L'Ombre et l'Esprit

Chapitre 1

Adélita-

La vie n'est pas quelque chose de facile. La mienne ne l'ai assurément pas. Je cumule deux boulots, je vis dans un tout petit appartement moisi et riquiqui de deux pièces dans un quartier pourrit, je peine à joindre les deux bouts et j'élève seule mon fils de quinze ans. Mon petit Jamie a grandit bien trop vite je trouve. Et j'aurais aimée pouvoir lui offrir de meilleurs conditions de vie. Pourtant, jamais il ne s'est plaint, jamais il ne s'est rebellé contre moi, jamais il n'a critiqué. Il m'aide autant qu'il le peut. C'est mon Trésor, mon rayon de soleil.Ma raison d'être. On n'a peut-être pas les moyens de s'acheter de nouveaux vêtements aux changements de saisons, on ne mange pas au restaurant et on ne part pas en vacances comme ses camarades de classe, mais on est une famille soudée, bien plus qu'eux. Jamie n'a pas de console, pas de télé non plus, mais il a des livres. Autant que je peux en trouver. Et il adore ça. Chaque nouvelle histoire que je lui trouve est une nouvelle aventure pour lui.

Je souffle et regarde l'heure qu'affiche mon micro-onde. Vingt heure deux. Bon. Après avoir fait le ménage pour différents clients, je dois changer de monde. Mon travail de ménagère à domicile ne me permet pas de vivre. C'est un emploi stable, qui paye à peine les factures d'eau et d'électricité mais certainement pas les courses jusqu'au prochain versement ni les imprévus. Donc, la nuit, je danse. Une vieille passion que m'a léguée ma mère. Je danse dans un bar où les riches personnes de Los Angeles viennent regarder des femmes dévêtues se déhancher. Et parfois plus. Mais pas moi. Je n'ai jamais franchie le pas. Je ne suis pas aller de ce côté de la barrière. Pas encore. Mon patron a été compréhensif quand je lui ai dis que je voulais bien danser, même nue, mais pas faire d'after. À la place, j'aide au bar et au service une fois mon tour de danse terminé. Je commence à vingt et une heures trente et reste jusqu'à deux heures du matin. Puis je rentre dormir quelques heures avant de prendre mon travail de jour à neuf heures. Juste après m'être occupé de Jamie.

J'ai de la chance, ma voisine, une vieille dame charmante, s'occupe de lui le soir quand je pars bosser. Ça lui fait de la compagnie d'après elle. En échange, je m'occupe de faire ses courses et de l'aider quand elle en a besoin. Et Jamie a une grand-mère qui le dorlote. Mon fils adore sa Mamy Mia. Avec un soupir, je jette un nouveau coup d'œil au micro-onde. Vingt heures dix. Il est bientôt l'heure pour moi de partir.

- Jamie ? Appelé-je.

- Oui maman ?

- Il va être l'heure. Tu as besoin de quelque chose ?

- Non. C'est bon. Dit-il en s'approchant, les mains dans les poches de son jean beaucoup trop troué.

- Tu es sûr ?

- Oui maman.

- Dans quelques jours, c'est ton anniversaire, je t'emmènerai manger un truc nouveau. OK ?

- Tu n'es pas obligée maman.

- Si. C'est un jour important. Je suis désolée de ne pas pouvoir faire plus. Soufflé-je.

- Tu fais déjà beaucoup maman. Et je suis fier d'être ton fils. Ne t'inquiètes pas pour ça.

- Oh, Jamie ... Me mis-je à pleurer.

- Pleures pas maman. J'aime pas quand tu pleures.

- Pardon ... Je suis désolée.

- C'est rien. Je vais chez Mamy Mia. Fais attention à toi d'ac ?

- D'ac. C'est promis.

- Et comme demain j'ai seize ans, je pourrais chercher du travail pour t'aider.