Mardi 28 Décembre

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Le trajet jusqu'à l'aéroport de Flagstaff s'est fait dans un silence de plomb. Léotie a accepté mes arguments, mais elle est déçue. Je n'ai pas été capable de lui dire si je reviendrai ou pas. Carolina me sert la main. Le vol vers Minneapolis avec escale à Phoenix va me faire gamberger.

- J'espère qu'il n'a pas tout détruit.

- Il a disjoncté quand il a compris que tu étais partie. J'ai entendu les dégâts qu'il a fait dans votre appartement.

- J'avais caché une boite de souvenirs, pourvu qu'il ne l'ai pas trouvée.

- Je ne sais pas mi Amor, mais il y a un mois, il a brûlé pas mal de chose. Entre deux aller et retour de sa part, j'ai récupéré ça.

Elle me tend une photo de mes parents roussi sur les bords. Une larme roule sur mon visage, en plus de vouloir me contrôler, il a cherché à faire disparaître mon passé. Elle me prend dans ces bras pour me consoler, elle connaît mon histoire.

J'ai perdu mes parents dans un accident de voiture durant ma troisième année d'université. Noah était dans ma vie depuis moins d'un an et il a été d'un grand soutien avec elle pour m'aider à faire mon deuil. C'est après cet événement qu'il a doucement commencé à changer. Son comportement s'est modifié subtilement, il a commencé à m'isoler sans que je m'en rende compte. Il avait presque réussi à la fin de nos études. Seule Carolina, mon irréductible meilleure amie, s'est battue pour rester. Elle tenait tête à Noah, ce qui était souvent un sujet de dispute récurent entre lui et moi. Avec l'argent de l'assurance vie de mes parents, mes études étaient assurées et payées. J'ai pu grâce à ce malheur, m'installer et ouvrir ma clinique vétérinaire. J'ai tout naturellement permis à Noah d'exercer avec moi en tant que collègue d'abord puis comme associé. C'est à partir de ce moment que les violences ont commencé. Des gifles, puis des coups de poings, sa violence est montée très vite en puissance et les humiliations aussi. Il m'empêchait de sortir, je ne pouvais qu'aller à la clinique, m'occuper de mes patients et je devais rentrer. Il était toujours avec moi, il ne me lâchait jamais.

Carolina avait trouvé la bonne tactique pour me permettre de sortir avec elle, elle se pointait à notre appartement avec des amis pour m'entraîner dans ses soirées entre filles ou entre amis. Noah, détestant ce type de soirée et haïssant encore plus Caro, refusait d'y aller en tentant de me convaincre de rester avec lui, mais les témoins et amis présents faisaient toujours pencher la balance vers elle.

Il me faisait payer chacune de mes escapades, mais c'était un maigre prix à payer pour garder cet oasis qui me permettait de ne pas mettre fin à mes jours.

Elle me tire de mes sombres pensées en me tendant une clé.

- J'ai mis le reste dans un coffre à la banque. Il est à mon nom, j'ai déjà appelé pour aller le retirer demain.

- T'es la meilleure.

Je lui avais donné ma clé d'appartement afin de passer pendant l'absence de Noah et de récupérer tout ce qu'elle pouvait. Papiers, photos et autres documents qui lui paraissait important.

- Tu les avais trouvés ?

- Non. Mais tu seras contente quand même.

Je savais que Noah avait caché mes papiers d'identité et mon passeport. Je doutais qu'elle mette la main dessus. Je me demande ce qu'elle a bien pu mettre à l'abri. Son sourire mutin me demande de patienter, mais il me rend plus impatiente qu'autre chose.

- Le double est toujours à la même place ?

- Oui, mais tu n'iras pas aujourd'hui et tu dors chez moi.

Je valide car je ne me sens pas capable de faire face à ce que je pourrais éventuellement trouver. Je n'en ai pas la force, j'ai tout épuisé en montant dans cet avion après les adieux déchirant avec Léotie.

- Elle me manque déjà.

- A moi aussi et pourtant je ne la connais que depuis quelque jours. Elle est attachante cette femme.

- Je sais. Sinon, Peter m'a proposé d'être son associé.

- C'est super ! Tu as accepté, j'espère !

- Je n'ai rien dis. J'hésite.

- Il n'y a pas de raison. Tu clôtures tout ici et tu rentres.

- Je vais y réfléchir. Ça dépendra de ce que je pourrais faire ou non là-bas.

- Franchement, je ne sais pas ce que tu va trouver, après mes deux arrestations, j'ai eu ton ami Bryan au téléphone et j'ai pris le premier vol pour te rejoindre. Je ne suis passé qu'en coup de vent chez moi pour prendre une douche et un sac avant de sauter dans l'avion.

- Je sais et j'ai peur des dégâts qu'il aurait fait. Il était capable de tout.

- On gérera au coup par coup, mi Amor. Demain.

Je termine le voyage endormie sur son épaule, elle est toujours là pour moi et rien que pour cela je lui en serai éternellement reconnaissante. Il n'existe pas d'amie plus fidèle et protectrice qu'elle. Je ne pourrai jamais lui rendre tout ce qu'elle a fait pour moi et j'ai toute une vie pour tenter d'y parvenir.

J'ai vraiment peur de ce que je vais trouver demain, mais je ne craquerai pas. Ils n'interviendront plus jamais sur ma vie et sur mon état émotif. Je leur refuse cette emprise sur moi. J'ai décidé de tourner la page, pour cela Bryan doit trouver l'enveloppe que je lui ai laissé en partant. J'ai rempli tous les papiers avant de partir. Je lui ai donné une nouvelle adresse mail que j'ai crée avant mon départ afin de lui faire parvenir mes diplômes pour faire les changements. Je pourrais repartir à zéro et pratiquer le métier que j'aime. J'ai survécu et pour cette nouvelle vie qui s'offre à moi, j'ai décidé de tout faire pour être heureuse.

La Magie de l'AvantOù les histoires vivent. Découvrez maintenant