— Bah alors tête de cul, toujours la tête dans le cul ?
Je lève le nez de mon bol de céréales, pas perturbé par l'arrivée fracassante de ma cousine. Quand on s'est levés avec Valerio, mes parents étaient déjà partis à la gare. Celui-ci se dévisse le cou pour la saluer. Se tenant dans l'encadrement de la porte d'entrée, elle lui fait coucou.
— Salut Laura !
— Ça va ? Eulo, mais t'as les cheveux rouges.
— C'est du bordeaux.
Valerio passion corriger tout le monde sur tout.
Elle pénètre dans le mobil home avec sa grosse valise LuluCastagnette, suivie de ma mère qui fronce les sourcils.
— Vous n'êtes pas encore lavés ? Vous avez fait le lit ?
— Mamaaan, on vient de se lever. On va le faire après.
Laura tire la chaise à côté de Valerio, et s'assoit avec nous, avant de nous regarder à tour de rôle.
— C'est quoi votre délire ? demande-t-elle en se tapotant le front.
— Une longue histoire, éludé-je en souriant à Valerio.
— Ouais. Pas du tout intéressante.
— Bon les garçons, on s'active un peu ? Allez mettre vos draps à laver, histoire de ne pas dormir sur un matelas sans rien cette nuit.
Je lève les yeux et finis mes Kelloggs en moins de deux minutes, rapidement suivi par Valerio. On défait les lits de ma chambre, et j'embarque le tout à la laverie pendant qu'il prend sa douche.
Heureusement, le samedi matin il n'y a pas trop de monde aux lave-linges, comme c'est le jour des départs les gens n'ont généralement pas le temps de lancer des machines avant de partir. J'en profite pour observer ma dégaine dans un miroir. Pas fameuse.
J'ai une grosse tâche immonde sur la joue, comme si on avait écrabouillé la limace avec sa chaussure. Ça craint un peu, de se balader comme ça, alors j'appuie sur le distributeur et commence à me savonner le visage. Je ne suis pas pressé de me débarrasser du « Proprietà di VALERIO » encore bien visible sur mon front, alors je le laisse. Ça me fait rire.
Je sais que ce n'est pas très bien d'être possessif envers les gens, mais je n'arrive pas à ne pas l'être avec Valerio. Des fois ça m'inquiète un peu, et je redoute l'année prochaine. Si je suis déjà comme ça en le voyant juste deux mois par an, qu'est-ce que ça va être quand on va vivre ensemble ? Et encore, ce n'est pas le problème le plus grave.
Non, le pire, c'est que j'ai l'impression de l'aimer un peu plus qu'avant... Et si la plupart du temps ça me rend heureux d'être encore plus proche de lui, je ne peux pas m'empêcher de penser que le monde va s'effondrer si je continue de creuser ce qui se passe à l'intérieur de ma tête.
J'en ai mal au ventre. Finalement, je change d'avis et décide d'effacer l'inscription sur mon front. Ce ne sont que des mots, après tout. Les effacer n'enlèvent pas les sentiments qu'il y a derrière. Je suis à lui, même s'il n'y a rien d'autre que de l'amitié dans cette intention. Je ne peux pas contrôler ce que je ressens, mais je peux contrôler ce que je montre à Valerio.
Et je ne peux définitivement pas le laisser penser que quoi que ce soit ait changé pour moi depuis l'été dernier.
Je retourne du côté des machines, et note mentalement la durée du cycle avant de rentrer au bungalow. Dans ma chambre, Valerio est déjà en train de ranger ses affaires dans son sac, et je tire ma valise de sous le lit pour faire de même. Je constate avec un léger soulagement qu'il s'est aussi débarrassé du maquillage. C'est idiot, mais j'avais peur qu'il m'en veuille de l'avoir retiré si lui l'avait laissé. Comme si... je ne sais pas. Je me fais des nœuds au cerveau pour rien.
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W [EN PAUSE]
RomanceBienvenue au camping « À la belle étoile » Ce panneau, Valentin l'a déjà vu un million de fois. En exagérant à peine. Chaque année, c'est là-bas qu'il se rend avec ses parents, où ces derniers ont acheté un mobil home pour goûter la tranquillité de...