J'ai décidé de me murer dans le silence dès que ma mère a commencé à insister pour connaître la raison derrière mon acte. L'agression verbale derrière l'agression physique. Mais après avoir essuyé une deuxième sermon plus salé encore que le premier, je suis arrivé à saturation.
Colère, peur, honte, révolte, inquiétude, culpabilité... Après toutes ces fortes émotions, la lassitude s'est installée d'elle-même et je me suis enfermé dans ma chambre sans demander mon reste. Comme l'a souligné papa, je suis majeur. J'ai le droit de ne pas leur rendre de comptes. Je me suis peut-être mis dans la merde, mais c'est ma merde.
Sauf s'ils se sont expulsés du camping à cause de moi. A nouveau, l'incertitude me donne la nausée.
Assis en tailleur sur mon lit, les yeux rivés sur mon téléphone dans l'attente d'une réponse de Valerio, je redresse la tête en entendant frapper vivement à la porte du bungalow. Celle-ci s'ouvre en grinçant doucement.
— Bonjour Paul, il est là Valentin ?
Mon cœur bat un peu plus vite.
— Salut Valerio. Il est dans sa chambre, oui...
— Il faut que je lui parle tout de suite. Je peux entrer ?
Mon père ne répond pas, mais j'entends du bruit dans le salon et quelques instants plus tard, on toque doucement à ma porte.
— Entre, dis-je d'une voix qui ne me ressemble pas.
Elle est ténue, mal-assurée. Pourtant, il m'entend bien car à peine une seconde plus tard, Valerio appuie sur la clenche et referme rapidement derrière lui. Je le dévisage avec appréhension, tandis qu'il reste silencieux quelques instants.
— Qu'est-ce qu'il t'a fait, ce bâtard ?
Je souris faiblement. Il n'y a que Valerio, pour prendre ma défense sans même savoir quelle connerie j'ai fait. Sa confiance me fait oublier ce que je pensais lui dire pour me justifier. Je n'ai jamais à me justifier, avec lui.
Et en un sens, est-ce que c'est une si bonne chose ? Valerio est tellement persuadé que je suis quelqu'un de bien, qu'il ne me demande pas pourquoi j'ai frappé un type, mais ce qu'a fait ce type pour mériter que je le frappe. Et moi, je ne suis tellement pas quelqu'un de bien, que je frappe les gens.
Ce que je croyais juste jusqu'à présent me semble désormais méprisable.
— Valentino...
Son inquiétude se mue en tristesse, et il fond sur moi pour me prendre dans ses bras et nous allonger sur le lit. Je ne m'étais même pas rendu compte que ma mâchoire s'était mise à trembler.
Son front contre le mien, et ses bras enroulés autour de ma nuque, il ne dit plus un mot et moi non plus. Je ne sais même pas ce qu'il sait de ce qui s'est passé cet après-midi au minigolf.
— Elle t'a dit quoi, Lola ? demandé-je dans un souffle.
— Ben t'a vu choper un client par le col et lui coller ton poing dans la figure. Apparemment, c'était quelque chose.
— Ouais... C'était peut-être pas très intelligent.
— C'était qui ?
— Je sais pas, je connais pas son nom. Mais c'est un gros connard.
— Il a fait quoi ?
Si j'ai refusé d'entrer dans les détails avec mes parents, je ne vais encore moins le faire avec Valerio. Il n'a pas besoin de savoir que des gros cons homophobes l'ont insulté, au sein même du camping où il séjourne et travail. Ça lui ferait trop de mal.
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W [EN PAUSE]
RomanceBienvenue au camping « À la belle étoile » Ce panneau, Valentin l'a déjà vu un million de fois. En exagérant à peine. Chaque année, c'est là-bas qu'il se rend avec ses parents, où ces derniers ont acheté un mobil home pour goûter la tranquillité de...