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La pluie heurtait les vitres usées du bus, tremblant. Dehors, elle s'abattait sur les carreaux des pavillons, traçant de fines coulées grisâtres sur la peinture rosée. La rouille coulée ornait les tuyauterie, d'un marron orangé.

Le ciel grondait bruyamment, s’accordant aux pas des piétons pressés, à la course contre la montre. Le gris anthracite ne cessait de ternir doucement les nuages, créant une atmosphère maussade. Les nuages sont blancs. Ils se dilapident. Ils sont fins. Comme du sable, tellement clair, qu’on croirait du sucre. Taehyung était assit au coin du bus, accoudé à la fenêtre, sa tête reposant sur l’épaule de son cadet qui remuait, vibrait doucement  au fur et à mesure qu’il débitait rapidement un résumé, bien que très détaillé, de son excursion en campagne du week-end précédent.
 
« Et c’est comme ça qu’elles m’ont frappés ! Non mais, sérieusement, comment pouvais-je savoir que je ne devais pas caresser le chat ? Ce n’est qu’un chat ! » finit-il par dire, non sans rigoler malgré ses sourcils froncés face à l’air moqueur de son aîné.
 
Jungkook sourit, car Taehyung sourit.
L’Aube pose le dos de sa main contre la joue pouponne du Crépuscule, elle est gelée et laisse une trace rougeâtre, rosée, sur sa peau immaculée. Il sursaute, et éclate d’un rire cristallin en faisait mine d’être frigorifié.
L’un est rouge de froid, l’autre est rose d’amour.
Ils sont, roses d’amour.
 
Parfois ils se parlent, la plupart du temps, non. Et c’est sûrement très bien comme ça, et c’est certainement plus beau comme ça.

Le bruit gronde autour d’eux,  comme de la lave à son point d’ébullition, au sommet de sa chaleur. Le grondement ne cesse pas réellement, mais il se tait un instant, juste le temps de se connecter , sondant les pupilles sombres. C’est Jungkook qui le regarde en premier, car il aimerait se noyer dans ses prunelles noisettes. Taehyung regarde le paysage urbain défiler, avant de lever la tête, reniflant, et se connecte à ses jumelles.

Ils se trouvent beaux, ensembles.
 

Le bus freine, s’immobilise avec brutalité et ouvre ses portes en un claquement. Les élèves descendent par dizaines, faisant face au froid et fin d’hiver. Le soleil commençait à monter dans le ciel, lentement, éblouissant.

C’est L’Empire des Lumières.

Les doigts enlacés, les amants marchaient silencieusement, un léger sourire sur le visage. Le vent balayait les dernières feuilles mortes, laissant bientôt place aux bourgeons de printemps.
La sonnerie retentit vite, les élèves grondait bruyamment dans les escaliers en béton blanc mouillé, avant de rejoindre leur salle.
Une dernière accolade, un au revoir discret et un baiser sur le front.

À 8h00 , La journée commença.

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« La mise en scène photographique est une étape subtile et décisive dans la transmission du récit. Elle concerne les choix d'angle de vue, de cadrage, les questions de l'espace et du temps, la composition dans l'image la planche ou la page, le rapport texte à image… »

Jungkook écoutait d’une oreille distraite en regardant par la fenêtre, maintenant sa tête avec la paume de sa main, battant des paupières. Non pas que ses cours d’histoire de l’art ne l’intéressait pas, mais la fatigue finissait par reprendre le dessus.

«…diversifiées afin de permettre à la personnalité de l’auteur de s’exprimer sans mimétisme, librement. Un peu de concentration, je vous prie.  Enfin, il s'agira à terme d'élaborer une vraie réappropriation de codes, graphiques comme narratifs, visant à l’élaboration d’une écriture personnelle. Pour la semaine prochaine, inspirez vous d’une photographie afin d’en sortir un texte ainsi qu’une illustration. »

Les élèves répondait calmement, d’un « Oui » monotone. Le professeur d’art hocha lentement la tête avant de s’éclaircir la voix :

« Veuillez à ne pas oublier votre projet d’art évoqué au début du trimestre, en binôme, qui comptera pour 60% de votre moyenne dans ma matière. »

𝐒𝐇𝐀𝐃𝐎𝐖 [ᴋᴛʜ+ᴊᴊᴋ] RÉÉCRITUREOù les histoires vivent. Découvrez maintenant