Chapitre 77

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Je me fais chier comme un rat mort.

Qu'est-ce que je vais bien pouvoir faire de mes journées, tout seul au bungalow ? J'ai pas le droit de sortir, Valerio bosse jusqu'à dix-huit heures, et l'ambiance avec mes parents est carrément gênante. Ils étaient là quand Brenda est venue me dire que je n'aurais pas de problème tant que je me tiendrais à carreau. Elle n'a pas parlé explicitement de la raison de « coup de sang » mais j'ai très bien compris. Et je crois que ma mère fait la gueule depuis tout à l'heure.

D'un côté, j'ai envie de lui dire, parce que je sais au fond de moi qu'elle comprendrait. M'excuser, sans doute pas, mais au moins comprendre...

Mais de l'autre... Valerio a tort, je ne suis pas si serein que ça.

Couché sur la banquette du séjour, je fixe la même case de ma grille de sudoku depuis cinq bonnes minutes, incapable de savoir quel chiffre inscrire dedans. Ma mère est en train de boire son café de l'après-midi sur la terrasse, et je ne peux pas m'empêcher de l'épier. Je suis sûr qu'elle attend que je crache le morceau, elle fait semblant d'être naturelle mais je sais qu'elle sait que je me débats intérieurement.

Papa est allé jouer à la pétanque avec Francis et d'autres voisins, et je suis déjà un peu soulagé de ne pas l'avoir sur le dos aussi. Je tente de me concentrer, et gribouille un 8 dans la case avant de lever un œil vers ma mère. C'est à son tour de me fixer.

— Valentin, est-ce qu'on peut parler ?

Je soupire théâtralement en refermant le magazine de jeux.

— Ouais...

Elle fait râcler sa chaise en plastique sur les lattes en bois, et vient me rejoindre à l'intérieur avec sa tasse vide qu'elle dépose dans l'évier. Oui car puisque je n'ai pas le droit de sortir, je décide de camper à l'intérieur.

— Hier soir... J'ai entendu Valerio te dire quelque chose.

Mon sang se glace. Je ne suis vraiment pas serein du tout. Qu'est-ce qu'elle a entendu ? Un truc révélateur sur nous ? L'histoire de ma bagarre au collège ? Quelque chose de pire ?

— Ah, dis-je bêtement.

— Tu sais que je n'écoute pas aux portes. Mais il l'a pratiquement crié en entrant dans ta chambre, et entendre Valerio te demander – elle lève les mains pour mimer des guillemets – ce qu'a fait ce bâtard m'a un petit inquiété.

— Oh.

J'ai l'impression d'être sans arrêt à côté de la plaque.

— Vous connaissiez ce jeune homme ? Vous avez déjà eu des démêlés avec lui ?

— Non, pas du tout.

— Alors pourquoi Valerio avait-il l'air de cautionner ceci ? Est-ce que c'est lui qui t'encourage ?

— Quoi ? Mais n'importe quoi, pas du tout !

Mais qu'est-ce qu'elle raconte, enfin.

— Tu sais, ça m'a toujours profondément agacé que Nadège te considère toujours comme le fauteur de trouble, mais...

— Valerio ne m'a jamais encouragé à faire quoi que ce soit de mal ! S'il a réagi comme ça, c'est parce qu'il me connaît, il sait que je ne m'en serais pas pris à quelqu'un sans raison ! Tu devrais le savoir, non ? Je suis pas un délinquant ! Et Valerio non plus !

— Je n'ai pas dit ça.

— Bah on dirait ! J'en ai marre d'être considéré soit comme un gosse, soit comme une putain de mauvaise fréquentation. Je sais que j'ai pas arrangé mon cas hier, mais je suis majeur et l'année prochaine je serai à la fac à l'autre bout de la France alors j'aimerais bien être enfin considéré comme un adulte !

W [EN PAUSE] Où les histoires vivent. Découvrez maintenant