Quelques minutes après un long silence, Stéphane accepte de se pencher sur la demande de Maître Albertine. Il l’invite dans son bureau. Ils contournent la véranda et entrent dans un spacieux bureau. Les salamalecs occupent les débats. Faisant semblant de ne pas s’être préoccupé par la question de l’avocate, le directeur de l’hôpital ouvre une discussion n’ayant pas trait avec la venue de Maître Albertine. Celle-ci très attentive aux moindres gestes du directeur reprend le fil de la discussion. Il lui fait entendre les mots suivants.
— Je suis très admirative de votre générosité Monsieur Mendy. Depuis mon arrivée, je vois que vous vous comportez élégamment bien avec moi. Donc je me sens épatée par votre courtoisie. L’éloquence dont vous faites preuve ne me laisse pas indifférente. Croyez-moi, dans d’autres circonstances, je serais empreinte de vous qualifier de poète. Par contre, je suis très prise par une affaire professionnelle concernant votre hôtel et j’aimerais que vous répondiez à certaines questions.
Le directeur de l’hôtel se ressaisit. Il refait sa cravate avant de s’assoir correctement sur son fauteuil. Il la pointe des yeux. Sa voix change automatiquement. Ce changement donne plus d’idées à l’avocate qui lui répète de plus belle la question. Le directeur ne peut s’empêcher cette fois de répondre.
— Maître, je pense que les limiers de la gendarmerie sont en pleine enquête. Ils ont été de passage ce matin. Depuis la nuit des faits, ils viennent constamment à l’hôtel pour interroger mon équipe. J’ai déjà eu deux rencontres allant dans ce sens avec eux. Donc, je doute que je puisse vous aider. Je suis désolé mais je ne peux rien vous dire là-dessus.
— Je suis navré de vous le dire mais en tant que personne morale de cette structure, je ne pense pas que votre aide me soit inutile. Vous devez sûrement savoir que c’est une affaire très délicate. Mon client est peut-être innocent. Et pour l’innocenter toute forme de preuve est la bienvenue. Maître Albertine échoit sa lecture des choses. Même si elle est déjà au courant de la version de Djibril, elle ne veut pas dire à Stéphane que son client à accepter son crime. Elle atteste une prudence très bien maîtrisée car l’expérience lui a montrée que parfois c’est l’élément le moins important au premier regard qui peut tout changer. Elle ne veut pas lésiner sur les moyens. Elle fixe tout droit son interlocuteur.
— Je vois que vous insistez. Dites-moi alors comment puis-je vous aider ?
— Juste en répondant à certaines questions qui me semblent hyper importantes pour tirer cette affaire au clair.
— Allez-y. Je vous écoute.
— Merci beaucoup Monsieur Mendy. Déjà, j’aimerais savoir où est-ce que vous étiez le 14 février à 21 heures ?
— C’est quoi cette question ? Dois-je la reformuler autrement pour conclure que vous voulez m’accrocher à cette histoire de viol et de meurtre ?
La question poignarde déjà Stéphane qui semble apeuré par son caractère burlesque. Maître Albertine la reformule.
— Loin de là, croyez-moi, c’est juste une petite question. Je veux juste savoir si vous étiez à l’hôtel ou pas la nuit des faits ? Mes prochaines questions sont analogues à votre réponse.
— Vous savez que la Saint-Valentin reste la fête la plus importante pour les amoureux. Du coup, le 14 février, à l’heure du crime, j’étais chez moi avec ma femme. Devinez bien le cadeau que je lui ai offert à l’occasion de cette fête solennelle.
Maître Albertine est plus intéressée par ses questions. Elle n’est pas venue pour déchiffrer des devinettes. Elle ventile sa politesse pour ne pas disjoncter la discussion.
— Vous me donnez l’impression d’être un homme très romantique. Certainement, votre femme a reçu un cadeau inoubliable durant cette nuit.
— Je vous assure que ma femme a reçu le meilleur des cadeaux. C’est une voiture de dernière génération. Elle était très contente.
— Félicitations très cher. Vous êtes vraiment un bon mari.
Les compliments de l’avocate font sourire le directeur de l’hôtel. Mais la robe noire n’est pas satisfaite de ses réponses. Elle a une foultitude de questions. Le dialogue doit à cet effet reprendre.
— Monsieur Mendy, dites-moi, combien de vigiles travaillent d’habitude la nuit dans votre hôtel ?
— Il n’y en a que deux vigiles qui travaillent la nuit à l’hôtel. Le directeur répond en toute spontanéité.
Un paradoxe s’installe automatiquement sur la tête de Maître Albertine. L’un des vigiles lui a tout à l’heure dit qu’ils étaient quatre la nuit du 14 février à être en garde. Comment se fait-il alors que le directeur lui fasse comprendre qu’il n’y en a que deux vigiles qui sont en garde les nuits ? Quelque part, il y a un mensonge. Soit les deux vigiles mentent, soit le directeur ment. Elle veut faire un rapprochement entre la réponse du directeur et l’affectation des deux autres vigiles. Elle se dit aussi qu’il soit possible que les deux vigiles aient voulu créer une sordide histoire d’affectation seulement pour la conduire dans une fausse route. Ce qui est sûr, de toute manière, c’est que cette histoire cache beaucoup de choses. Maître Albertine sait pertinemment que ce mensonge est annonciateur de pas mal de nouvelles intrigues.
À suivre…
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Pots Cassés 🥃❌
ActionEst-ce logique de payer pour un crime qui peut-être n'est pas le sien ? Une question qui constitue la charpente de cette histoire. Les personnages sont appelés à tour de rôle à découvrir des vérités profondes qui se cachent derrière des chimères. De...