Revoir Sarah m'a fait un bien fou, c'est comme si elle avait fait doubler ma dose de vitalité. C'est comme si elle m'avait permis de revivre, de renaître.
Dans le car scolaire, la musique sur les oreilles, je sens mon cœur se remplir de bonheur aux simples souvenirs de ce week-end. Peut-être est-ce aussi l'effet de la musique ? J'écoute cette chanson depuis le début du trajet. J'adore cette musique. Et je m'en fous si les gens la trouvent trop romantique, trop ci ou ça.
Le bus s'arrête, on vient d'arriver sur le parking du lycée. Comme toujours, j'attends que tout le monde soit sorti pour m'engager dans le couloir. L'année dernière encore, les gens me laissaient passer, comme si j'étais une princesse. Cette année, hormis quand je suis avec Julie et les autres, personne ne me remarque.
Il faudrait peut-être que je parle à Julie de la possibilité de quitter le groupe des pestes... Oui c'est décidé, je vais lui en parler, et si elle ne me suit pas, et bien je resterais seule.
De toute manière, je ne suis pas à recycler et j'ai compris depuis longtemps que ma date de péremption était arrivée.
Je pose le pied par terre et je sens des regards se poser sur moi. Autrefois on m'admirait. Ensuite, on ne me voyait plus. Et désormais, je découvre avec horreur que je suis devenue l'animal de foire que l'on ne sait pas vraiment dans quelle catégorie classer. Les gens n'ont sûrement pas dû oublier l'épisode de vendredi et c'est probablement pour cette raison que les lycéens me regardent.
Je me sens étouffer dans mon jean gris et tout en passant les mains sur mes cuisses, j'avance en essayant d'oublier les regards des gens.
Lorsque je me retrouve devant le portail, j'entends des rires et des filles me regardent. Je ravale ma salive et fais comme si je n'avais rien remarqué. Les moqueries continuent. Une des filles me regarde longuement puis pouffe sans se cacher. Mon cœur se serre et mon ventre se contracte. Je sens mes nausées me rattraper. Non, pas encore.
─ Va faire chier d'autre personne !
Je sens une main se poser dans mon dos et on me fait avancer. Tout en faisant des petits saccadés, je passe le portail. Les gens ne regardent plus seulement moi, mais nous.
Une fois dans l'enceinte du lycée, Gabriel retire sa main de dans mon dos et je me retourne. Je remarque ainsi qu'il regarde sur la gauche. J'en profite pour réajuster mon sac qui commençait à se faire la malle.
─ Merci.
Gabriel tourne enfin la tête vers moi. Je remarque aussitôt qu'il a des cernes horribles. On dirait qu'il n'a pas dormi de la nuit. Le châtain m'offre une sorte de sourire, déformé par la fatigue. Je m'apprête à sourire moi aussi quand je me rappelle l'épisode de Facebook. Je ne lui ai même pas répondu et il vient me secourir ce matin.
Qu'est-ce qui cloche chez lui ?
─ Je ne t'ai pas répondu.
Et j'aurais dû réfléchir à ce que j'allais dire ensuite. Parce que désormais qu'il me regarde, je sens tous mes mots s'évaporer. Il attend une réponse. Mince alors ! Il doit se demander de quoi je parle non ?
─ En effet, répond-il calmement.
Je me gratte la tête, puis range mes cheveux derrière mes oreilles. Qu'est-ce que je vais bien pouvoir dire maintenant ?
Je me tripote les doigts, je passe ma main sur mon ventre, puis à nouveau je m'aplatis les cheveux. C'est nerveux. Je le sais. Il faudrait peut-être que je consulte. Car je crois que ces gestes que je répète dès que mon cœur bat trop vite et que mes oreilles bourdonnent, deviennent des tics. Peut-être même des tics maladifs.
VOUS LISEZ
Les écorchés - Tome 1 : Protection (55/66 chapitres)
Novela JuvenilLa vie de Gabriel Bruges est compliquée. Derrière son allure de punk gentil, Gabriel est un grand frère, un adolescent, un lycéen, un travailleur et un père à ses heures perdues. Alors autant dire qu'il a du mal à tout gérer. Charline Girard n'est...