémiades, j'aurais dû les enregistrer. Nous délirons, sur le succès de cette vidéo, quand mon portable sonne. C'est ma mère.

─ Mon chéri, je suis désolée, il va falloir que tu sois très courageux...Mamie... elle ne s'est pas réveillée ce matin, elle vient de nous quitter, murmure-t-elle d'une voix tremblante.

─ Quoi ? je hurle anéanti par cet appel que je redoute depuis des semaines.

Les larmes coulent sur mes joues, David vient m'enlacer.

─ Elle est passée dans son sommeil. Tu sais, c'est une façon douce de partir, tente ma mère.

Rien ne me consolera.

─ Comment oses- tu me dire ça ! je grogne, fâché après elle.

N'empêche, je ne peux m'empêcher de me demander si mamie n'a pas choisi exprès ce jour, où elle savait que je tournais et ne serai pas à la maison.

─ Ne rentre pas tout de suite, je fais venir les pompes funèbres et tu pourras lui dire au revoir plus tard. Elle est partie, mon chéri, murmure ma mère qui pleure au téléphone.

Je raccroche, glacé, les vagues qui se fracassent sur le sable semblent se lamenter avec moi. J'ai besoin d'autre chose. Normalement au Nouvel An avec mamie nous faisons toujours la baignade « des banquisards ». J'aime me baigner en hiver, je tiens d'elle. Dire qu'elle ne pourra plus en profiter ! Savoir que cela allait arriver ne m'aide pas du tout !

─ David, je demande à mon pote en me tournant vers lui. Tu as des ... ? Je m'appuie sur son épaule sans poursuivre, il a compris.

─ Tu étais contre !

Il attrape déjà son sac à dos, pour sortir les joints. Il prétend avoir besoin de cela pour planer, dire que je lui fais la morale.

─ J'en ai besoin là ! Vraiment besoin !

On a fumé, comme je ne suis pas habitué, ça me rend mégastone, je n'arrive pas à réaliser... que tout à l'heure, quand je rentrerai, ma grand-mère ne sera plus là pour moi, nous ne jardinerons plus tous les deux. D'ici quelques jours il y aura l'enterrement. Je suis désespéré, je veux que ma grand-mère soit vivante ! J'ai peur de pleurer et merde ! Je réalise alors que je pleure depuis un moment.

Qu'est-ce qu'on va devenir, ma mère et moi, sans mamie ? Elle était mon pilier, sûrement celui de ma mère aussi. On va sombrer avec les conneries de Sara !

Le temps est un phénomène étrange, long, rapide, insupportable souvent et curieusement les jours suivants sont passés si rapidement. J'ai pris conscience que la vie n'est pas toujours cool, que le temps passe. Mamie n'arrêtait pas de me raisonner. Curieusement, du fait de son absence, j'ai l'impression que je me calme enfin !

Les vacances de Noël, sans mamie ont été horribles et désespérantes.

Avec Sara, nous n'avons pas fait la fête, nous n'avons pas fait de réveillon, ni de cadeaux. Nous sommes juste allés nager en mer, le premier janvier, c'était notre façon à nous de lui rendre hommage.

L'hiver est passé, morne, interminable, avec les contrôles, les révisions. Malgré les protestations de ma mère, j'ai maintenu le système mis en place par mamie avec deux maisons séparées. Sara n'en loupe pas une, elle sort déjà avec un nouveau mec, j'ai envie de la claquer et j'ai refermé la porte de séparation à clé.

─ Ouvre Javier ! Tu n'es pas majeur et c'est chez moi de l'autre côté maintenant aussi !

Je la laisse s'épuiser, je n'ouvrirai pas. Elle abandonne d'ailleurs, abattue. Son mec l'engueule et elle le fout dehors, ambiance !

Duel à Lübeck [BL]Où les histoires vivent. Découvrez maintenant