Toc.
Toc.
Toc.La porte s'ouvre sur un monde drapé d'aube.
« Le noble représentant de la gendarmerie de Chamallon-Perrieux. Que puis-je pour te servir ? »
La porte s'ouvre sur l'hiver et sur un policier. Droit, et rasé de près, et tout ce qu'il faut être ! C'est un petit Paon qui s'esclaffe :
« Solène ?
— En chair et en cernes. »La môme hurle la nuit, songe l'Ombre. Même quand elle est tue, c'est ma tête qui hurle. Tout hurle, par ici, c'est plutôt agaçant. Le monde n'a pas de manières !
En face, Arthur Dumont, de son petit nom, grince :
« La maternité te va à ravir. Tu sais, en-dehors de l'intégralité de ton apparence.
— Vil flatteur. »Silence.
Tic et tac.« Dis, qu'est-ce que tu fais là ? Ça fait au moins six mois.
— J'aurais quelques questions à te pos...
— Alors c'est vrai ? Le trou dans le crâne, le meurtre ? On a buté Marie, n'est-ce pas ? »J'ai choqué mon noble fonctionnaire, songe Solène. Visiblement l'enthousiasme n'est pas la bonne réponse face aux meurtres. A noter.
« ... Je vois. Apparemment, les nouvelles vont vite.
— Je possède mes sources, mon cher. »Une source aux yeux-forêts et au sourire de soleil, peut-être.
Ils disent que c'est un meurtre.L'Ombre parle pour s'empêcher de penser :
« Visite professionnelle, donc ? Soyons professionnels. Enchantée, Monsieur l'officier Dumont ! Entrez dans mon humble demeure. »Alors ils marchent. Dans les couloirs tapissés – où les coins se décollent tels des bouts de peau morte –, le salon vide, toujours vide, et bientôt la cuisine – où la bouilloire siffle comme oiseau tombant –. Chaleureux, contemple Solène. Presque autant que moi-même !
Le Paon s'assoit. L'Ombre aussi :
« Tu veux boire quelque chose ? J'ai de la tisane imbuvable ou du lait en poudre.
— Non. Merci. Très aimable.
— ...Est-ce qu'elle a vraiment été assassinée ? Marie, je veux dire.
— En effet, la... thèse de l'homicide semble la plus envisageable. »Solène raille – C'est ce qu'elle appelle rire. Elle ne sait pas vraiment faire autrement. Elle savait, avant. C'est fini. – :
« T'aimes toujours les mots. Plein de mots compliqués pour déguiser la Mort. Quelqu'un l'a butée.
— Toujours aussi subtile. Exactement. Voilà. Dans ta version brutale, quelqu'un l'a butée.
— Un meurtrier à Chamallon-Perrieux. Tellement excitant. »Des visages passent devant la vitre – des ordinaires, des voisins, des peut-être-assassins ! –.
La bouilloire se tait. Solène reprend :
« Ils ont raison, les gens qui bourdonnent dehors ? Ils disent qu'on lui a éclaté la cervelle.
— ...C'est vrai. L'arme n'a pas été trouvée. »Je pensais que Marie mourrait de solitude, songe Solène. Mais non ! Le monde est plein de surprises ! On lui a éclaté le crâne, on lui a éclaté l'âme. Tellement excitant, oui. Palpitant.
« Et la balle ?
— Fondue. »Le reste aussi, je suppose, rêve l'Ombre. Avalé par les flammes et transformé en boue de chair. Fondu, également. Tout, tout fondu ! ...Fondue, Marie.
« Et pour...
— Ce n'est pas pour ça que je suis ici, Solène.
— Je... Pourquoi, alors ?
— L'enfant. »Pourquoi l'enfant ? sursaute Solène. L'enfant, l'enfant... mon enfant ?
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La Silencieuse
Romance"Ils disent que c'est un meurtre." La tasse entre les doigts resserrés de Lili tremble comme un volcan. Et le rire de Solène s'étrangle dans l'air chaud. Mais tout va bien, toujours. (Solène est terrifiée. Du meurtrier, oui ! des ombres, aussi... m...