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Après le dernier cours du jeudi de la même semaine, il était devenu une habitude pour les deux poètes de se retrouver.

Ainsi étant, ils se trouvaient sur un toit usé d'une maison familiale non connue. L’Aube et le Crépuscule discutaient en regardant les couleurs ocres à rosées, descendre au fil du temps dans le ciel laissant le Clair de Lune s'y mettre et les étoiles, montantes, parsèment délicatement la nappe de Marine.

Ce soir là, Jungkook rayonnait. Il déblatérait sans bégayer, mouvant ses pupilles noisettes joyeusement, un sourire ornait ses jolies lèvres couleur incarnat. Il était de coton, il ne brûlait plus.
Et là, tenant sa frêle main, Taehyung regardait son Crépuscule parler, pressant doucement sa main par moment.
Ils sont la, et ils s’aiment. Ils se touchent, ils diffusent la chaleur corporelle de l'autre.
Sous le ciel d'une ville endormie, lumière allumées, cœurs rehaussés, ils étaient là.

.

Le vendredi suivant, L’Aube n’était pas apparu. Pas une seule fois, ni un message, ni un signe. Juste le néant, laissant un Crépuscule inquiet, seul.
Cela dura exactement 8 jours avant que le Crépuscule ne décide d'aller voir son bien aimé. Il était fatigué, à nerf. En 8 jours, il était devenu le Palais des Plaies.
 

Pourquoi ça faisait si mal ? 

 
Il craqua sur l’entrée de son Aube endormie, retint un sanglot brûlant dans sa gorge serrée.
Délivrant finalement la pression sur sa trachée épuisée en un hoquet douloureux, plaquant violemment ses deux mains tremblantes sur son visage, ses genoux lâchant.
Ses épaules emplies de spasmes, hoquetant à plein poumons n’en pouvant plus de retenir son atroce  gémissement de douleur.
C’était l'orage dans l'air, l'orage sur l’entrée de l’Aube assise derrière cette même entrée en écoutant silencieusement son amour souffrir.
Jungkook frappa violemment la porte, aussi fort que possible. Il hurlait à plein poumons entre deux sanglots, il s’épuisait mais rien ne pouvait arrêter la rage qu’il empruntait.

19h56.

20h43.

21h34.

00h12.

04h08.

Et dans un dernier soupir, il fit ;

« Je T’aime. »

Avant de s’assoupir, laissant L’Aube et ses larmes muettes, seuls.

Ce que Jungkook ne savait pas, était que aux aurores, l’Aube meurtrie était sortie trouvant son ange endormit, le portant jusqu’à sa demeure, effaçant toutes traces de son passage, priant pour qu’il oublie la nuit passée.
 
En une dernière larme, il déposa un baiser sur le front rougit du Crépuscule et s’en alla, reposant dans un mutisme obsessionnel.
 

.

Cela dura encore une semaine.

Une semaine durant laquelle le Palais de Plaies prenait en pouvoir, menaçant de faire perdre son Roi. Une semaine durant laquelle Le Crépuscule perdait espoir, pleurant sur la même entrée, les jours se ressemblants tous. Si il était un bateau, il n’oserait plus voguer.
Une semaine durant laquelle le Crépuscule était transporté par L’Aube fragile. Tout était rythmé sur de lourdes respirations, de longs sanglots et de paumes meurtries.
Tout était abîmé, le nacre ne scintille plus, le satin n’est que rêche.
 
Il doutait, il savait que parfois, ça pouvait être l'ultime salutation.
Et le Clair de Lune souhaiterait plus que tout au  monde voir le Crépuscule, me réveiller à 4h pour lui montrer, que l’Aube est là.
 

.
 

