18. Symbiose

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Je me réveille dès les premières lueurs de soleil, après une nuit particulièrement agitée. Je ne sais pas si c'est à cause de ce qui s'est passé hier, mais j'ai encore fait un rêve identique à celui de la dernière fois. J'y ait encore vu la mort, cette fois-ci en incarnant directement Rës. Ça n'a pas été une expérience très agréable, mais j'essaie d'écarter le plus possible ces images de mon esprit. J'ai pu assister à de nombreux décès, et voir quelqu'un se faire transpercer de part en part m'a retourné les viscères. Du moins, dans mon rêve. Seulement, ça ne devait pas être inclus dans ce qu'a vécu Rës, car les sensations me sont parues bien moins réalistes.

J'étire mes quatre membres en baillant, dévoilant mes crocs. J'étais trop épuisée pour entamer une transformation avant de m'endormir, aussi, j'ai décidé de rester en boule, sous un buisson. De toute façon, je préfère éviter de recroiser la Leyda. Je laisse mon corps reprendre une apparence bipède et plonge dans la rivière sans prendre le temps de me rhabiller. L'eau détend mes muscles et mon esprit perturbé retrouve quelque peu son calme. Je frotte un peu mes cheveux pour enlever les feuilles mortes et la terre qui se sont invitées dans ma tignasse sans mon autorisation durant la nuit, et mon environnement limpide se trouble quelque peu. Je reste ainsi émergée un bon quart d'heure avant de daigner sortir. Il faut absolument que je règle ce problème de cauchemars qui deviennent vraiment gênants, et ce n'est certainement pas en restant à me lamenter sur mon sort que je vais y arriver.

Je ramasse mes vêtements sommaires après avoir essoré ma tignasse, et prend le chemin inverse de celui que j'ai effectué hier soir. Je ne suis pas très éloignée du village, et j'atteins rapidement l'habitation de Veenyr. Je toque à la porte, comme un réflexe. Même s'il m'a dit que j'étais ici comme chez moi, je ne veux pas être impolie. Comme personne ne me réponds, je pousse la porte et inspecte l'intérieur. Dans mon dos, je sens l'eau qui coule, goutte à goutte, laissant les traces de mon passage. Je secoue une dernière fois la masse grise qui pousse sur mon crâne pour éviter de tout tremper, et je rentre dans la pièce.

Je m'assois sur une des deux chaises et m'affaire à préparer le petit déjeuné comme mon estomac me l'a réclamé. La tâche n'est pas très difficile, et j'ai terminé à l'instant où Veenyr émerge de la chambre. Il me salue, les cheveux en bataille, et tends ses bras en avant pour s'étirer. Dans d'autres circonstances, j'aurais souris, mais je ne m'en sens pas d'humeur.

- Tu as dormi où cette nuit ?

Je hausse les épaules :

- Dehors. Je suis allée me promener et j'étais trop fatiguée pour muter.

Il paraît un peu triste quand je lui dis ça. J'imagine que ça doit être compliqué de ne pas pouvoir changer de forme à volonté. Je me racle la gorge avant de continuer :

- J'ai encore fait un rêve... Tu m'avais dit que tu pourrais m'aider ?

Il s'assoit en face de moi et pose sa main sur la mienne.

- Ça va aller ?

J'acquiesce, mais on sait tous les deux que c'est faux. Il me propose d'essayer de régler le problème juste après manger.

- Il y a autre chose que je voulais savoir, j'annonce en relevant mes pupilles vers les siennes.

Il me m'incite à poursuivre, ce que je fais :

- Est-ce que tu as dit à la Leyda quelque chose à propos de ce qu'il s'est passé en Thaïlande ?

Je baisse les yeux, mal à l'aise. Je ne suis pas en train de l'accuser de quoi que ce soit, mais le fait qu'elle me soupçonne d'être capable d'inciter quelqu'un à parler doit bien venir de quelque part. Et il faut que je comprenne de quoi il s'agit. Il fronce les sourcils, inquiet.

Sul'Een T2: La voie de la sagesseOù les histoires vivent. Découvrez maintenant