Brûler.

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Ce matin, le jour se levait tout juste, le ciel n'avait à peine eu le temps de se colorer vaguement qu'elle était déjà bien réveillée. Elle venait tout juste de sortir de son lit et décida simplement de passer une partie de la matinée ainsi, seule avec d'encombrantes et désagréables pensées, observant le soleil commencer son éternel même trajet dans le ciel illuminant lentement sa chambre d'une teinte orangée lui étant propre. Elle avait l'impression de ne jamais avoir aussi mal dormi que cette semaine, comme si on l'avait forcé à garder les yeux ouverts pendant des semaines sans interruptions, elle se sentait émotionnellement épuisée alors qu'elle avait conscience que c'était le pire moment pour l'être. Le simple fait pour elle de s'avouer son état émotionnel montrait bien l'importance du problème. En effet, en temps normal, elle se serait une énième fois voilée la face et aurait évitée une lourde conversation avec sa conscience.

Le camp d'été commençait dans à peine plus d'une heure et bien qu'elle ait pris l'habitude de manquer de sommeil dès son plus jeune âge, aujourd'hui, elle avait conscience d'avoir besoin de toute son énergie et sa concentration. Il fallait dire que les derniers jours, les dernières semaines même, avaient été plutôt compliquées à gérer. N'importe qui la connaissant un minimum pouvait dire qu'elle n'avait jamais été le genre de personne qui exprimait ses sentiments ou même qui ressentait beaucoup de choses. Tout ce qui pouvait se produire en elle à l'heure actuelle - et les Dieux savaient qu'ils s'en passaient des choses - personne n'en avait aucune idée alors qu'elle même essayait vainement de l'ignorer, vainement car elle avait beau tenter de l'ignorer, de penser à autre chose ou de se focaliser sur n'importe quel autre sujet aussi inintéressant soit il, rien ne fonctionnait, elle ne pensait toujours qu'à lui. La vérité, elle n'avait aucune idée de comment l'interpréter ou le vivre. Mais plus important, elle ne pouvait pas l'exprimer. Elle avait comme l'impression de brûler de l'intérieur, comme si un gigantesque bûcher avait été allumé dans son for intérieur, son esprit la rendant coupable et la punissant pour avoir commis un crime des plus odieux : s'être approchée de trop près de lui. Et lui, il pouvait alimenter le feu aussi bien qu'il pouvait l'éteindre. Toutes ces émotions, tous ces sentiments, ils étaient impossibles à décrire à voix haute. Se l'évoquer seulement dans sa tête ou même juste reconnaître l'existence de ces émotions était une véritable torture.

Malgré tout, malgré son esprit qui sans cesse la suppliait d'arrêter, elle ne pouvait s'empêcher d'avoir cette belle impression, ce beau espoir d'être plus vivante qu'avant, mais qu'une nouvelle crainte tel un nuage noir menaçant un ciel bleu avait pris la place des anciennes. Une crainte certes bien moins dramatique mais qui d'une certaine manière trouvait toujours le moyen de la paralyser. Cette crainte, elle portait la forme d'un gigantesque cyclone dont elle avait parfaitement conscience qu'il détruirait tout mais qu'elle laissait tout de même faire. Un cyclone qu'elle laissait s'approcher, qu'elle laissait la toucher, l'embrasser, soit par bêtise, espérant qu'il l'épargnerait, elle, seulement elle, soit pas orgueil, pensant qu'elle était capable de l'en empêcher et de changer sa nature. De ce cyclone émergeait un visage, un visage familier dont elle avait eu l'occasion de dessiner les traits à maintes reprises. Ce visage, elle le connaissait sur le bout des doigts, une simple tignasse blonde reposant sur une tête à l'air toujours mécontent et insensible.
Au final, il avait soulagé ses peurs et en avait créé des nouvelles par la même occasion. Cependant, malgré toutes ses craintes, elle avait toujours l'envie irrépressible de le toucher encore un peu plus chaque jour, jusqu'à finalement atteindre complètement son esprit. C'était à se demander ce qui pouvait bien la pousser à agir de la sorte, plus elle s'approchait, plus elle se brûlait, un jour, il ne resterait plus rien d'elle, seulement un amas de cendre mais elle continuait toujours.

Elle s'était mise en tête un jour - un jour idiot d'ailleurs - de le comprendre, de le découvrir pour de vrai et jusqu'aujourd'hui elle s'accrochait désespérément à cette idée. Cette idée que si elle faisait tout cela, si elle ressentait tout cela, c'était juste pour satisfaire sa curiosité, aller au bout de son idée. Elle semblait encore plus accrochée à cette idée qu'un naufragé à une bouée de sauvetage.
Elle voulait toujours atteindre ses objectifs, toujours être satisfaite d'elle, c'était un fait, tout le monde le savait mais cette fois ci, la situation dépassait de loin ses motivations habituelles et ça, elle en prenait conscience au fil des jours. Mais si tout cela, si cette relation n'était qu'une gigantesque mascarade pour satisfaire une curiosité plus que déplacée, pourquoi est ce que ça la dévorait de l'intérieur au fil des jours ? Pourquoi est ce qu'elle se sentait se consumer comme une simple feuille de papier qu'on aurait décider de détruire par le feu ?
Il n'y avait pas de réponse à ces questions, où plutôt si, il y en avait une et c'était la seule envisageable mais également la plus désagréable : l'amour. Un amour tout juste naissant certes, mais qui pouvait déjà causer des ravages. En voulant savoir qu'est ce qui se cachait vraiment derrière le grand méchant loup, elle avait découvert qu'en réalité il n'était qu'un agneau - un peu bougon - mais un agneau tout de même et elle s'était bêtement laissée toucher.

Cauchemars | Bakugo x ocOù les histoires vivent. Découvrez maintenant