Un Noël sous la neige

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Je regarde à la fenêtre, l'air dépité. L'Irlande connaît son épisode neigeux le plus impressionnant depuis des années, et les rues sont recouvertes de poudreuse blanche. En temps normaux, j'en serais heureux, puisqu'il me rappelle un délicieux souvenir plus tôt dans le mois, où je me suis battu dans la neige avec mon cher Samuel, avant de le réchauffer dans notre lit. Mais aujourd'hui, mon sentiment est tout l'inverse.

Je baisse les yeux vers mon téléphone, et l'annonce affreuse que notre avion a été annulé pour cause de neige. Je navigue ensuite vers le site de train que j'ai écumé, sans réussite, pour nous trouver deux places dans un wagon en partance pour Belfast. Je m'en veux terriblement. C'est moi qui ai demandé à Samuel de choisir les airs plutôt que les rails pour nous déplacer vers sa ville natale pour retrouver nos familles respectives. Je souhaitais arriver le plus rapidement possible, et désormais, nous sommes obligés d'annuler.

— Arrête de ruminer toute ta culpabilisation. Ce n'est pas toi qui as décidé de cette météo. De plus, tu devrais regarder les news sur internet. Les trains se font annuler les uns après les autres à cause de toute la neige qui est présente sur les rails. Ils ne veulent pas mettre en danger les ouvriers des sociétés ferroviaires. Le blizzard hurle, je peux les comprendre.

Samuel se place à mes côtés, une main tendue vers moi. Je le fixe, parfaitement dépité. Nous étions censés rendre visite à nos familles l'une après l'autre. Le soir du vingt-quatre chez lui, avec sa mère, sa sœur accompagnée de sa petite-amie — une perle rare d'après mon compagnon, il n'a jamais vu Heather aussi heureuse — et le vingt-cinq, nous nous serions rendus chez Asra et Sheridan, qui partage un petit appartement dans le centre. Nous avions également prévu de rendre visite à Coby, si son devoir ne l'appelle pas auprès d'animaux faisant des indigestions, ainsi qu'Harold, qui passe son premier réveillon seul, après la rupture avec Kat.

— Je sais, mais... tout ça parce que nous habitons à Dublin. J'aurais dû t'écouter, et rentrer à Belfast.

— Peut-être, mais tu as des clients ici. Des clients importants. Et j'aime le laboratoire dans lequel je travaille. S'il te plaît Curtis, ne te mets pas toute la charge de cette tempête de neige sur le dos.

Ses doigts se glissent entre les miens, et il me sourit amoureusement. À bien y réfléchir, je crois qu'à chaque fois que Samuel me sourit, c'est de cette manière. Ça chasse un peu mes sentiments négatifs, et ça me désintéresse de la fenêtre et des affres de la météo.

— Vois-le comme une opportunité, meri jane. Celle de nous retrouver à deux, pour célébrer cette fête. Nous avons un beau sapin, nos cadeaux et de la musique. Nous avons également un toit sur la tête, nous sommes bien habillés, nous sommes propres et au chaud. Quoi de plus beau ?

— Tu n'avais pas besoin de me dérouler tout ton argumentaire. J'étais convaincu à meri jane.

Je me rapproche pour me blottir contre lui, avant de l'embrasser totalement. Il a raison. Nos travails respectifs nous prennent beaucoup de temps, et nous n'avons parfois pas le temps de nous retrouver à deux. Je mange le soir seul, et il déjeune le matin sans moi, tant nos horaires sont décalés.

— Parfait. Mais je ne sais pas si ce petit surnom affectueux va te suffire à accepter mon idée suivante.

— Serais-tu défaitiste, mon cher amant ?

Son sourire illumine toute la pièce à l'utilisation de mon surnom affectueux. Je l'encourage à me révéler le fond de sa pensée.

— J'aimerais que notre dîner de Noël soit non conventionnel. Étant donné que nous étions censés partir, nous n'avons pas d'animal à faire cuire. Mais il s'avère que nous avons de la viande dans le congélateur, et que nous raffolons tous les deux d'une spécialité qui vient de par delà l'Atlantique.

Ciel de NoëlOù les histoires vivent. Découvrez maintenant