- Je veux savoir. Je veux tout savoir papa. Je pense que l'heure est venue pour que je sache toute la vérité. J'ai toujours voulu rencontrer ma mère. J'ai longtemps pleuré seul dans ma chambre tellement la chaleur de maman me manquait. Quand je voyais les autres enfants avec leurs mamans, je les jalousais. Et même si c'est aujourd'hui la dernière fois qu'on se verra, j'aimerais au moins que tu me dises ce passé douleur que tu as vécu.
- Tu as raison mon fils. Tu mérites de savoir enfin la vérité. Je t'ai caché cette histoire pour ne pas te blesser.
Le père et son fils se posent en face à face.
- J'étais en Europe. J'y travaillais depuis des années. Cela faisait dix ans que je n'avais pas foulé les terres sénégalaises. La première fois que j'étais revenu au Sénégal, mes parents m'avaient contraint à me marier avec ma cousine Hermione. Je ne voulais pas m'engager dans une relation sérieuse. Je n'avais ni le temps ni la volonté. Le paysage européen m'avait fait connaître d'autres réalités, un nouveau monde. Je faisais la navette entre les capitales européennes. Je devais accepter, par contre, la décision de mes parents. Je ne pouvais pas aller à l'encontre de leur décision. J'avais épousé Hermione. Je ne l'aimais pas au début. Mais avec le temps, j'étais parvenu à tomber amoureux d'elle. Nous formions un beau couple. Tout le monde parlait de notre relation. J'étais fier d'elle. Comme elle était ravie de moi. Elle venait tout le temps en France. Deux ans après notre mariage, j'étais venu en vacances avec des touristes. Quand j'étais reparti avec eux en France, Hermione m'avait informé qu'elle était enceinte. J'étais le plus content des hommes du monde. J'attendais la naissance de cet enfant avec impatience. Un nuit de Noël, Hermione avait accouché d'un enfant. Cet enfant symbolisait notre amour. Je lui avais donné le nom de Gilbert Mendy. J'étais définitivement rentré au bercail pour être plus proche de Gilbert et de Hermione. Nous vivions le grand amour. Nous constituions une formidable famille. Deux ans après, Hermione m'informait d'une autre nouvelle.
- Sors de la salle de bain, j'ai une bonne nouvelle à t'annoncer.
- D'accord mon amour. Quelle est cette belle nouvelle ?
- Gilbert va avoir un petit frère.
- Sérieux ? Tu es enceinte mon amour ?
- Oui, j'attends un enfant.
Tu ne peux même pas savoir combien j'étais heureux d'avoir mon second enfant. Je veillais sur Hermione à chaque instant. Je voulais juste qu'elle ait une grossesse normale. C'était moi qui cuisinais pour elle. Je lavais Gilbert. Je changeais ses couches. Uniquement pour que Hermione soit en bonne santé. Le jour de l'accouchement de ce second enfant, j'avais la peur au ventre. La sage-femme m'avait dit après des heures d'attente qu'il y avait des complications. Il n'y avait qu'une seule option. L'accouchement devait se faire par césarienne. Heureusement, tout s'était bien passé. Un mignon petit garçon était venu au monde. Je l'avais baptisé des jours après Maurice Mendy. Maurice parce que c'était le prénom du père de Hermione. Une année plus tard, alors que j'étais seul dans la maison avec toi, je recevais une visite.
- Édouard ? Quelle surprise !
- Stéphane, comment vas-tu ?
- Je vais bien et toi ?
- Content de te revoir. Depuis quand t'es venu au Sénégal ?
- Je viens d'arriver. Je suis venu pour te dire une chose. Une chose qui va changer ta vie.
- Ah bon ? Je t'écoute.
- Tu te rappelles de Jacques ?
- Oui, je me rappelle de lui. Jacques, ton cousin. Celui était venu au Sénégal avec toi. Qu'est-ce qui lui est arrivé ?
- Il est mort il y a de cela une année.
- Je te présente mes condoléances. Je n'étais pas au courant.
- Merci mais avant sa mort, il m'avait fait savoir qu'il t'avait fait du mal.
- Du mal ? Comment ça ?
- Quand nous étions venus au Sénégal, il avait couché avec ta femme. Celle-ci attendait d'ailleurs son enfant.
J'avais failli tuer Édouard car ce qu'il me disait n'avait aucun sens. Il m'avait conseillé d'en parler avec Hermione. À ma plus grande surprise, sanglotant et gémissant, Hermione n'avait pas contredit les dires d'Édouard. C'était le jour le plus triste de ma vie. Ce cocufiage m'avait anéanti. Je savais que c'était fini entre Hermione et moi. Je n'avais pas le courage de passer une minute de plus dans cette maison. Je t'ai récupéré et j'avais quitté le Sénégal. Tu étais un petit enfant. Je t'avais séparé de Hermione car elle n'était pas une bonne mère pour toi. Je ne voulais pas que tu aies ne serait-ce une nouvelle d'elle. Une fois en France, j'étais devenu un autre. L'alcool m'avait transformé. Seul ton visage ensorcelant me donnait encore espoir de vivre. C'est comme ça que j'ai décidé de reprendre ma vie en main. Désormais, je m'étais dit que tout le monde allait payer. Je t'ai donné cette vie de sanguinaire pour que tu ne sois pas dominé, pour que tu puisses dominer tout le monde. Ma fierté dans cette vie, c'est toi.
Grégoire déboutonne sa chemise. Il peine à respirer.
- Je ne sais pas ce que je dois te dire. Pourquoi tu as changé mon nom ?
- Je ne voulais pas que tu aies un lien avec la famille de Hermione.
- Et Gilbert ? Tu l'as retrouvé comment ?
- Il est venu un jour à l'hôtel. Il cherchait du travail. À travers ses pièces, j'ai su qu'il était ce bâtard. Il m'a même dit que sa mère est décédée.
- Ma mère. Cette femme qui a changé ta vie reste tout de même ma mère. Gilbert sait qu'il a un frère mais il ne sait pas que c'est moi.
- Il te l'a dit ?
- Oui papa. Ma mère est en vie. Elle n'est pas morte. Elle est actuellement à l'hôpital. Elle m'a tout à l'heure confondu avec Maurice, son enfant. Tu veux la voir ?
- Jamais, au plus grand jamais, je ne reverrai cette femme. C'est ça la vérité. Je vais rentrer maintenant.
Stéphane fait dix pas. Il sort du bureau. Avant qu'il ne quitte le salon, Grégoire l'appelle. Il se retourne.
- Papa, tu m'as toujours dit que dans cette vie, il n'y a que la loi du plus fort qui domine. Tu m'as toujours conseillé d'être un prédateur affreux capable de tout pour sauver ce qui lui appartient. Tu m'as même un jour dit que si je peux te tuer, toi mon père, pour avoir ce que je veux, je pourrais le faire.
- Je te le confirme encore une fois. Tu es un lion, tu dois rester le roi de la brousse.
- C'est bien. À dieu papa.
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Pots Cassés 🥃❌
AcciónEst-ce logique de payer pour un crime qui peut-être n'est pas le sien ? Une question qui constitue la charpente de cette histoire. Les personnages sont appelés à tour de rôle à découvrir des vérités profondes qui se cachent derrière des chimères. De...