15. Une question de confiance

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Le soleil tapait fort et le sable qui, brûlant, avait vite fait de décourager Benjamin dans son idée de retirer ses chaussures. Cela faisait quelques heures qu'ils avaient discrètement quitté le navire, et l'Orangeois avait déjà bu la moitié de sa gourde. A leur droite, la mer s'étendait à perte de vue, tandis qu'à leur gauche, derrière eux et face à eux, le sable semblait les narguer. Du jaune. Partout. Inlassablement identique. Si bien que Benjamin avait la désagréable impression de faire du surplace. Son nez le démangeait et il était prêt à parier qu'il avait attrapé un coup de soleil. Ses vêtements lui collant à la peau l'étouffaient, mais le garçon n'osait pas se dévêtir, de peur de terminer plus rouge qu'une écrevisse bien cuite. L'adolescent lança un regard envieux à ses amis.

A quelques mètres devant lui, Cassian, torse nu, se rafraîchissait régulièrement avec l'eau de mer tandis que Méryne, portant une tunique à manches longues, ne semblait pas le moins du monde souffrir de cette chaleur pourtant insoutenable. La bouche sèche, Benjamin hésita à leur demander de faire une pause. Il n'avait pas envie de passer pour une petite chose fragile, mais il n'était pas non plus sûr de pouvoir continuer ainsi encore longtemps.

— Nous y sommes bientôt, siffla Vishka contre sa nuque.

La garçon acquiesça. Malgré l'aversion qu'il ressentait par moment envers le familier, l'adolescent était content de sentir sa fraîcheur contre son cou brûlant.

— Tu sais, reprit le serpent, en signant notre pacte, tu ne ressentiras plus jamais cette intense chaleur. Tu deviendras si rapide que ce sont eux qui devrons courir pour simplement rester à ta hauteur. Mais après tout, la décision t'appartient.

Benjamin ne répondit rien. Depuis leur arrivé, Vishka ne cessait de lui exposer les avantages qu'il aurait à passer un pacte avec le familier, mais le jeune garçon avait fait une promesse à Méryne. Et outre le fait qu'il avait peur de subir les foudres de la chasseresse, Benjamin était quelqu'un de parole qui essayant autant que possible de tenir ses promesses.

Le silence revint et, au bout d'un moment, le jeune garçon commença à se demander comment avait réagi l'équipage quand il avait compris qu'ils étaient partis sans dire au revoir. Bien entendu, Kaïen étant au courant, Benjamin était au moins sûr qu'il avait prit le large sans se poser de questions, mais les autres ? S'étaient-ils senti trahis ? Pensaient-ils qu'ils resteraient pour toujours ? Benjamin effleura la Tisseraie du bout des doigts. Ce geste était devenu une habitude, comme un rituel pour faire taire ses angoisses. Et cela fonctionnait, à défaut d'en avoir tiré un quelconque pouvoir. Au fil des jours, Benjamin en était venu à la conclusion que l'aiguille de légende n'était au final qu'une banale aiguille, du moins sans sa jumelle. Oh ! Bien sûr, il avait conscience que c'était elle qui l'avait transporté dans ce monde, mais si pouvoir elle avait, cela n'allait pas plus loin qu'un portail à sens unique, et donc sans réelle utilité ici.

— Nous y sommes, les informa Cassian, après cette dune se trouve les remparts de Pearl-Campès.

Mu par une énergie nouvelle, Benjamin accéléra le pas, prenant la tête de leur petit groupe. Face à cette initiative, le frère et la sœur échangèrent un sourire complice avant de rejoindre leur camarade. Mais alors qu'ils atteignaient le sommet de la dune, Benjamin se stoppa net, manquant de se faire percuter par les deux autres. Son sourire avait quitté son visage et sa peau, derrière ses coups de soleil, prit une teinte blafarde.

— Par la Tisseraie ! s'exclama Méryne avec une telle vivacité que Benjamin comprit que cet emploi était plus injurieux que toutes les insultes terriennes qu'il connaissait.

De plus, le regard de reproche que lança Cassian à sa soeur confirma sa déduction. Benjamin reporta son attention sur la haute fortification en pierres s'élevant face à eux. En contrebas, une file humaine impressionnante attendait patiemment de pouvoir entrer dans la ville. Devant les portes se tenaient une dizaine de gardes fouillant méticuleusement chaque personne avant de l'autoriser ou non à entrer.

Le brodeur de rêves - Tome 1 - L'héritage de GaramaéOù les histoires vivent. Découvrez maintenant