Chapitre 33

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Achevez-moi ici et maintenant. Par pitié.

Jouer un match de football avec Valerio aujourd'hui est une véritable torture. Premièrement, parce que je ne me suis toujours pas remis de mon rêve d'hier matin. Deuxièmement, parce qu'il porte ma tenue du club. Et troisièmement, parce qu'il fait une chaleur de connard et qu'il n'arrête pas de s'essuyer le front avec le bas de son maillot. Enfin, le mien, du coup.

Et que l'addition de ces trois points est la foutue raison pour laquelle je joue comme un pied aujourd'hui. Je ne suis pas concentré.

— Putain ! juré-je après avoir tiré un penalty merdique.

— Pas de gros mots ! me dispute Veronica depuis la bordure du terrain.

— Pardon, grommelé-je.

Val arrive en trottinant vers moi, l'air soucieux.

— Qu'est-ce que tu branles ? me demande-t-il.

Je manque de m'étouffer.

— T'es dans le mal depuis hier, enchaîne-t-il.

— Mais non, nié-je, sur la défensive.

L'arbitre – enfin, l'animateur – siffle et Valerio retourne en défense. Qu'il reste derrière moi, ouais. D'un côté je me sens mal de le tenir pour responsable de mon état chelou, de l'autre je ne vois pas du tout comment gérer ça calmement.

Lundi soir, au bord du lac, on a évoqué l'épineuse question du sexe. La douloureuse, honteuse même. J'étais super gêné de lui confier que je n'étais pas en chien comme tous mes potes du lycée, et vraiment rassuré de savoir qu'il ne me jugeait pas sur ça.

D'ailleurs, il n'a même pas vraiment répondu à ma question, ce petit enfoiré. « Amoureux de mon miroir » non mais ces quoi ces conneries. J'en ai oublié d'exiger une vraie réponse, alors que je lui ai ouvert mon cœur après tout.

Et maintenant quoi ? Je rêve de lui ? De ça ? Pas étonnant que je ne sois bon à rien depuis vingt-quatre heures. Surtout depuis ce matin, alors qu'il se pavane dans mes fringues.

Aaargh. Tout ça n'a aucun sens.

Heureusement, on a quand même une bonne équipe et on mène de deux buts. Valerio pensait que tout dépendrait de moi parce que je suis bon, mais c'est faux. Il y a un gamin de treize ans qui est très bon en dribble, entre autres, et même en jouant comme une savate je ne suis pas en train de nous faire perdre.

Quelques minutes seulement après la reprise du jeu, je tente une percée de la défense adverse pour essayer de marquer à mon tour, et du coin de l'œil j'aperçois les gosses du club ado qui m'encouragent, dont Nadia. Bordel, elle est vraiment partout.

Je tire, juste avant de réaliser que je suis allé trop loin et que ce sera un...

— Coup franc ! beugle Michael.

— Vas-y, là... pesté-je. Tsss.

Les poings sur les hanches, je souffle. Je m'exaspère aujourd'hui, si mon entraîneur me voyait, il me renverrait direct sur le banc de touche. Deux mains s'abattent fermement sur mes épaules, et je sursaute.

— Val, me dit Valerio très sérieusement. T'es à l'ouest, aujourd'hui.

— Je sais, grogné-je, sans pour autant chercher à ôter ses mains.

Il me masse gentiment les épaules pour me motiver, et ça me tend et me détend à la fois. Ça me gave.

— Pense au resto, là. Petit repas des familles offert par le camping.

W [EN PAUSE] Où les histoires vivent. Découvrez maintenant