Chapitre 5 ~ Deux éclats bleus

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Des cris et des cliquetis me forcèrent à ouvrir les yeux. A sortir de la volupté dont j’étais plongée. Je pris conscience d’avoir mal et du poids sur mon dos. Ma vision, un peu floue, me montra des gravats, des débris… et des pattes.

   — Va voir par-là bas ! cria quelqu’un.

Des pas résonnèrent. L’odeur des lycanthropes me donnait mal à la tête. Je voulus pousser un cri mais n’émit qu’un râle rauque.

   — Oh merde ! elle est vivante ! s’écria un homme.

Des pas précipités m’indiquèrent que quelqu’un venait vers moi. Je voulus crier, me débattre, leur hurler de me laisser tranquille mais je n’en fus pas capable. La douleur me paralysait. Puis, je sentis les pierres bouger dans mon dos. Une par une, il les enleva. Je soupirais lorsque la dernière, celle qui entravait mon dos et qui avait brisé ma colonne vertébrale fut retirée. La douleur était encore là mais si ce lycanthrope décidait de me faire du mal, j’avais la possibilité de me défendre même si j’étais à plat ventre. Sans bouger, j’attendis. S’accroupissant vers moi, il m’attrapa doucement et me retourna. Je ne pus empêcher de crier de douleur.

   — Désolé, s’excusa-t-il d’une voix grave, beaucoup de tes os ont été brisés.

Le soleil commençait son ascension, tintant le ciel d’or et de rose. C’était magnifique et je fus heureuse de mourir sous un aussi beau tableau. La douleur atteignit son paroxysme et j’allais fermer les yeux lorsque je croisais deux éclats. Deux éclats bleus comme des saphirs qui me fixaient. Une vague d’apaisement déferla alors en moi. Sans pouvoir l’empêcher, mes lèvres s’étirèrent en un doux sourire. Mes paupières se fermèrent. J’étais heureuse de mourir devant ces merveilleux éclats qui étaient, désormais, bien plus somptueux que le ciel.

   — Ne meurs pas, entendis-je dans un murmure.

Il me souleva doucement alors que je sombrais dans les ténèbres.

   La faim me réveilla. Mon corps voulait du sang, mon esprit le réclamait comme un enfant réclamerait une friandise à son parent. Je sentais ma chair se refroidir. La douleur de mes os n’était plus qu’une gêne constante. Puis, je pris conscience que j’étais allongé sur un lit moelleux. Et qu’une odeur de fraicheur, et de lycanthrope, flottait dans l’air. J’ouvris doucement les yeux. Le plafond était bleu clair. Remuant les doigts, les bras et tous mes membres un par un, j’essayais de m’asseoir. La priorité à présent était de partir loin, très loin des lycanthropes. Tournant la tête, je faillis crier quand je vis un garçon assis sur le rebord de la fenêtre ouverte, une jambe dehors, l’autre à l’intérieur. Sa tête était penchée en avant et ses cheveux blonds couvraient ses yeux. Sa respiration lente m’indiquait qu’il dormait, du moins, jusqu’à ce que j’entende son cœur battre trop rapidement. Il faisait semblant. Peut-être pour me laisser plus d’espace à mon réveil ? D’ailleurs, depuis combien de temps était-il là ? Je secouais la tête. Peu importe. Je devais partir et il m’offrait la possibilité de partir en douce. La fenêtre était grande ouverte et peu importait le nombre d’étage que comportait cette maison, je sauterais et m’enfuirais. M’approchant tout doucement, j’attrapais le rebord et me préparait à sauter.

   Une main m’attrapa le bras. D’un coup d’œil, je reconnus ses yeux bleus comme des saphirs. Ces deux éclats qui m’avaient prié de ne pas mourir.

   — Tu t’en vas ?

Je sautais en arrière en montrant les crocs. Un feulement rauque s’échappa de ma gorge quand je me mis en position de combat. Il hésita, tant mieux, pensais-je, plus il aurait peur, plus il y avait de chance qu’il me laisse partir sans accroc.

Pour Une Goutte De SangOù les histoires vivent. Découvrez maintenant