Chapitre 15

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2008


C'est la première fois que je mets les pieds à la gare du village, et ça n'a rien à voir avec celle à côté de ma ville. Je suis un peu nerveux à l'idée de revoir Valerio, parce que la dernière fois qu'on s'est vus je me sentais carrément bizarre.

Mais bon, le temps a passé depuis et tout va pour le mieux. Plus que nerveux, je suis surtout impatient de le retrouver pour cet ultime été avant...

Avant le saut dans le grand bain, je suppose.

Mes parents m'ont prêté leur voiture pour venir le récupérer ici, comme j'ai eu mon permis au printemps. Adossé à la carrosserie, je regarde l'heure sur mon téléphone en guettant l'arrivée de son train. On pourrait croire que c'est calme, ici, comme on est en rase campagne, mais il y a tellement de monde que c'est presque indécent vue la taille de la gare.

Je ne suis visiblement pas le seul à venir chercher quelqu'un. Ici, on est plutôt dans le sens des arrivées que des départs.

C'est le premier week-end des vacances scolaires, les résultats du bac sont tombés hier et on a pris la route dès que j'ai su que j'avais le mien. Val aussi a réussi ses examens, il a même eu une mention ce saligaud. Mais ça n'a rien d'étonnant, il a toujours été plus intelligent que moi.

Et s'il m'entendait, il me frapperait derrière la tête en me corrigeant : « Pas plus intelligent, plus impliqué ! »

Les gens commencent à s'agiter sur le quai, et je devine que le train ne va pas tarder à arriver. Tendant l'oreille, j'entends le roulement de la locomotive sur les rails et saute sur mes pieds pour m'approcher à mon tour. Je n'ai aucune idée du nombre de valises que Valerio a emmené, seulement qu'il n'a pas pu prendre son vélo. Mais je lui ai dit que de toute façon ce n'était pas grave car on pourrait bouger avec la voiture de mes parents.

Le vieil Intercités entre en gare, et je lève le menton pour tenter d'apercevoir la chevelure flamboyante de mon ami. Je crois qu'il est resté au rouge depuis l'an dernier. Enfin, auburn. Ou bordeaux peut-être ? Bref, en tout cas c'est grave stylé.

Je relève mes lunettes de soleil pour y voir plus clair, et le vois me faire des grands signes par l'une des fenêtres. Je ne peux pas m'empêcher de sourire comme un idiot, et lui réponds. Bordel, je suis tellement content de le retrouver !

Je trépigne d'impatience tandis que les familles se déversent des wagons – bien trop lentement à mon goût – et me balance d'avant en arrière pour tenter de contenir mon agitation. Enfin, un gros sac militaire précède Valerio, qui saute sur le quai en enfonçant une casquette sur sa tête. Il sourit largement en m'apercevant, et fait basculer son bagage sur son épaule tandis que je trottine vers lui.

— Salut BG !

— Comment ça va mon BG ? me demande-t-il en me serrant dans ses bras.

— Je suis trop content de te voir !

Il me relâche et me détaille des pieds à la tête en gloussant.

— Même par quarante degrés, tu lâches jamais tes chaussettes de foot ! T'es incroyable, toi.

J'agite mon pied droit, chaussé d'une tennis blanche.

— Ma mère voulait pas que je conduise en tongs.

— Tu m'étonnes, ce serait con d'avoir un accident maintenant.

Je déverrouille la Peugeot, et ouvre le coffre pour que Valerio puisse y mettre son sac.

W [EN PAUSE] Où les histoires vivent. Découvrez maintenant