Et encore un soir, sous le seuil de la porte. Mais cette fois, il ne s’endort pas. Les yeux écarquillés, comme traumatisés, et il appuyait son front contre ses genoux, le dos contre la porte comme pour à jamais close.
Et aujourd’hui encore, l’Aube ouvrit la porte pensant que son amour était endormit.
Et comme si Jungkook sentait son geste, il ferma les yeux feignant le sommeil. Se sentant  soulever il dut retenir ses muscles de se contractés, se laissant bercer par l’odeur de cerise caractéristique de Taehyung. N'osant pas ouvrir les yeux, il devina facilement qu'il était porté comme on porterait un enfant en bas âge, cette pensée lui fit retenir un sourire. Même blessé, même meurtrie, l’Aube tenait à son amour. Et en y pensant, il y retrouve espoir.
Lorsqu’il fut finalement dans ses draps, habillé, il ne put s’empêcher de murmurer un « Je T’aime » en sentant une paire de lèvres gercées sur sa fine peau.
 

Et cela dura.

Jusqu’à l’apogée de décembre,  une vingtaine de jours avant la nouvelle année.
Et cela était la goûte de trop. Jungkook était fatiguée, le Palais des Plaies ne lui laissait plus de repos.



C’est une putain de monarchie.
 


Et il craqua.
Assénant de violents coups sur la porte en bois, manquant de la briser, il hurlait. Sous le coups de 4h, malgré la peur d’autrui. Rien. Pas un bruit, un signe, une lumière. Il continuait de crier, réveillant même les quelques félins endormis sur le bas côté de la route.

«  Tu m'entends ! C’est juste putain d’authentique ! J’ai tout essayé Taehyung ! Tout ! » hurlait la Colère.

Et il pleura, laissant place à la Résonance qui s’écroule inerte face au silence de l’écho. Il était à genoux, implorant le Ciel de réveiller son Aube. Puis, sans crier gare. La porte s'ouvrit dans un grincement, une clé grattant la serrure. Et le Crépuscule revoyait son Aube, manquant de lâcher un hoquet de stupéfaction à la vue qui s’offrait à lui. À la vue d'une peau terne, trop frêle pour une juste frêle, trop pâle pour être légèrement pâle, trop vide. Son regard d’écorce était terne, vide, reflétant un clair de lune larmoyant dans ses pupilles démunies.

Même pupilles qui se remplissaient instantanément de larmes cristallines à la vue du visage Crépuscule noyé de larmes rougeâtres. Sans même réfléchir, ils s'enlacent, répétant encore et toujours les mêmes excuses, comme un disque rayé,  se serrant jusqu’à plus d'air, jusqu’à assoupir l'assaut du Palais des Plaies. Ils s’embrassent, encore et encore, à genoux dans le froid d’une nuit de décembre. Les mains de l'Aube caressant les courbes du Crépuscule, lui causant de violents frissons du à la perte de l'habitude. Plus rien ne comptait, mise à part la chaleur des deux croissants qui s'enlacent sous la larme de Lune, leurs mains redecouvrants l'autre, sous l’orage dormant enfin.
 

.
 

Sans bruit, sous le miroir des lacs profonds et calmes,
Le cygne chasse l’onde avec ses larges palmes,
Et glisse. Le duvet de ses flancs est pareil
À des neiges d’avril qui croulent au soleil ;
Mais, ferme et d’un blanc mat, vibrant sous le zéphire,
Sa grande aile l’entraîne ainsi qu’un lent navire.
Il dresse son beau col au-dessus des roseaux,
Le plonge, le promène allongé sur les eaux,
Le courbe gracieux comme un profil d’acanthe,
Et cache son bec noir dans sa gorge éclatante.
Tantôt le long des pins, séjour d’ombre et de paix,
Il serpente, et laissant les herbages épais
Traîner derrière lui comme une chevelure,
Il va d’une tardive et languissante allure ;
La grotte où le poète écoute ce qu’il sent,
Et la source qui pleure un éternel absent,
Lui plaisent : il y rôde ; une feuille de saule
En silence tombée effleure son épaule ;
Tantôt il pousse au large, et, loin du bois obscur,
 

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C’est l’histoire de deux poètes, qui ne vivent pas tellement dans une fiction.
 
 
 

𝐒𝐇𝐀𝐃𝐎𝐖 [ᴋᴛʜ+ᴊᴊᴋ] RÉÉCRITUREOù les histoires vivent. Découvrez maintenant