Le chalet

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La voiture est stationnée devant l'hôpital de Miho, le message est envoyé et je n'ai plus qu'à attendre. Je trépigne un peu sur place, parce que ça fait des semaines et des semaines qu'on n'a pas eu de congés ensemble. À cause de la trop mauvaise météo en Allemagne, notre match contre le Bayern de Munich est annulé et le coach nous a offert un vrai week-end de repos. Lorsque j'ai vérifié l'emploi du temps de Miho, épinglé sur le frigo à côté du mien, j'ai écarquillé les yeux. Ni une ni deux, j'ai fait toutes les réservations possibles pour nous organiser un petit week-end en amoureux. Il n'est au courant de rien, et c'est pour cela que je trépigne.

— Tu sais, tu n'étais pas obligé de venir me chercher devant la porte principale. Je suis capable de rentrer par mes propres moyens.

— Sauf que tu ne rentres pas.

Je prends un peu la pose devant la voiture, le dos posé contre la portière du conducteur, et un vrai sourire de séducteur aux lèvres. Le fait que je porte mes lunettes de soleil accentue le tout, parce que Miho ne sait même pas que je le regarde fixement.

— Et sous quel prétexte, je te prie ?

Il est toujours devant moi, mais je vois très clairement qu'il est entré dans mon jeu. Ça ne m'étonne pas.

— Celui que je t'emprunte pour le week-end. Tu peux aller rassurer tes patients et tes profs, je te rends dès lundi matin. Et ne te soucie pas de nos valises. J'ai tout préparé, elles nous attendent dans le coffre de ce petit joujou. Et notre chat est chez les voisins, qui se sont fait un plaisir de l'accueillir.

Il avance vers moi, très lentement — il imite Schrödinger quand il veut à manger et qu'il essaie de m'amadouer — avant de se poster juste en face de moi.

— Et où va-t-on, cher emprunteur ?

— C'est une surprise.

— Tu sais que j'adore quand tu me fais des surprises.

— Oui. Justement.

Il mordille sa lèvre inférieure, mais j'attends d'être dans l'habitacle pour l'embrasser. Nous sommes un peu à l'écart de tout le monde sur ce parking, et nous en profitons. Même si je suis officiellement sorti du placard, je n'ai aucune envie de revivre la scène du refuge animalier.

Après avoir salué mon cher fiancé convenablement, je démarre en trombe, et je lance le GPS. Miho joue le jeu et ferme les yeux le temps que je tape l'adresse. Après un rapide calcul de la machine, je me mets en route. Nous en avons pour deux heures, et j'espère que les alentours de Newcastle ne sont pas trop encombrés à cette heure-ci.

Au début de notre voyage, Miho me fait la conversation en me racontant les opérations auxquelles il a assisté pendant ces deux jours de garde. La routine, apparemment, et aucun accident grave ou immense carambolage. Il a même eu le temps de réviser en salle de repos, sans pourtant dormir un peu. C'est pour cela qu'au bout de vingt pauvres minutes, il s'endort comme une masse sur le siège. Profitant d'un feu rouge, je lui passe la paume sur la joue. Il est beaucoup trop mignon ainsi.

Je pourrais me plaindre que je suis obligé de conduire dans le silence le plus strict, mais ça ne me dérange pas du tout. À vrai dire, je suis quelqu'un qui aime l'absence de bruit lorsqu'il est au volant, au risque d'être déconcentré. Je pensais que cette particularité s'effacerait avec l'âge et la pratique, mais force est de constater que c'est toujours le cas.

Je passe donc le reste du temps seul, et c'est d'autant plus amusant de réveiller mon compagnon lorsque nous arrivons. J'ai hâte de voir ses beaux yeux ambrés s'écarquiller comme des billes en découvrant l'endroit que j'ai loué pour deux jours.

Ciel de NoëlOù les histoires vivent. Découvrez maintenant