34 - CHARLINE

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Un mercredi de novembre :

Après la frayeur du mardi soir, mes parents ont été assez silencieux. Ma mère surtout, a remercié Gabriel pour son aide dans la recherche de Nora. Ensuite, mon beau chevalier servant a mis les voiles. Parce que nous étions observés par mon père, Gabriel a timidement déposé un baiser sur ma joue avant de grimper sur sa moto et partir à folle allure.

Pour le coup, il a complètement détruit mon discours concernant sa conduite prudente. Et je crois que je peux dès lors dire adieu à de prochaines balades sur deux roues. Du moins si mon père est au courant...

Autant vous dire que le dîner a été tendu. Nora fixait son assiette d'un air absent, mes parents semblaient sur le point de faire une crise cardiaque à chaque fois que des couverts se touchaient, quant à moi, je n'arrivais pas à entendre autre chose que la souffrance que leur annonce avait procuré, quelques heures plus tôt.

Et même un jour après, je sens mon cœur lourd et mon ventre se tordre. Peut-être aussi que le fait de ne pas avoir vu Gabriel ce matin ajoute du poids. D'habitude, je l'aperçois au moins sur le parking et soit lui, soit moi allons voir l'autre. Seulement à mon arrivée, il n'y avait pas la bande. Eh oui, je n'ai pas vu sa coiffure atypique, ni même sa boucle de rebelle, ou son sourire à faire fondre la banquise et encore moins ses yeux si tendres.

D'ailleurs en parlant de troupe... Malgré mon interdiction de sortie, j'ai tout de même le droit d'aller voir Julie. Julie qui n'a toujours pas repris les cours et qui me manque. J'apprends jour après jour à apprécier Mélodie, mais Julie reste tout de même celle avec qui j'ai découvert les pyjamas party. Celle à qui je me suis confiée. Celle qui m'a toujours dit être là pour moi. Celle qui pas plus tard que cet été, trouvait les bons mots pour me faire sortir de ma grotte.

— Bonjour Charline, me salue sa mère tandis que j'entre dans le couloir de leur maison.

Comme toujours, il y a une senteur florale dans la demeure. La mère de mon amie adore cette odeur et elle met des désodorisants pour maison à chaque coins des pièces.

— Bonjour Hélène, Julie est là ?

C'est une question bête. Où pourrait être celle qui ne sort plus de sa chambre ? Seulement je crois que c'est devenu une habitude à force. C'est la phrase d'introduction quand je vois Hélène...

— Oui, elle est dans sa chambre.

— Super, merci ! Je lui apporte les cours, continué-je dans un sourire que je veux sympathique.

Ça se voit aux yeux de sa mère, elle est déchirée de voir sa fille dans cet état. Alors le moins que l'on puisse faire, c'est donner l'impression d'une visite banale.

— Il y a Julien aussi, m'apprend Hélène tandis que je quitte la cuisine pour continuer ma progression dans le couloir.

J'ai déjà croisé Julien. Oui, le mot est juste : je l'ai "croisé". En fait, je sais juste que Julie l'aime bien et que celui-ci vient lui rendre visite. Après, lui et moi, nous n'avons jamais beaucoup parlé. Peut-être allons-nous devoir le faire aujourd'hui ?

Je toque à la porte sur laquelle une pancarte "ne pas déranger" est accrochée et j'entre doucement dans la chambre. Je m'apprête à dire que c'est moi, lorsque je réalise qu'avec la musique en arrière fond, ni Julie ni Julien ne m'a entendue entrer.

—  Comme d'ab, la nourriture est dégueulasse au self, lance Julien qui me tourne le dos. Tu ne rates pas grand-chose. Ah si, tu sais la meuf de la bibliothèque, apparemment un motard lui est rentré dedans hier.

Mon cœur s'emballe soudainement en pensant à Gabriel.

— Ça a fait un raffut à midi, je te jure !

Les écorchés - Tome 1 : Protection (55/66 chapitres)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant